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L'entretien de la semaine NEDWA SENHADJI,ARCHITECTE ET DECORATRICE D'INTERIEUR AU SOIRMAGAZINE
«Le recours au décorateur d'intérieur tend à bousculer les habitudes»
Beaucoup d'Algériens font appel à un architecte d'intérieur pour refaire leur décoration. Les meubles, les couleurs, les rideaux et les tissus sont autant d'éléments à prendre en compte pour décorer son appartement, sa maison ou son bureau. Pourquoi cette tendance ? Quels sont les goûts des Algériens ? Mlle Nedwa Senhadji, architecte de formation et décoratrice d'intérieur, nous apporte, dans cet entretien qu'elle a bien voulu nous accorder, son éclairage sur la question. Soirmagazine : Doit-on vous qualifier d'architecte ? Ou bien de décoratrice d'intérieur ? Mlle Nedwa Senhadji : Je suis architecte de formation. Après un ingéniorat de cinq ans, je me suis inscrite à un concours pour un master 2 (un doctorat en architecture). Le métier d'architecte décoratrice est venu plus tard, et ce, après quelques années de travail dans différentes entreprises de design. J'ai eu aussi la possibilité d'exercer dans une compagnie industrielle à Ottawa (Canada) durant un an. En rentrant en Algérie, j'ai eu la chance de m'occuper de la décoration d'intérieur dans le film El Wahrani de Lyes Salem. Qu'est-ce qui a motivé votre choix de vous orienter vers la décoration d'intérieur ? Ces dernières années, c'est devenu une tendance que de re-décorer son intérieur, on remarque que presque toutes les chaînes de télévision consacrent une émission à ce thème. Les gens s'intéressent aujourd'hui à refaire la décoration de leur maison une fois par an ou tous les deux ans. Pour cela, ils font généralement appel à des professionnels. J'ai toujours été attirée par tout ce qui est étude chromatique, les couleurs, les matières m'ont toujours fascinées. Vous êtes nombreux à exercer le métier de décorateur d'intérieur ? Non, nous ne sommes pas nombreux en Algérie, car au niveau académique la spécialité en tant que tel n'existe pas. Il faut apprendre soimême, et être à jour par rapport aux nouveautés (les matériaux, les couleurs, changent selon les saisons). Sinon il faut avoir les moyens d'aller à l'étranger pour suivre une formation dans ce domaine. Selon vous, pourquoi ce soudain engouement des Algériens envers la décoration d'intérieur ? Tout le monde est maintenant branché, on voit ce qui se fait ailleurs, en Occident, on suit les émissions déco européennes, américaines, sans oublier bien sûr les séries turques qui ont une décoration magnifique. A partir de là, l'Algérien se dit alors : «Pourquoi je ne ferai pas pareil chez moi ?» Il a compris que relooker son appartement, sa maison, son bureau, procure du bien-être. S'agit-il d'une mode passagère que de solliciter l'aide d'un décorateur d'intérieur ? En Algérie, la nouvelle génération a pris conscience de ce changement et les gens seront toujours attirés par tout ce qui est «tendance». L'architecture d'intérieur moderne fera inévitablement partie de nos préoccupations, de notre savoir-vivre, et on suivra toujours les nouveautés dans ce domaine. Vous avez déjà réalisé des décorations d'intérieur pour des particuliers ? Oui, mais pas en Algérie, parce qu'ici les gens ne savent pas à qui s'adresser, qui contacter. Il n'y a pas d'agences spécialisées dans la décoration d'intérieur. Du coup, les Algériens prennent l'initiative de chercher, de copier, en combinant eux-mêmes les matériaux pour apporter de la fraîcheur à leur décoration. Mon ambition est de réaliser des décorations d'intérieur chez des particuliers algériens. Selon vous, quel est le style le plus demandé, entre le classique, le moderne et l'oriental ? Tout est question de goût. Il y a ceux qui aiment les antiquités, les grands meubles, d'autres qui exigent que vous respectiez leur héritage ancestral en conservant par exemple les grands tableaux, les vases, les bibelots. Ils veulent aussi rester dans le rustique, le sobre et s'attachent aux couleurs neutres : le blanc, l'écru. Les plus âgés vont vers le classique. les jeunes, quant à eux, sont plus attirés par le moderne, les couleurs vives, celles qu'on n'osait pas avant. L'ancienne génération a peur du changement, elle refuse de perdre ses repères, contrairement à la génération actuelle qui est branchée plutôt vers l'extérieur, notamment l'Occident. Quels sont les demandes les plus difficiles à réaliser qu'un client peut exiger de son décorateur ? C'est lorsque le client vous demande de réaliser un certain style tout en vous limitant dans les coûts. Dans notre métier, il y a trois mots-clés qui sont difficiles à faire rentrer dans un seul cercle : qualité, quantité et prix. C'est très difficile de répondre aux exigences des gens dans ces conditions. Justement qu'en est-il des coûts lorsqu'il s'agit de refaire la décoration d'un appartement par exemple ? Souvent, nos clients nous demandent de reproduire celle qu'ils ont vue dans une série télé, mais la difficulté c'est que souvent les peintures sont chères, la main-d'œuvre également. Pour les meubles, le problème ne se pose pas, aujourd'hui les peintures sont importées d'Europe, de Turquie. Mais ça reste tout de même onéreux, car les matériaux utilisés pour une décoration de qualité se vendent à des prix exorbitants, cela va de soi. Mais disons que c'est le début, ça va probablement changer dans quelques années. La décoration d'intérieur a de tout temps été réservée à la femme. Une chasse gardée, dirions-nous. Qu'en pensez-vous ? Depuis toujours c'est la femme qui se charge de la décoration de sa maison, et l'avènement de cette tendance à recourir au décorateur d'intérieur tend à bousculer un peu ses habitudes. Cela n'empêchera pas la femme de continuer à avoir un rôle important dans ce domaine, car elle a cette sensibilité, ce goût inné de la beauté, du raffiné, qui lui est propre et dont elle ne peut se défaire. Quels sont vos prochains projets dans le domaine de la décoration d'intérieur ? Je devrais prendre part au projet de tournage du film Algérie pour toujours prévu à Oran au mois d'août. J'ai eu d'autres offres telles que le film d'action qui doit être tourné à Alger, je n'ai pas encore étudié l'offre. Sinon, je tiens beaucoup à reprendre mes études pour me perfectionner.