En situation de déficit de production avéré en 2014, l'Algérie devra importer davantage de céréales dont la facture explosera. Le pays accentue, ce faisant, sa dépendance alimentaire de l'étranger mais aussi des aléas climatiques. Chérif Bennaceur - Alger (Le Soir) Plus de seize millions de quintaux, c'est le déficit qu'accuse la production nationale de céréales durant la campagne 2013-2014. La production céréalière domestique s'est établie à 34 millions de quintaux, toutes céréales confondues, contre 49,1 millions de quintaux pour la saison précédente. Soit une baisse de 30%, indiquait jeudi le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Abdelwahab Nouri. Intervenant en marge d'une séance de questions orales au Conseil de la nation, le ministre du secteur confirmait ainsi une prévision formulée voilà deux mois. Une diminution de la production que le ministre du secteur justifie par les conditions climatiques caractérisées par un manque de pluviométrie. Une contrainte climatique qui perdure depuis des années, la production céréalière qui avait enregistré des rendements records lors de la campagne 2008-2009 avec 61,2 millions de quintaux, n'a pu maintenir le rythme les années suivantes. En effet, la production a chuté à 45 millions de quintaux lors de la campagne 2009-2010, à 42,45 millions de quintaux en 2010-2011, avant de remonter à 51,2 millions de quintaux en 2011-2012. Or, dans la mesure où la demande nationale est estimée à quelque 80 millions de quintaux (8 millions de tonnes) par an, et une demande toujours croissante, le recours à l'importation constituera encore l'alternative. Or, des quantités importantes de céréales ont été déjà importées durant le premier semestre 2014. Rien que pour le blé (tendre et dur), la facture d'importation était estimée à près de 1,20 milliard de dollars contre près de 1,18 milliard de dollars à la même période de 2013, soit une légère hausse de 1,46%. En volume, les importations de blé dur et tendre s'étaient établies à 3,655 millions de tonnes contre 3,173 millions de tonnes durant la même période de comparaison, en hausse de 15,16%. Quant au maïs, les importations se sont établies à 453,65 millions de dollars pour une quantité de plus de 1,782 million de tonnes, en hausse de 15,67% en valeur et de 37,72% en volume. Concernant l'orge, les importations s'établissaient déjà, durant les cinq premiers mois de 2014, à plus de 78 millions de dollars pour une quantité de plus de 296 000 tonnes, quoique en baisse de 15,31% en termes de valeur. Rappelons qu'en 2013, les importations des céréales ont totalisé 3,16 milliards de dollars, contre 3,18 milliards de dollars à la même période en 2012, reculant de 0,62%. En d'autres termes, tant la facture que les quantités de céréales importées ont crû durant les derniers mois et la tendance devrait se poursuivre durant le second semestre 2014, voire durant l'année prochaine. Des quantités de vingt à trente millions de quintaux risquent en effet d'être importées à court terme, en raison de ce déficit de production. Et donc une facture d'importation qui sera également conséquente. L'Algérie accentue ainsi et sa dépendance aux aléas climatiques et sa dépendance de l'étranger, notamment de la France qui fournit annuellement quelque 5 millions de tonnes et dont la qualité du blé a périclité la saison écoulée. Au-delà de la contrainte que pose le stress hydrique, c'est l'incapacité sectorielle à améliorer les rendements agricoles qui est à relever, malgré tous les efforts déployés et les diverses politiques impulsées durant les dernières années, portant notamment sur le soutien aux agriculteurs et la promotion de l'irrigation. Et ce, dans le contexte où l'on annonce que le secteur agricole devrait bénéficier de 300 milliards de dinars au moins dans le cadre du programme quinquennal 2015-2019. Rappelons qu'un des défis sectoriels porte sur l'augmentation du rendement à au moins 30 quintaux par hectare contre 18 quintaux par hectare en moyenne, à l'heure actuelle, avec une surface céréalière invariable (3,4 millions d'hectares). Or, c'est la capacité de l'Algérie à développer le foncier agricole, en élargissant l'offre, en valorisant les surfaces inexploitées, en protégeant mieux les terres agricoles de l'expansion urbanistique, industrielle et spéculative et en impulsant une stratégie de relance agricole davantage efficiente, qui sera déterminante. Et cela même si les pouvoirs publics cherchent à prendre les devants en interdisant toute utilisation du foncier agricole pour des motifs indus.