La nécessité d'une bonne gestion financière dans la lutte contre la corruption part du constat qu'une mauvaise gestion financière et une comptabilité inappropriée sont deux facteurs qui favorisent la corruption. Si la volonté politique ne fait pas défaut, l'un des moyens les plus efficaces pour lutter contre la corruption est la mise en place de pratiques de gestion financière saines. La chute drastique des prix du pétrole peut avoir un effet salvateur pour introduire une rationalisation des dépenses publiques et plus de transparence. Une bonne gestion financière (BGF) peut être définie comme une mobilisation et une utilisation efficientes des ressources financières, selon des objectifs fixés. Elle devrait permettre de révéler et d'identifier les responsabilités, lors de pratiques de corruption. Elle constitue de ce fait un moyen de prévention et de dissuasion. Les fonctions de la bonne gestion financière se rapportent essentiellement au financement, à la tutelle, à l'analyse et au bilan. Elles consistent à : analyser et mesurer les conséquences financières d'une décision de gestion avant et après sa mise en œuvre ; s'assurer que la trésorerie est suffisante pour financer les activités et opérations prévues ; sauvegarder les ressources par des contrôles financiers adéquats ; fournir un cadre financier pour la planification de futures activités et opérations ; gérer les systèmes de transactions qui fournissent des données permettant de mieux contrôler et planifier toutes actions et opérations ; rendre compte et faire le bilan en interprétant les résultats des activités et opérations en termes financiers. Pour pratiquement l'ensemble de ces mesures, l'Algérie a un retard sidéral. Dans notre pays, la gestion des affaires publiques donne lieu trop souvent à des abus de pouvoir qui se traduisent par une utilisation des ressources publiques à des fins privées. La bonne gestion financière est dans ce cas un instrument de contrôle de l'utilisation conforme des ressources publiques. Elle se consacre ainsi davantage au respect de la légalité et l'efficience, voire l'opportunité des dépenses. Elle fournit des informations aux décideurs impliqués dans la gestion du secteur public à tous les niveaux, du citoyen au législateur afin d'inciter à prendre des décisions plus pertinentes. L'incontournable indépendance des instances de contrôle Une place particulière doit également être réservée aux banques — privées ou publiques — du fait de leur rôle de financement de l'économie. Dans cette optique, la mise en place d'une réglementation bancaire permet à la fois de protéger les déposants et de lutter contre les crédits de complaisance à des acteurs privés. L'attribution de crédits de complaisance à des acteurs privés est également une des manifestations les plus dangereuses de la corruption, qui provoque une aggravation de la pauvreté à travers l'inflation et de faillites bancaires : de nombreux exemples dans ce sens ont marqué l'actualité algérienne de ces 15 dernières années. Une bonne gestion financière (BGF) constitue la pierre angulaire de toute stratégie de lutte contre la corruption. Il reste qu'elle nécessite la mise en œuvre d'un ensemble de techniques qui jettent le cadre référentiel d'un système intégré de gestion financière (SIGF). Toutefois, il est indispensable qu'une BGF soit complétée par des contrôles issus d'instances qui sont extérieures aux opérateurs qui agissent dans la sphère proprement financière. Ainsi, la Cour des comptes, les commissions parlementaires et les contrôles et audits externes sont autant d'intervenants indispensables pour exercer des contrôles sur la gestion financière. Le principe général d'indépendance de ces instances est une garantie de la crédibilité de leurs contrôles. La plus large publicité des résultats des audits et contrôles effectués, est un facteur puissant de transparence et joue un rôle pédagogique certain. Lorsque des audits externes sont commandités à des organismes spécialisés privés, un soin particulier doit être apporté à leur choix de manière à éviter les audits de complaisance ou de collusions. Ceci implique l'établissement de critères de sélection des intervenants transparents et vérifiables. Un complément indispensable des contrôles de BGF réside également dans la sanction (punition ou récompense) des responsables. L'impunité est en effet le plus sûr encouragement aux pratiques de mauvaise gestion, donc à l'inefficacité de toutes les mesures qui viseraient à mettre en place un SIGF, et finalement un encouragement à la corruption. Il est également indispensable de garantir la protection des agents qui refusent la pression des corrompus et qui sont susceptibles d'apporter des témoignages sérieux et documentés sur des faits de corruption avérés. La corruption et la fraude ne peuvent jamais être éliminées totalement, mais on peut contrecarrer leur évolution, et même diminuer leur ampleur, par l'utilisation de politiques et de pratiques de bonne gestion financière, accompagnées par des contrôles de gestion internes appropriés, en même temps que d'autres mesures dans les domaines de la poursuite criminelle et de la justice.