Après deux reports de suite, le procès de l'affaire Sonatrach 1 a débuté hier au niveau du tribunal criminel près la cour d'Alger. Un début de procès marqué par une véritable bataille de procédures engagées par les différentes parties concernées par cette affaire. Abder Bettache - Alger (Le Soir) - Tant attendu par l'opinion publique, le procès de l'affaire Sonatrach 1 a débuté hier dans une ambiance sereine, soit moins houleuse que les deux dernières audiences. Des avocats, des journalistes, ou de simples citoyens étaient nombreux à prendre place dans la grande salle d'audience du tribunal. Un procès qui a débuté officiellement à 10 h précises par l'appel à la barre des dix-neuf personnes mises en cause dans cette affaire. Il s'agit notamment de l'ancien P-dg du groupe Sonatrach, Meziane Mohamed, ainsi que 8 directeurs exécutifs du groupe dont Amar Zenasni, responsable du transport par pipeline et le directeur des activités «Amont» Belkacem Boumediène. Sur la liste des accusés figurent également quatre entreprises étrangères ayant bénéficié «illégalement» de marchés publics, au préjudice de Sonatrach, selon l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation. Les mis en cause dont sept sont en détention provisoire doivent répondre des chefs d'inculpation de «commandement d'une association de malfaiteurs, passation de marchés en violation de la législation et du règlement, octroi d'avantages injustifiés au profit d'autrui et augmentation des prix lors de la passation des marchés». Ils sont également poursuivis pour «corruption, dilapidation de deniers publics, abus de fonction et blanchiment d'argent». Cela dit, le fait marquant ayant caractérisé ce premier jour du procès reste incontestablement la bataille de procédures ayant opposé les avocats de la défense aux avocats représentant le Trésor public qui s'est constitué comme partie civile dans cette affaire. Trésor public ou Sonatrach ? Une approche que rejettent «globalement et dans le détail» les avocats des mis en cause. Ainsi, tour à tour les Mokrane Aït Larbi ou Mustapha Bouchachi et Miloud Brahimi ont exprimé leur opposition à la demande du Trésor public de se constituer partie civile estimant que ce dernier n'a pas été affecté par les pertes subies par le groupe Sonatrach. Ainsi, Me Mustapha Bouchachi a estimé que le Trésor public peut se constituer partie civile contre les établissements publics administratifs et non les entreprises privées commerciales et économiques comme c'est le cas pour Sonatrach. Une plaidoirie soutenue par l'autre avocat de la défense, en l'occurrence Me Mokrane Aït Larbi. Pour ce dernier, «le Trésor public n'a pas été affecté dans cette affaire car les infrastructures en question ont été réalisées par les fonds de Sonatrach et non par ceux du Trésor public». Une approche que défend implicitement l'avocat du groupe Sonatrach qui indique pour sa part «que jusqu'à preuve du contraire l'entreprise Sonatrach jouit de tous ses droits et jusqu'à preuve du contraire, c'est cette entreprise qui doit défendre ses intérêts par une tierce partie». Pour sa part, le représentant du ministère public a indiqué que «toute partie qui estime être affectée par les faits cités dans l'arrêt de renvoi, a le droit de se constituer partie civile et l'acceptation et le refus de cette demande relève du tribunal», ajoutant que la demande du Trésor public de se constituer partie civile «est acceptable vis-à-vis de la loi, cependant le tribunal est seul habilité à trancher». Vingt-cinq témoins absents L'autre point d'achoppement qui a marqué ce premier jour du procès est celui relatif à la présence des témoins. Ainsi, il est important de noter que sur les 114 témoins cités dans l'arrêt de renvoi, vingt-six d'entre eux ont été signalés absents, ce qui a poussé la défense à revendiquer leur présence «et ce au vu de l'importance de leur témoignage dans cette affaire». A ce titre, le président du tribunal criminel a ordonné après délibérations la présence des témoins jeudi prochain pour prendre connaissance du calendrier des audiences où ils doivent témoigner dans le cadre de l'affaire en question. Le juge a également ordonné le recours à la force publique pour amener 3 témoins absents, dont un ressortissant allemand, et ce, à la demande de Me Hocine Cheyat, avocat du P-dg du groupe Contel Algérie, Al Smaïl Djaâfar Mohamed Réda, principal accusé dans cette affaire qui est actuellement en détention préventive. Selon l'arrêt de renvoi, les faits portent sur 5 marchés frauduleux d'une valeur de 1 100 milliards de centimes accordés par l'ex-P-dg de Sonatrach, Mohamed Méziane, au groupe allemand Contel Algérie Funkwerk Pletarc dans le cadre d'un projet d'acquisition d'équipements de télésurveillance et de protection électronique des Complexes du groupe pétrolier à travers le pays. Ces contrats ont été accordés dans le cadre du gré à gré en contrepartie d'actions acquises au profit des deux fils du patron de Sonatrach Fawzi et Réda Méziane dans le groupe Contel, selon la même source. Le groupe Contel Algérie Funkwerk Pletarc et son patron Smaïl Djaâfar Mohamed Réda, principal accusé dans cette affaire, a obtenu des privilèges injustifiés alors que ses offres étaient plus élevées que celles des autres soumissionnaires, selon l'arrêt de renvoi de l'affaire. Les investigations ont également révélé que Mohamed Méziane avec la complicité du responsable des activités «Amont» Belkacem Boumediene aurait mis au point un plan pour subdiviser le projet de télésurveillance électronique de Sonatrach en 4 parties afin d'attribuer trois marchés au groupe allemand. Enfin, il est à noter que la lecture du volumineux arrêt de renvoi a débuté tard en fin d'après-midi de ce dimanche.