Ses traditionnelles amitiés islamistes lui ont faussé compagnie, le pouvoir s'est mis à chercher la fréquentation de ceux jadis radicaux, en l'occurrence les anciens dirigeants du Front islamique du salut dissous (FIS). Une quête qui, par certains aspects, se lit comme un prélude à la réhabilitation politique de ces derniers. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) Ce n'est plus de manœuvres qu'il s'agit en effet, mais bien, sinon d'une réelle volonté, d'une contrainte à trouver en les figures de l'ancien FIS des substituts aux islamistes dits modérés qui ont décidé enfin de rompre les amarres avec le pouvoir. Le rapprochement s'avère dans l'association aux consultations autour de la nouvelle Constitution d'un Madani Mezrag, ancien émir de l'Armée islamique du salut (AIS), et la tentative avortée d'en faire de même avec un Abdelkader Boukhamkham, ancien dirigeant du FIS dissous. Faute d'avoir pu intéresser l'opposition légale au dialogue proposé autour de la mouture de la nouvelle Constitution, le ministre d'Etat, directeur de cabinet à la présidence de la République, Ahmed Ouyahia, a expédié des invitations aux deux anciens du FIS, prenant la précaution, inutile, de leur conférer le statut de personnalités nationales. Si Madani Mezrag se répand depuis en déclarations publiques à travers lesquelles il affiche sa disponibilité à déblatérer avec Ouyahia, Abdelkader Boukhamkham ne se laisse pas, lui, embarquer aisément dans l'aventure. A Ouyahia qui l'a prié de se déplacer à El Mouradia, ce dernier répond, la courtoisie mise à part, par un pamphlet politique par lequel il met en exergue la flagrante contradiction dans la démarche du pouvoir. Abdelkader Boukhamkham s'est dit surpris et déconcerté qu'on l'y invite à prendre part à une activité politique alors qu'il reste, par la force de la loi, déchu de ses droits civiques et politiques et qu'en sus, il se trouve depuis 2009 astreint au contrôle judiciaire. Il est clair que l'ancien dirigeant du FIS dissous ne se rend pas à une telle observation juste pour s'apitoyer sur son sort. En filigrane, il sollicite davantage de concessions de la part d'un pouvoir qu'il sait esseulé et en quête de soutiens islamistes, celle de permettre le retour de l'ex-FIS à l'activité politique légale. Le président Bouteflika, qui a postulé et obtenu un 4e mandat d'affilée, en dépit de sa maladie, en consentira-t-il, lui, qui déjà a pris le soin d'édicter la levée de l'interdiction de voyager pour les anciens dirigeants du FIS et les repentis ? Ce n'est pas impossible. Peut-être que c'est par un tel acte qu'il entend épiloguer son entreprise de réconciliation nationale. Un chantier toujours ouvert, puisqu'il est projeté de constitutionnaliser la réconciliation nationale comme une constante nationale. Outre qu'il n'est pas abreuvé aux options éradicatrices de l'islamisme radical, Bouteflika se serait retrouvé dans la nécessité de se rapprocher des anciens du FIS pour remeubler sa cour qui s'est considérablement vidée après la cascade de désertions enregistrées. Parviendra-t-il à les apprivoiser ? Peu sûr. Les anciens du FIS sont, pour le moment, plus intéressés par une remontée politique dans le sillage de l'opposition que par une réhabilitation-promotion sur une décision du palais.