Des milliers de Yéménites attendaient désespérément hier l'arrivée de secours, alors que l'Arabie Saoudite n'a pas encore répondu à une demande russe de pause humanitaire dans les raids contre les rebelles chiites Houthis, soutenus par l'Iran. Téhéran a pour sa part demandé l'aide du sultanat d'Oman pour arrêter «immédiatement» les frappes aériennes de la coalition arabe dirigée par Riyad, ont rapporté hier les médias iraniens. Oman, qui a de bonnes relations avec l'Iran, est la seule monarchie du Golfe à ne pas participer à cette coalition. Sur le terrain, les Houthis et leurs alliés, des militaires fidèles à l'ex-président Ali Abdallah Saleh, ont réussi à progresser à Aden (sud), deuxième ville du Yémen. Ils se sont emparés hier du siège de l'administration provinciale et rapprochés d'un port, selon un responsable local. Ils ont bombardé des zones résidentielles, mettant le feu à plusieurs habitations et en endommageant d'autres, ce qui a poussé des dizaines de familles à fuir, ont indiqué des témoins en signalant des morts et des blessés. Les rebelles, qui cherchent à s'emparer d'Aden, avaient pris jeudi le palais présidentiel de la ville avant de s'en retirer vendredi à l'aube à la suite de raids aériens. Une coalition d'une dizaine de pays, menée par Riyad, a lancé le 26 mars des raids aériens au Yémen pour empêcher les Houthis de s'emparer d'Aden après avoir pris la capitale Sanaâ et des régions du nord et du centre. De nombreux pays, parmi lesquels la Russie, l'Inde, l'Indonésie et le Pakistan, ont évacué ces derniers jours leurs ressortissants, tandis que la Chine, Djibouti et le Soudan s'apprêtaient à en faire autant hier, selon le porte-parole saoudien de la coalition, le général Ahmed Assiri. Un navire de la marine française a évacué samedi 44 personnes de différentes nationalités, dont des Français, à partir du port de Balhaf, à 380 km à l'est d'Aden. Elles devaient être accueillies à Djibouti, selon le ministère français de la Défense. Sous la pression d'ONG, alarmées par la situation humanitaire, la coalition a annoncé samedi que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pourrait acheminer dès dimanche des secours au Yémen par deux avions. «L'opération humanitaire fait partie de notre travail», a insisté le général Assiri, sans toutefois accéder à une demande d'une pause de 24 heures dans les raids formulée par le CICR. «Nous ne voulons pas ravitailler les milices» ni que l'approvisionnement en aide interfère avec les opérations militaires, a ajouté le porte-parole. Des hameaux rasés à la frontière Mais l'Arabie Saoudite ne s'est pas encore prononcée de manière formelle sur une pause humanitaire, réclamée par la Russie, proche de l'Iran, dans un projet de résolution déposé samedi devant le Conseil de sécurité de l'ONU à New York. La présidente du Conseil, la Jordanienne Dina Kawar, a indiqué que les pays membres avaient besoin de «temps pour réfléchir». La Jordanie fait partie de la coalition arabe qui est intervenue au Yémen pour défendre le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, aujourd'hui réfugié à Riyad. L'Arabie Saoudite va démolir 96 hameaux inhabités à sa frontière sud pour empêcher leur éventuelle utilisation par des intrus du pays voisin, a rapporté hier le quotidien panarabe Al-Hayat. L'ONU et les ONG s'inquiètent du nombre très élevé de victimes civiles dans le conflit au Yémen, déclenché par une offensive des Houthis contre Sanaâ en septembre 2014. Le dernier bilan officiel donné par l'ONU remonte à jeudi avec 519 morts et 1.700 blessés en deux semaines. Alors que la coalition a poursuivi ses raids nocturnes dans le nord, notamment autour de Sanaâ et de Saâda, fief des Houthis, de violents affrontements se déroulaient hier à Loder, localité du sud, contrôlée par les rebelles. Ces combats à l'artillerie et à l'arme lourde, qui ont éclaté dans la nuit, ont fait 24 tués, dont 21 miliciens chiites, selon un partisan du président et une source médicale. Dans le sud-est, la situation s'est encore aggravée à Moukalla, ville de plus de 200 000 habitants prise vendredi par des combattants d'Al-Qaïda. Un accrochage a eu lieu hier entre des soldats et des hommes d'un collectif de tribus sunnites, entrés la veille dans ce chef-lieu de la province de Hadramout pour tenter de repousser les combattants d'Al-Qaïda, selon des sources tribales. Deux soldats et un combattant de tribu ont été tués dans l'affrontement à Moukalla, selon ces sources.