L'Algérie ambitionne depuis quelques années de couvrir 70% de ses besoins en médicaments à partir de la production locale. Le ministère de la Santé s'est lancé un ultime délai : atteindre cet objectif avant fin 2017. L'Algérie couvre actuellement 43% et réalise une croissance annuelle de 17%. La production devra donc connaître une croissance allant entre 55 et 70% pour couvrir les 70% du marché. L'Algérie a-t-elle mis les moyens pour relever ce défi d'ici 2017 ? Salima Akkouche - Alger (Le Soir) - Avec ses 75 unités de production, l'Algérie couvre actuellement près de 43% de ses besoins en médicaments. Un marché estimé à 410 milliards de dinars. L'objectif est d'atteindre une couverture de 70% à partir de la production locale avant 2017. Pour ce faire, il faudrait une croissance allant de 55 à 70%. Un objectif qui nécessite d'autres nouveaux investissements. Pour renforcer la production actuelle dans l'industrie pharmaceutique, de nouvelles usines ont été lancées. Ainsi, près de 110 unités de production sont en cours de réalisation et certaines sont en cours de réception avec une capacité totale supérieure à la capacité actuelle. En valeur, explique Slim Belkessam, conseiller au ministère de la Santé, l'objectif d'atteindre la couverture de 70% de notre marché par la production locale sera atteint en 1 à 2 années et au rythme actuel de croissance. Par contre, dit-il, le ministère de la Santé œuvre à diversifier le portefeuille des laboratoires et à promouvoir l'investissement étranger et le partenariat à l'effet d'élargir la gamme des médicaments essentiels produits localement (anticancéreux, antidiabétiques entre autres) pour augmenter non seulement la couverture des besoins locaux mais aussi pour exporter, comme c'est déjà le cas avec de nombreux laboratoires algériens mais aussi des laboratoires étrangers tels que Sanofi (plus grande usine d'Afrique à Sidi Abdallah) et Novo Nordisk (antidiabètes oraux à Oued Aissi) dont une partie de la production sera destinée à l'exportation une fois le marché local satisfait. Selon lui, le segment pharmaceutique est un axe porteur pour le développement hors hydrocarbures car il bénéficie d'une croissance continue aidée par les mesures de promotion de la production locale, l'accès généralisé aux soins et la protection sociale de la majeure partie de la population. En 2016, deux des nouvelles unités dont l'usine de Sidi Abdallah et la création du premier cluster en biotechnologie devront être opérationnelles. Nabil Mellah, président de Merinal, estime que pour réaliser 55% de croissance, il faudrait avant tout lever tous les obstacles au développement de l'industrie pharmaceutique. «Si nous ne cessons pas d'entendre des effets d'annonce concernant notre environnement général et spécifique au pharmaceutique, sur le terrain, nous constatons avec regret que les améliorations tardent à venir. Pour ce qui est de Merinal, nos plans d'investissement sont toujours retardés par la problématique du foncier industriel. En effet, même si nous constatons une volonté d'avancer, il n'en demeure pas moins que la problématique des délais reste posée. La performance ne peut être appréciée que si elle est rapportée aux délais d'action», explique Mellah. Cet industriel se dit sceptique en raison, cite-t-il, de la problématique du cadre réglementaire dépassé du secteur, la problématique des délais d'enregistrement, qui est toujours posée, la problématique des prix de certains produits qui n'ont pas été réajustés depuis des décennies reste aussi posée, la problématique de la simultanéité de l'enregistrement et du remboursement pour les produits hors nomenclature, la problématique du remboursement de la TVA ainsi que la problématique de la bureaucratie chronophage. Le secteur pharmaceutique, explique-t-il, en raison des impératifs de sécurité sanitaire est un secteur nécessitant des stratégies à moyen et long terme, d'autant plus lorsque nous sommes confrontés à un environnement extrêmement chronophage. «C'est pourquoi il m'apparaît difficile d'obtenir une croissance de 55% en une année. De plus, d'un point de vue mathématique, si nous étudions le marché national, nous constatons que pour un certain volume de chiffre d'affaires du secteur, il n'existe pas encore de producteur, et donc il sera difficile de limiter ces importations. A titre d'exemple, je citerai l'insuline dans sa forme cartouches qui représente la quasi-totalité du marché de l'insuline, les produits de biotechnologie pour lesquels nous ne disposons toujours pas de réglementation, ainsi que d'autres classes thérapeutiques pour lesquelles les capacités opérationnelles aujourd'hui sont limitées voire inexistantes (céphalosporines, respiratoire, oncologie, ophtalmologie...)» souligne le DG de Merinal qui dit que si l'on se réfère aux chiffres de la douane de janvier 2016, la baisse des importations de produits pharmaceutiques en valeur n'a été que de 4,38%, ce qui est assez éloigné des chiffres annoncés. Pour encourager la production locale, le ministère de la Santé a décidé d'une nouvelle politique. Il s'est ainsi attaqué aux importations excessives et a décidé d'interdire à l'importation un peu plus de 350 médicaments fabriqués localement. L'objectif, faciliter l'environnement d'affaires dans ce domaine aux producteurs nationaux pour pouvoir développer leur production. L'industrie pharmaceutique enregistre une croissance de plus de 17% depuis les huit dernières années.