De notre envoyé spécial à Blida, Mehdi Mehenni L'ex-directeur de l'agence Khalifa Bank d'Oran a jeté, hier, un pavé dans la mare. Hakim Korse a témoigné au cours de la quinzième journée du procès Khalifa, que plusieurs responsables d'entreprises publiques procédaient à des placements en contre-partie de commissions. Il révèle aussi avoir encaissé des bons de caisse d'une valeur de 18 milliards de centimes au profit d'une «personnalité». Ayant purgé sa peine de dix ans fermes, l'ex-directeur de l'agence Khalifa Bank est passé, hier, à la barre du tribunal criminel près la cour de Blida, pour tout déballer. Le juge Antar Menouar n'a pas eu à fournir beaucoup d'efforts pour obtenir des aveux, puisque Hakim Korse s'est laissé aller lui-même à des révélations. Il a commencé, au titre de cette quinzième journée du procès Khalifa, à avouer que les responsables d'entreprises publiques qui procédaient à des placements bancaires chez-lui touchaient des commissions. En clair, un pourcentage récupéré sur la somme déposée. Le juge veut des noms d'entreprises, et le témoin livre à titre d'exemple l'OPGI de Relizane. Il parle aussi, cependant vaguement, de dépôts effectués par des clubs sportifs en contre-partie de commissions. Le juge l'interroge sur la responsabilité de Moumène Khalifa sur ces transactions illégales, mais Hakim Korse le disculpe et fait porter le chapeau au défunt Fawzi Baïchi, ex-directeur de la trésorerie de Khalifa Bank. Antar Menouar a tenté de faire le lien entre ces commissions et le trou financier de 4,2 milliards de centimes, établi à l'agence d'Oran, au lendemain de la faillite de la banque El-Khalifa, mais le témoin a préféré parler d'écritures bancaires restées suspendues. Là encore, et sur une question du juge, il blanchit Moumène Khalifa et fait porter la responsabilité au défunt Fawzi Baïchi. Idem pour le sponsoring douteux d'associations sportives, à l'exemple de l'affaire des 200 millions de centimes remis illégalement à l'association la Radieuse. Mais le juge lui rappelle que concernant cette affaire, il avait soutenu devant le juge d'instruction que l'ordre lui a été donné par Moumène Khalifa. Antar Menouar se permet même d'ironiser à l'adresse du témoin : «C'est parce qu'il était absent à l'époque... aujourd'hui, il est là !» Hakim Korse est pour le moins qu'on puisse dire confondu. Il reste silencieux. Aussi, et contrairement à ce qu'il avait déclaré en 2007, l'ex-directeur de l'agence d'Oran a affirmé avoir encaissé des bons de caisse d'une valeur de 17 milliards de centimes au profit d'une «personnalité». Le nom de cette personnalité n'a pas été révélé puisqu'il explique que les bons de caisse étaient anonymes. «Tout ce que je sais, c'est qu'ils appartenaient à une personnalité», a-t-il indiqué. Concernant les crédits bancaires qu'il avait obtenus auprès de Khalifa Bank, et qui se rapprochent des trois milliards de centimes, il dit en avoir remboursé une partie. Le juge lui rappelle qu'aucun document ne le prouve, le témoin n'en dira pas plus. Il ajoute, cependant, qu'il a pu obtenir ces prêts bancaires grâce aux bons rapports qu'il entretenait avec Moumène Khalifa. Mohamed Djellab témoigne aujourd'hui Par ailleurs, une partie de la zone d'ombre qui entoure le trou financier de la caisse principale de Chéraga sera probablement levée aujourd'hui, avec le témoignage de l'ex-ministre des Finances, Mohamed Djellab, qui passera à la barre du tribunal criminel près la cour de Blida en qualité d'ex-administrateur de Khalifa Bank. Cette seizième journée du procès Khalifa était tant attendue, en ce sens que les différents prévenus, détenus passés à la barre, n'ont pas apporté plus qu'il en a été déjà dit en 2007, laissant le mystère sur les 11 écritures bancaires à l'origine du scandale presque entier. D'autres témoignages non moins importants sont également attendus pour aujourd'hui. Il s'agit d'Abdelaziz Khalifa, le frère de Moumène, en qualité d'actionnaire à Khalifa Bank, ainsi que de Nadjia Aïouaz, la secrétaire particulière de l'ex-golden boy. Pour rappel, au début du procès, Moumène Khalifa avait nié devant le juge Antar Menouar que cette dernière ait pu être un jour sa secrétaire. Cependant, le témoignage de Nadjia Aïouaz reste capital pour Moumène Khalifa. La journée de demain, lundi, sera tout aussi particulière, avec le passage à la barre et toujours en qualité de témoin, du gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci. Un témoignage important, puisque depuis le début du procès, plusieurs ex-cadres de Khalifa Bank ont affirmé qu'ils n'ont jamais reçu une inspection de la Banque d'Algérie.