Le retour du FIS dissous à l'activité politique légale fait débat. Ses dirigeants n'ont de cesse d'en faire la réclamation. Certains quêtent le geste clément du pouvoir, d'autres tablent sur un contrebalancement favorable du rapport de force politique, préférant faire corps avec l'opposition. Soupçonné de faire la courte échelle à l'ex-FIS, le pouvoir répond que cela n'est point dans son intention. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) Alors que trois des anciens dirigeants du FIS dissous, Ali Djeddi, Abdelkader Boukhamkham et Kamel Guemmazi, assistaient mardi à la conférence pour la transition démocratique, organisée par la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD), le Premier ministre Abdelmalek Sellal terminait sa prestation devant le Sénat par cette affirmation : « Le FIS en tant que parti ne figure pas sur notre agenda.» Faut-il prendre cette déclaration de Sellal comme l'expression d'un engagement à ne pas élargir davantage le champ des concessions accordées aux anciens dirigeants et militants du parti dissous ? L'article 47 de la loi portant charte pour la paix et la réconciliation nationale permet toutes les extensions possibles et imaginables du projet de réconciliation nationale cher à Bouteflika. Tout récemment, un décret portant levée des interdictions de voyager pour les dirigeants du FIS dissous a été signé. Le président de la cellule de suivi de l'application de la charte pour la paix, Merouane Azzi, annonçait, de son côté, que des mesures (indemnisations) seront prises en faveur des internés du Sud au début des années 90. Ajoutées aux invitations faites par la présidence de la République aux anciens du FIS à participer aux consultations autour du projet de la nouvelle Constitution, ces mesures sont lues par d'aucuns comme un prélude sérieux à la concession majeure : la réhabilitation politique du FIS dissous. D'ailleurs, il ne manquerait qu'un seul pas avant que cette option ne soit traduisible en acte concret. Le Premier ministre a lui-même expliqué que les anciens du FIS «ont été convoqués en tant que personnalités afin de participer aux consultations sur le projet de révision constitutionnelle, car le président de la République en personne a donné des instructions pour qu'aucun Algérien ne soit exclu». Et à partir du moment que le statut de personnalité leur est accordé et, en sus, associés à une activité politique si importante qu'est la révision de la loi fondamentale, il ne reste que le formalisme pour l'exercice d'une activité partisane. L'un des invités d'Ahmed Ouyahia et qui a crié haut et fort qu'il y répond favorablement, El Hachemi Sahnouni, pour ne pas le nommer, avait eu à soutenir que le retour du FIS dissous sur la scène politique a reçu le feu vert du pouvoir. Trahison d'un secret d'alcôve ou surenchère ? A l'évidence, Sahnouni, tout comme Madani Mezrag, fondent beaucoup d'espoir sur une indulgence du pouvoir. Aussi ont-ils fait le choix, tactique, de se rendre disponibles aux sollicitations de ce dernier. Une attitude qui les distingue du reste des dirigeants du FIS dissous qui disent, eux, ne rien attendre de la part du pouvoir, faisant le choix de fréquenter l'opposition. Cela laisse supposer que des luttes en sourdine minent les différents prétendants à la réactualisation du label terni du FIS dissous. A moins que, pour les anciens du parti dissous, mettre les deux fers au feu, procède d'une démarche concertée.