Une rencontre improbable réunit quatre personnes qui décident de coécrire un livre autour du comment envisager le vivre ensemble républicain français et son avenir entre Français de souche et Français issus de l'immigration algérienne ? Préfacé par Jean-Louis Debré et Jean-Pierre Chevènement, le livre intitulé Quatre nuances de France est paru il y a cinq mois en France aux éditions Salvator. Les auteurs sont à la recherche d'un éditeur en Algérie. Quatre hommes qui n'ont pas forcément le même point de vue politique, social, culturel : Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France à Alger. Il est actuellement inspecteur général du Quai d'Orsay. Rachid Arhab, journaliste, grand reporter, ancien membre du CSA. Nacer Safer, ancien sans papier. Et enfin Karim Bouhassoun, conseiller au cabinet de la présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté. Des personnes qui ont su chacun à sa manière exprimer ce même désir d'une fraternité fragile entre la France et l'Algérie, avec ce passé commun douloureux mais passionnément indissociable. Ce jeudi, seul Nacer Sfer n'a pas pu prendre part à la conférence débat qui a eu lieu à Oran à l'hôtel Royal. Prenant la parole Xavier Driencourt qui revendique la paternité de ce livre, ayant eu l'idée du projet en question, dira que cet ouvrage réunit quatre visions différentes de la société française, «à nous quatre, nous représentons un spectre extrêmement large de la société française, autre point commun dans le fond du tableau, l'Algérie car chacun a un regard sur ce pays. Nous avions même pensé appeler ce livre quatre nuances de France, quatre passions d'Algérie, mais pour certaines raisons, nous avons dû supprimer la deuxième partie du titre». L'originalité de cette approche c'est le parcours différent des quatre auteurs. «Rien en 2015 dans la société française ne nous prédisposait à nous rencontrer, à échanger», dira l'ancien ambassadeur en Algérie. Les thèmes que l'on retrouve dans le livre sont liés à l'immigration, à l'intégration, y figurent également des débats sur la complexité des banlieues en France. Le thème de la religion, de la laïcité, ainsi que plusieurs chapitres de l'Algérie où chacun en donne sa lecture. M. Xavier Driencourt se réjouit que malgré toutes les difficultés et problèmes que traverse la société française, «on a réussi à quatre à dialoguer et nous avons fait un travail politique. Débattu sereinement et ça en 2016, c'est quelque chose d'important». Pour Rachid Arhab,ce livre est une réflexion démocratique, «nous avons créé une démocratie à quatre. On s'est écouté, on n'a pas cherché à se convaincre, on n'a pas fait de débat, il ne s'agissait pas de se mettre d'accord, il s'agissait de juxtaposer nos façons de voir, un certain nombre de thématiques, un exercice intellectuellement enrichissant. Un livre de tolérance». L'ancien animateur du JT de France 2 dira qu'il lui a fallu très longtemps pour s'équilibrer entre les deux pays. «L'Algérie, c'est mon inné, la France, c'est mon acquis, et je me rends compte aujourd'hui à 60 ans que je me sens équilibré». Fier de sa double nationalité, Karim Bouhassoun dira qu'il n'est, certes, pas polygame mais qu'il a deux amours, la France et l'Algérie. «On a eu une merveilleuse chance d'avoir écrit ce livre parce que nous avons eu à aborder certains fragments des nuances d'Algérie qui sont possibles en France. Ces deux pays sont comme un couple de divorcé qui n'a jamais vraiment réussi à se séparer et qui désire élever ses enfants sous le même toit». Une question semble faire cogiter les auteurs de «Quatre nuances de France», celle de savoir s'il faut continuer indéfiniment à essayer de tout remettre en lumière ou faut-il à un moment essayer de dépasser ? Pour Rachid Arhab, arrivé à l'âge de 60 ans, il pense qu'il y a un certain nombre de choses qu'il faut accepter comme faisant partie de notre histoire. «L'histoire, moi j'essaye de l'écrire, je ne veux plus la subir, je pense que ma génération doit essayer de faire cet effort pour essayer d'avancer». Amel Bentolba Quatre nuances de France, Editions Salvator, France. 268 pages.