L'avant-projet de révision de la Constitution, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune n'a pas manqué d'en relever un certain contenu «hermaphrodite», d'en constater l'absence de réformes profondes. Cherif Bennaceur - Alger (Le Soir) - Ayant ouvert hier à El Achour, à Alger, les travaux d'une session ordinaire du comité central du PT, Louisa Hanoune considérera que le projet de révision, présenté récemment par le directeur de cabinet de la présidence de la République, comporte certes des aspects positifs, «des avancées», mais qui sont néanmoins «contrariées». Sans se prononcer sur toute la teneur du projet de texte fondamental, une des thématiques devant être abordées lors de cette session ordinaire qui s'étale sur deux jours, et tout en refusant d'anticiper sur l'avis que formulera le Conseil constitutionnel, la secrétaire générale du PT constate cependant que l'avant-projet ne traduit pas une réforme institutionnelle et politique «profonde» et ne consacre pas pleinement le retour au peuple, comme s'y engageait le président de la République en 2011. «Ce ne sont que des modifications peu profondes», dira Louisa Hanoune qui constate, de manière évidente, qu'il n'y a ni remise en cause du type de régime politique, ni séparation effective des pouvoirs et ni consécration réelle des droits des députés... Observant le projet de limitation du mandat présidentiel, a contrario de l'amendement opéré en 2008, et sous-tendu par le souci de «l'alternance», la secrétaire générale du PT relève qu'il aurait été davantage opportun de consacrer le principe de la révocabilité par le peuple de ses élus à tous les niveaux de responsabilité (élus aux Assemblées locales et nationales, président de la République...). Comme elle observera que l'indépendance réelle du système judiciaire n'est pas consacrée, au-delà des dispositions positives que prévoit l'avant-projet au profit des avocats, des magistrats et des justiciables. Tout en agréant semble-t-il l'institution d'une commission indépendante de surveillance des élections, la secrétaire générale du PT émettra le doute sur l'autonomie réelle des membres de cette instance dans la mesure où ils seront nommés par décrets. Mais c'est concernant la consécration de tamazight en tant que langue nationale et officielle que Louisa Hanoune formulera une appréciation mitigée. Observant que cette consécration constitue «une victoire» pour la Nation, la secrétaire générale relèvera néanmoins une contradiction, voire «une énormité». «Si la langue arabe a un statut de langue officielle de l'Etat, et tamazight, c'est la langue officielle de qui ? Du peuple ? Des voisins ?», s'interroge la secrétaire générale du PT. En ce sens, elle estimera que l'avant-projet de révision constitutionnelle aurait dû entériner, dans son article 178, le statut de tamazight en tant que constante nationale, à l'instar de la langue arabe. Mais ce que Louisa Hanoune qualifiera d'assez consternant, c'est le fait que l'avant-projet de révision constitutionnelle propose l'institution d'une académie de la langue amazighe vouée à unifier les dialectes des régions amazighes tout en éludant la problématique des dialectes arabes. «On ne s'en sortira pas, si on devait aborder la question des dialectes arabes», ironisera-t-elle. D'autres points, d'autres «aberrations» marquent selon elle le projet de révision constitutionnelle, et notamment sur la question de la transhumance politique, Louisa Hanoune concédant le principe de la déchéance et l'exclusion partisane des élus concernés tout en dénonçant le maintien du mandat de l'élu sans appartenance. «C'est bled Mickey», ironisera la secrétaire générale du PT concernant ces aberrations et d'autres, telles celles relatives carrément «à une police des mœurs» concernant les rapports interfamiliaux, mais aussi au regard de l'opinion externe notamment. «Où est l'Etat civil ?», s'interroge-t-elle, doutant de cette promesse tant galvaudée et observant que la pratique de la mise sur écoute se poursuit. Assurant que les conversations téléphoniques des dirigeants de son parti sont surveillées, Louisa Hanoune invitera les responsables de cette pratique à «nous écouter intelligemment». Ce faisant, la secrétaire générale estimera qu'au-delà du fond de la révision constitutionnelle projetée, la question de la forme prime également. Ainsi, Louisa Hanoune constate que la validation parlementaire du projet est agréée par le Conseil constitutionnel, cela constituerait tant un reniement des engagements pris en 2011 qu'une incongruité au regard de l'absence de légitimité de l'instance. Or, la dirigeante du PT prônera davantage l'adoption du projet par référendum, la souveraineté du peuple constituant le leitmotiv, le credo de sa formation politique. Et ce, dans le contexte de risques avérés de dérives économiques, sociales et politiques dans le pays, de fragilisation de l'immunité de la nation, de paupérisation latente en raison du «rouleau compresseur» que constituent les mesures de la loi de finances 2016.