Le verdict est tombé hier en début de journée : Abdelmoumène Khalifa écope d'une peine de dix-huit ans de prison ferme, d'une amende de 1 million de dinars et la saisie de ses biens. La majorité des directeurs généraux des entreprises publiques et les commissaires aux comptes travaillant pour Khalifa Bank ont été innocentés. Sur les 71 accusés, 53 ont bénéficié d'un acquittement. Nawal Imés- Alger (Le Soir) - Fin du procès Khalifa hier avec l'énoncé du verdict. Le principal accusé, Abdelmoumène Khalifa, écope de la plus lourde peine pour association de malfaiteurs, vol qualifié et escroquerie. D'emblée, le juge avait averti l'assistance que Khakifa ne pouvait bénéficier des circonstances atténuantes prévues par les dispositions du code pénal. Les sentences ont été prononcées après la lecture d'une partie des 14 000 questions auxquelles le tribunal criminel a dû répondre. A l'énoncé du verdict, la salle était partagée entre soulagement et déception. Et pour cause, s'il y a eu condamnations, il y a eu également des acquittements. Les commissaires aux comptes, lourdement condamnés en 2007, ont été jugés innocents. Innocentés, également les directeurs des entreprises publiques poursuivis pour la plupart pour trafic d'influence. Les peines prononcées contre les autres accusés ont été toutes largement inférieures à celles requises par le parquet. C'est ainsi que Abdelhafid Chachoua, responsable de Khalifa protection et sécurité contre lequel le parquet avait requis une peine de 20 ans de réclusion, a été condamné à une peine de 6 ans. Rahal Omar, notaire accusé de falsification d'actes notariés, a été condamné à 5 ans de prison ferme. Le tribunal avait répondu par «non» aux questions relatives au faux et usage de faux concernant l'hypothèque des biens de Khalifa. Djamel Guelimi, le chef de cabinet, inspecteur général de Khalifa Airways à Paris et P-DG de la chaîne de télévision Khalifa News, a été quant à lui condamné à une peine de 10 ans fermes. Omar Mir, directeur de l'agence Khalifa Bank de Chéraga, contre lequel une peine de 15 ans de réclusion a été requise, a écopé de 8 ans de prison ferme. Ainsi, c'est au terme de 43 jours de procès et 8 jours de délibérations que le tribunal criminel près la cour de Blida a définitivement clos le dossier Khalifa. Un procès qui aura au final laissé l'opinion publique sur sa faim. La présence de Abdelmoumène Khalifa, condamné en 2007 à perpétuité par contumace, avait laissé entrevoir l'espoir d'un procès au terme duquel, le voile ou du moins une partie, soit levé sur l'ascension du groupe mais surtout sur les liens entre Khalifa et les cercles politiques. Son audience aura été finalement un non-événement : le principal accusé s'est contenté de se défendre de toutes les charges qui étaient retenues contre lui, refusant de jeter en pâture des personnalités dont les liens avec son groupe sont avérés. Plusieurs analystes avaient soupçonné l'existence d'un deal avec le pouvoir. L'énoncé du procès met un terme à toutes les spéculations mais ne ferme pas la porte à de nombreuses interrogations. N. I. Avis d'avocats Miloud Brahimi : «Le verdict prononcé par le tribunal criminel de Blida est raisonnable, à l'exception peut-être du principal mis en cause, Abdelmoumène Khalifa, dont la condamnation est un peu sévère. Pour les autres prévenus, le verdict est moins sévère par rapport aux peines prononcées en 2007. Avec les peines prononcées dans le procès de l'affaire Khalifa Bank et de l'autoroute Est-Ouest, je peux dire que la justice de mon pays est sur la bonne voie.» Khaled Bourayou : «Le verdict prononcé à l'encontre de Abdelmoumène Khalifa était relativement attendu au vu des charges retenues. Concernant les autres mis en cause, on peut dire que, globalement, les peines prononcées sont correctes. Le plus important est que les gens rentrent chez eux.» Kamel Maâchou : «Une décision de justice est différemment appréciée et ce, en fonction de la position qu'occupe chaque partie concernée par cette affaire. En tant qu'homme de loi, le seul commentaire que je puisse faire est qu'on ne peut rendre un jugement sur un jugement.» Chérif Chorfi : «C'est une décision qui semble avoir surpris plus d'un. L'opinion publique s'attendait à une décision à la limite du verdict prononcé lors du procès de l'affaire de l'autoroute Est-Ouest, sous prétexte qu'un deal a été conclu entre le principal mis en cause et le pouvoir. D'une manière générale, le verdict prononcé a couvert les peines prononcées en 2007. C'est une décision respectable.» Amine Sidhoum : «Je pense que par rapport à ce qu'il y a dans le dossier, le verdict prononcé contre Abdelmoumène Khalifa est très lourd. Pourquoi je dis cela, tout simplement parce que le dossier de l'affaire Khalifa n'a pas été traité sous tous ses angles. Il y a eu des points qui constituent de véritables zones d'ombre. Ceci d'une part, d'autre part, il y a les accords conclus entre l'Algérie et la Grande-Bretagne concernant l'extradition de Khalifa. Là, je me demande pourquoi on n'a jamais rendu public cet accord, d'où ma question de savoir si la détention administrative de M. Khalifa en Grande-Bretagne durant 8 années et demie sera incluse dans lesdits accords et si cette détention sera comptabilisée dans la condamnation prononcée par le tribunal criminel de Blida.»