Dix-neuf personnalités nationales dont d'anciens condamnés à mort par l'autorité coloniale, d'anciens ministres et des cadres de la nation de divers horizons politiques veulent s'entretenir avec le président de la République à l'effet de s'assurer qu'il est au courant de ce qui se passe dans le pays et qu'il est l'auteur des dernières décisions politiques et économiques qu'ils qualifient de graves, voire de «dangereuses». M. Kebci-Alger (Le Soir) - Dénominateur commun pour tout ce beau monde, les anciens maquisards Abdelkader Guerroudj, Mustapha Fettal, Zohra Drif-Bitat, ou encore Abdelhamid Aberkane, ou encore les anciens ministres Khalida Toumi, Fatiha Mentouri ou la secrétaire générale du PT, Louisa Hanoune, ont eu à connaître de près le président de la République et inversement pour avoir travaillé avec lui ou sous ses ordres. Un «profil» qui a pesé lourdement dans le «casting» de ces demandeurs d'audience motivée, écrivent-ils dans leur demande y afférente, par la «dégradation du climat général dans notre pays». Dont, soulignent-ils, sans être exhaustifs, «le renoncement à la souveraineté nationale par notamment l'abandon du droit de préemption de l'Etat, la déliquescence des institutions de l'Etat au moment où le niveau des menaces extérieures est si élevé, la substitution d'un fonctionnement parallèle, obscur, illégal et illégitime, au fonctionnement institutionnel légal ou encore la grave dégradation de la situation économique et sociale qui frappe la majorité du peuple algérien à laquelle sont apportées des réponses inquiétantes de la part des autorités du pays augurant de l'extrême précarisation des plus vulnérables tout en livrant le pays, ses richesses, ses capacités aux prédateurs et aux intérêts étrangers et l'abandon des cadres algériens livrés à l'arbitraire, aux sanctions partiales, en violation des lois et règlements de la République et des procédures légales dans un climat d'oppression». Un tableau «triste et alarmant» qui, affirment-ils à l'unisson à l'adresse du chef de l'Etat, «n'est pas conforme ni à votre qualité de moudjahid, ni à votre éthique, ni à vos convictions, ni à votre sens de l'Etat, ni à votre pratique de Président». D'où l'objectif assigné à la rencontre sollicitée en vue, selon eux, de faire partager avec le Président nos profondes inquiétudes quant à l'avenir du pays et de solliciter vos interventions sur l'extrême gravité de la situation». Et de crainte légitime que sa demande d'audience «ne parvienne jamais au Président par les canaux institutionnels officiels», lui qui l'a déposée à la présidence de la République, lundi dernier, le groupe des 19 a animé, hier vendredi, une conférence de presse, pour rendre publique sa démarche. L'occasion pour la secrétaire générale du PT, mandatée pour parler au nom des demandeurs de cette audience, d'expliquer la démarche et ses objectifs. «Il ne s'agit pas d'une initiative politique en concurrence avec les autres , ni «d'un programme politique», encore moins d'un «gouvernement parallèle» ou d'une «initiative putschiste» ou «d'une alternative politique». C'est une «démarche citoyenne collective dont ses auteurs issus d'horizons politiques divers sont seulement liés par leur patriotisme et leurs craintes par rapport aux derniers développements économiques, économiques et sociaux, très préoccupés à propos des graves conséquences graves sur notre cohésion nationale, la stabilité et la souveraineté nationales». Et de poursuivre : «Nous ne visons aucun poste ni privilèges. Nous ne visons les postes de quiconque. Nous nourrissons juste de légitimes craintes quant au devenir de notre pays», insistant sur la «légalité» de leur démarche. Ceci avant d'aller au fonds de la démarche qui objecte de s'assurer de l'auteur des dernières décisions étranges prises qui constituent, selon eux, un danger sur l'indépendance et la souveraineté du pays». «Nous voulons savoir s'il sait ou s'il ne sait pas», lâchera Louisa Hanoune pour qui il s'agira d'avoir le «cœur net» car, estimera-t-elle, «les derniers dérapages qui s'accélèrent à un rythme effrayant qui risque de mener le pays à l'irréparable nécessitent une intervention prompte du président de la République qui est responsable de la pérennité de l'Etat et de sa sécurité». Et si le chef de l'Etat était au courant de tout et est derrière ces dernières décisions ? «S'il est au courant, c'est une chose. S'il ne l'est pas, c'en est une autre», répliquera-t-elle, avouant que «les portes sont actuellement fermées», non sans soutenir «ne pas attendre des mois mais des jours» pour décider de la suite à donner à la démarche au cas où la présidence ne répond pas par l'affirmative à cette sollicitation. Ce dont doute Abdelkader Guerroudj, cet ancien condamné à mort par le pouvoir colonial, qui avoue «ne pas croire» à ce que le président de la République qu'il affirme bien connaître «ne nous reçoive pas». «Il a bien reçu et reçoit toujours des personnalités étrangères et il n'y a pas de raison à ce qu'il n'accorde pas le même privilège à des citoyens algériens», poursuivra-t-il en aparté. Pour sa part, l'ancienne ministre de la Culture, Khalida Toumi, s'interrogera sur la «paternité» de certaines des dernières décisions, comme, citera-t-elle en exemple, «le renoncement au droit de préemption de l'Etat», aux «antipodes, selon elle, des convictions du président de la République». Pour sa part, la moudjahida Zohra Drif-Bitat estimera que cette «démarche citoyenne collective» constitue une «énergie constructive, une détermination constructive assurant le lien avec l'esprit et la lettre du message de Novembre 1954», escomptant «transformer notre peur en une énergie positive et en une initiative constructive».