Le père Ubu, avec son fameux bon sens, prétendait qu'il n'y avait de problème polonais que parce qu'il existait des Polonais, bien qu'il n'y eut pas de Pologne. Eh bien, nous étendons cette citation à l'entreprise Sonatrach, pour qui, il n'y avait pas de problème de l'indemnité d'expérience professionnelle (IEP) dès l'instant qu'il n'y avait pas d'employés en exercice suffisamment «courageux» pour intenter une action en justice en vue d'arracher ou plutôt de lui faire entendre raison, comme de raison. Ce qui laisse aisément penser que cette initiative est laissée au libre choix et à l'appréciation des seuls retraités qui, décidément dans l'imaginaire de Sonatrach, n'ont rien à perdre pour oser une telle démarche au demeurant toute citoyenne. Evoquée tant de fois, cette alternative de règlement par voie judiciaire était presque devenue un sujet de plaisanterie, n'eussent été ses multiples tracasseries ses démarches éreintantes, ses dédales obscurs et surtout le coût moral incommensurable qui ternit l'image de marque de l'entreprise qu'elle subit avec dédain. En complément à tout ce qui avait été dit et écrit sur ce sujet, qu'il nous soit permis d'ajouter au libre débat les quelques observations qui sont les nôtres et qui se résument aux points suivants : 1 - Le nouveau système de rémunération (NSR), comme chacun le sait, intègre au nouveau salaire de base toutes les primes fixes et variables, exceptées les primes dites de compensation (panier, pv...). 2 - Le nouveau salaire de base exclut de son champ d'intégration l'Indemnité d'expérience professionnelle (IEP) pour une bonne partie du personnel en exercice, que le nouveau système (NSR) rémunère sous la rubrique Indemnité ancienneté groupe (IAG), déterminée à l'instar de l'Indemnité d'expérience professionnelle (IEP) par un taux d'ancienneté indexé au salaire de base. 3 - Si Sonatrach prétend avoir supprimé l'article 67 de la Convention collective, relatif à cette IEP, objet de son refus de régulariser ses employés, et ses retraités partis à la date postérieure à janvier 2008, qu'elle nous dise sur quelle base continue-t-elle à fixer le montant de l'IAG servi à ses employés en exercice jusqu'à ce jour ? Sachant que cette IAG diffère d'un employé l'autre, c'est-à-dire calculée sur un taux d'ancienneté exactement comme l'ancienne IEP. l'issue est possible dans la sérénité et la concertation 4 - Quittons l'espace technique, venons-en maintenant aux aspects de gestion : nous considérons pour notre part que malheureusement l'entreprise a rusé avec ses employés et ses retraités et continue à le faire, contre le bon sens et le verdict de la justice, en supprimant de son répertoire lexical l'IEP pour lui substituer par euphémisme l'IAG, qui, à tous points de vue, demeure identique. 5 - Pourquoi Sonatrach refuse-t-elle de régulariser ? Tout simplement, parce que s'étant rendu compte a posteriori de son erreur, et comme telle, par conséquent, elle avait un coût que d'aucuns diront un «impact financier», estimé par différentes commissions installées çà et là, que Sonatrach refuse d'endosser en s'essayant maladroitement à gagner du temps, à louvoyer, à tergiverser, à distiller des rumeurs de régularisation, et ce, jusqu'à prescription. 6 - En attendant cette prescription, Sonatrach savait que ses employés en exercice n'oseront pas pour des raisons évidentes recourir à la justice pour recouvrer leurs droits. Quant aux retraités qui peuvent oser pour des raisons évidentes contraires, eh bien qu'ils le fassent ou non, cela ne gêne en rien l'entreprise, parce que, d'une part, l'impact financier est moindre, d'autre part, les décisions de justice sont une «couverture» à la dépense et par ricochet un moyen, voire une aubaine pour usurper le label d'entreprise citoyenne. 7 - Pourquoi en est-on arrivé là ? Parce que l'équipe ou plutôt les équipes en charge du dossier Nouveau système de rémunération «NSR» n'ont pas, à notre sens, pris toute la mesure des difficultés qui les attendaient. Elles se sont laissées prendre par le piège de la précipitation, en sous-estimant la dimension «temps» en rapport avec l'ampleur de la tâche, que tout un chacun savait ardue. Aussi, les équipes en charge se sont attaquées à la pyramide des salaires par le haut, «top down» au lieu de commencer, comme le veut la logique, par le bas, sans démonstration valable ni explication convaincante. Imaginons, pour caricaturer, un engin hissé sur la terrasse d'un immeuble à démolir ! 8 - Comment doit-on sortir de là? Sans remettre en cause tout ce qui avait été fait jusque-là, au prix d'efforts méritoires que l'on sait, en argent, en énergie, en logistique et en coopération avec les étrangers, nous pensons que l'issue est possible à condition que cela se réalisât dans la sérénité et la concertation d'avec tous les organes de régulation sociale (directions, syndicats, conseil d'administration, etc.) et poser le problème sans détours, honnêtement, loyalement et franchement. Nous sommes certains, que si tel est le cas, la Direction trouvera des oreilles attentives à ses préoccupations qui partageront à coup sûr, du moins partiellement, ses motivations. Dans cette optique, elle peut d'ores et déjà nous compter parmi les siens jusqu'à la gauche, comme nous l'avons été 35 ans durant. Mouloud Moulkaf, retraité Sonatrach