Les démons de la fitna se réveillent au premier jour de l'Aïd, à Berriane, à 45 km au nord de la ville de Ghardaïa. Les Chaâmbis accusent les Mozabites d'avoir jeté des pierres sur une de leurs femmes, alors que ces derniers nient les faits et accusent les premiers d'avoir caillassé un convoi de leurs véhicules. Mehdi Mehenni - Alger (Le Soir) Alors que la fête de l'Aïd est synonyme de paix et réconciliation, les affrontements reprennent de plus belle dans la Vallée du M'zab. C'était d'abord, au centre-ville de Ghardaïa que les hostilités ont commencé au moment de la prière matinale. Plus exactement à Haï Baba-Saâd, où l'imam d'une mosquée mozabite a dû tout arrêter. Des affrontements ont éclaté et ont duré pendant une he nure de temps, avant que les choses ne se calment. La paix n'aura duré qu'un après-midi, puisque vers 20h, le vent fait parvenir les grains de la discorde à Berriane. Des jets de pierres sur une femme arabe de passage devant un quartier mozabite ont allumé le brasier de la colère avant que les flammes ne dévorent la ville. Les Mozabites nient catégoriquement qu'un des leurs ait pu s'adonner à une telle pratique. Khoudir Babaz, membre de la cellule de coordination et de suivi des Mozabites, affirme de son côté que les affrontements se sont produits après qu'un groupe de Chaâmbis aient attaqué un convoi de véhicules mozabites avec des jets de pierres. «Les affrontements ont eu d'abord lieu entre policiers et Chaâmbis avant qu'ils ne s'étendent vers les quartiers mozabites. Nous avons comptabilisé trente maisons incendiées, une partie d'une école primaire, dix véhicules, douze blessés et un autre grièvement atteint par un fusil de chasse et est actuellement hospitalisé», témoigne-t-il. Les Chaâmbis ont quant à eux recensé sept maisons carbonisées et plusieurs personnes blessées dont le nombre n'est pas encore connu. Hier, au courant de l'après-midi, des sources locales faisaient savoir que des hostilités commençaient à avoir lieu entre Chaâmbis et policiers. «Les semeurs de trouble préfèrent agir la nuit, à la faveur de l'obscurité, et la journée, ils se reposent. La nuit du mardi à mercredi a été plutôt calme mais nous craignons que les violences ne reprennent entre la nuit de ce mercredi à jeudi», conclut Khoudir Babaz. M. M.
Khoudir Babaz, membre du comité de coordination et de suivi des mozabites (CCS) : «Bouteflika et Sellal doivent prendre leurs responsabilités» Le Soir d'Algérie : Pourquoi le retour des violences au premier jour de l'Aïd ? Khoudir Babaz : Il y a une troisième partie qui souffle sur le brasier de la fitna à Ghardaïa. Le problème n'est pas mozabite ou malékite, c'est-à-dire intercommunautaire. Il reste que les conditions sont propices pour semer la zizanie, le trouble et la psychose. Il faut aussi se demander comment plus de 12 000 gendarmes et policiers n'arrivent pas à sécuriser et maîtriser une aussi petite région que Ghardaïa. Nous avons mis en place plusieurs plans et stratégies sécuritaires avec les autorités concernées mais aucun n'a été réellement appliqué. Il doit bien y avoir des gens qui veulent laisser pourrir la situation. Qu'en est-il du plan «bien ficelé» de Belaïz ? Quelle meilleure réponse que les faits qui viennent de se produire. Ses représentants qu'il a dépêchés à Ghardaïa pour appliquer le fameux plan ont procédé d'une manière qui manque de professionnalisme. Ils ont été voir des gens qui ne sont pas représentatifs et qui n'ont aucune légitimité ou base populaire. Après, il faut dire que ce n'est pas la signature d'un bout de papier ou autres démarches protocolaires du genre, qui peuvent faire revenir la paix et la sécurité. Il faut une volonté politique et je suis certain que le problème sera résolu dans les 48h. Quelle sera votre prochaine démarche et quelles sont vos revendications ? Nous n'avons pour choix que de continuer à calmer les esprits et travailler pour la réconciliation. Nous sommes prêts à discuter et à travailler avec toutes les parties pour faire revenir la quiétude à Ghardaïa. Par contre, nous demandons au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, et le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, de prendre leurs responsabilités, car le problème dépasse les autorités locales. Nous appelons aussi les personnalités politiques, les associations et les ONG, qui pour certaines gardent le silence, de nous prêter main forte, car c'est l'Algérie qu'on veut détruire à travers Ghardaïa.