A défaut de pouvoir réguler le marché, les pouvoirs publics entreprennent d'installer des points de vente de la pomme de terre déstockée, pour parer à la spéculation qui a fait envoler les prix. Mehdi Mehenni - Alger (Le Soir) Sauf que cette solution de circonstance annoncée hier, sur les ondes de la Radio nationale par le responsable de la SGP-Proda, ne touche que certains quartiers de la capitale, à savoir Saïd-Hamdine, Sidi Yahia, Belouizdad et 1er-Mai. Comme si la cherté du produit ne concerne que ces quartiers, puisque ce même responsable explique que ces «Souk El Fellah» seront élargis vers d'autres agglomérations s'il y a demande des consommateurs. Le produit rare sera cédé dans des sacs conditionnés de deux et quatre kilogrammes au prix de 55 DA/kg. Mais, il se trouve que cette démarche intervient quelque peu en retard. Dans le sens où les spéculateurs ont déjà fait leur beurre en taxant le consommateur à raison de 90 DA le kilogramme pendant plus d'un mois. Des experts qui sont intervenus ce dimanche à l'occasion d'une rencontre-débat autour de l'organisation du Salon international de l'agriculture avaient, d'ailleurs, évoqué l'anomalie : «Les propriétaires des chambres froides ont profité de la dérégulation qu'il y a eue pour faire augmenter les prix. Le déstockage n'a pas été fait dans les temps, d'où la pénurie et la cherté du produit». Une situation qu'ils ont mis sur le compte du dérèglement du circuit de commercialisation et la désorganisation au niveau des marchés de gros. Le Dr Amine Bensemmane, organisateur de l'évènement, avait alors souligné un manque de suivi imputé aux autorités compétentes. Un manque de suivi qui reste justement injustifié, puisque la SGP-Proda est chargée d'assurer le pilotage du système de régulation du marché par rapport à certains produits agricoles depuis 2008, à travers le dispositif «Syrpalac». Sur le site du ministère de l'Agriculture et dans un communiqué datant de 2008, soit au lendemain du lancement de l'opération, on peut lire : «La politique de renouveau de l'économie agricole exprimée à travers les différents programmes de développement et d'intensification des productions agricoles ainsi que les dispositifs d'encadrement mis en place procède d'une démarche et d'un objectif de sécurité alimentaire. Dans ce contexte, la mise en place d'un Système de régulation des produits agricoles de large consommation ‘‘Syrpalac'' prend toute sa signification et s'insère de façon harmonieuse et cohérente dans cette politique de renouveau de l'économie agricole.» Un système dont les objectifs, lit-on encore, se résument dans : «La préservation des revenus des agriculteurs et une relative stabilité des prix à la consommation.» Six ans après le lancement de ce dispositif censé réguler le marché par rapport à certains produits agricoles, dont la pomme de terre, la SGP-Proda propose des points de vente au niveau de quatre quartiers de l'Algérois, pour lutter contre le prix de la pomme de terre cédée à 90 DA/kg. Aussi, faut-il rappeler qu'en 2007, et lorsque l'Algérie était confrontée au même problème, le ministre du Commerce avait initié un Office national interprofessionnel des légumes et des fruits (Onilef). Aujourd'hui, il est à se demander quel rôle joue réellement cet Office qui regroupe tous les acteurs de la filière, à savoir du producteur au transformateur, puisque en 2014, le secteur se retrouve à la case de départ ? Peut-être même à reculer, étant donné qu'on réinstaure des points de vente «conjoncturels», gérés par l'Etat, comme du temps des «Souk-El-Fellah». Comme quoi, les cas désespérés exigent des remèdes désespérés.