La marche unitaire à laquelle ont appelé plusieurs mouvances issues du MCB, à l'occasion de la commémoration du 34e anniversaire du Printemps berbère, a dégénéré en affrontements avec les services de sécurité dont de nombreuses brigades motorisées ont été déployées, tout au long du parcours prévu pour la manifestation. Le dispositif policier en étau, mis en place, tôt dans la matinée d'hier, sur l'axe faisant face au campus Hasnaoua de l'Université Mouloud- Mammeri de Tizi-Ouzou renseigne sur la détermination des autorités à empêcher les marcheurs à se déployer. Le premier carré constitué majoritairement de militants du MAK, au vu des slogans proférés et de la multitude de bannières tricolores déployées et qui s'est mis en ordre de marche vers le centre-ville a été stoppé net par un véritable rideau compact de CNS, boucliers et matraques en main et prêts à intervenir. Le face-à-face animé côté manifestants qui scandaient des slogans habituels des militants du MAK et du MCB. «Mazlagh dimazighen (Amazighs nous sommes, Amazighs nous resterons), on n'a pas peur de la guerre», criaient les protestataires, parmi lesquels il y avait beaucoup de femmes et de jeunes étudiants, pour la plupart, qui ne se privaient pas de chambrer les policiers. Soudain, des pierres lancées d'on ne sait où sont venues rompre le face-à-face qui se transforme en affrontements violents entre les deux camps. Plus bas, d'anciens militants de la première heure du MCB, à l'image de Saïd Khellil, Mouloud Lounaouci, Saïd Doumane, Rachid Aït Ouakli, Ouanoughen, et bien d'autres membres du groupe de signataires de la déclaration dite d'Ighram qui sont partie prenante de l'appel à la marche unitaire d'hier, faisaient tout pour éviter l'affrontement et réorganiser la foule, dans une tentative de relancer la marche. C'était peine perdue. Après une brève accalmie, ce fut de nouveau l'affrontement avec échange de jets de pierres dont usent aussi les policiers qui ont dû recourir à l'usage des gaz lacrymogènes. Le même décor a été observé à hauteur de l'université, en face du stade 1er-Novembre où des escarmouches ont éclaté entre groupes de jeunes et les CNS déployés en grand nombre. Plusieurs blessés légers ont été enregistrés. On parle, également, de nombreuses interpellations de jeunes. Plus d'une centaine, selon nos informations, ont été opérées. Dans un communiqué rendu public par les signataires de l'appel d'Ighram, ces derniers dénoncent «avec la plus grande fermeté l'empêchement à Tizi-Ouzou de la manifestation qui devait se tenir dans un cadre unitaire, rassembleur et pacifique. La répression de cette marche constitue un acte grave et porte atteinte au 20 Avril, date historique et symbole du combat amazigh et des libertés démocratiques», lit-on dans le communiqué qui dénonce «des actes de provocation manifestes des services de la répression qui ont transformé une manifestation qui se voulait pacifique en émeute avec de nombreux blessés. Le pouvoir porte l'entière responsabilité de cette agression et des conséquences qui en découlent». Et de poursuivre «le message du pouvoir qui vient de s'accorder une rallonge de cinq ans est on ne peut plus clair quant à sa politique de déni des libertés et notamment celle relative à la revendication amazighe». Un appel est lancé à l'ensemble des militants de la cause amazighe toutes tendances confondues «pour une large concertation pour dégager les voies et moyens à même d'imposer notre combat», écrivent en conclusion les auteurs du communiqué. Il faut noter la présence d'ex-animateurs et militants du MCB de la première heure et de militants du RCD venus participer à la marche avortée pour la célébration du 34e anniversaire du Printemps berbère. Il faut signaler aussi que c'est la première fois, depuis 32 ans, que la police intervient pour empêcher et réprimer une manifestation qu'organisent cycliquement, en pareille occasion, les militants de la revendication identitaire qui n'avaient jamais eu à demander d'autorisation des autorités.