Le Premier ministre Abdelmalek Sellal veut marquer de son empreinte son passage à la tête du gouvernement et s'inscrit comme le «sauveur de la maison Algérie». Hier, lors de son intervention devant les participants aux travaux de la 19e tripartite, il a tiré sur ceux qui «ont abandonné le navire pour ne pas être comptables d'un naufrage qu'ils pensaient inéluctable» et rappelle que la situation économique est difficile, mais «l'Algérie résiste bien». Abder Bettache - Alger (Le Soir) - D'emblée, le Premier ministre dresse un constat de la situation économique du pays, en déclarant que «bientôt deux années que les cours mondiaux des hydrocarbures enregistrent une chute spectaculaire et brutale, occasionnant des contractions drastiques des revenus avec une perte de plus de la moitié de nos ressources financières». C'est dans cette optique qu'il monte au créneau, en dénonçant ceux qui «ont parié sur un vacillement rapide de l'Algérie», ou encore ceux qui «ont abandonné le navire». Il rappelle «sans démagogie que la situation est dure et les contraintes sont réelles avec des lendemains incertains, mais économiquement, l'Algérie résiste bien». Il passe à la vitesse supérieure et porte à l'attention des présents que «l'Algérie est parmi les rares producteurs de pétrole qui continuent de faire de la croissance et de créer des activités et de l'emploi». «Le nombre des investissements déclarés sur les trois dernières années représente 70% des créations d'activités depuis 2002 (24 386 projets lancés entre 2013 et 2016). L'emprunt national pour la croissance engagé le 17 avril 2016, évolue correctement. Ce sont des signaux forts de confiance des investisseurs en l'économie algérienne», a-t-il déclaré. Et pour appuyer d'avantage les efforts que déploie le gouvernement qu'il dirige, Abdelmalek Sellal ajoutera que «l'Algérie est en mouvement et toute sa société est appelée à œuvrer de toutes ses forces pour accélérer encore plus cette dynamique vertueuse parce que désormais, le temps nous est compté». L'ultra-libéralisme de Haddad En somme, à travers ce préambule, le Premier ministre trace le contour du nouveau modèle économique qu'il a exposé aux participants en début d'après-midi et à huis clos. Selon lui, «c'est ce modèle de croissance économique qui est soumis à l'examen de cette tripartite et qui déploie une approche claire et consensuelle jusqu'à 2019 avec des perspectives à l'horizon 2030». En somme, Abdelmalek Sellal que des observateurs donnent comme un potentiel candidat aux présidentielles de 2019 se lance d'ores et déjà dans cette optique. Pour Abdelmalek Sellal, «il nous faut donc aller chercher la croissance ailleurs, c'est-à-dire dans la sphère économique réelle là où l'entreprise, publique ou privée, est la clé de voûte» et d'ajouter, que «ce modèle de croissance intègre un cadrage budgétaire sur le court et moyen terme, réaménagé en fonction des éléments factuels de conjoncture tout en maintenant les objectifs de croissance et d'édification d'une économie émergente fixée par l'autorité politique». «L'objectif est d'aboutir, en bout de cycle, à des niveaux soutenables en matière d'équilibres des finances publiques», a-t-il expliqué. Saisissant cette opportunité, le président du Forum des chefs d'entreprises (FCE) qui s'est dit «disposé à accompagner le gouvernement dans la réalisation des objectifs», tout en réitérant avec force les principales revendications de son organisation. Selon lui, il est plus que jamais urgent «d'engager des transformations radicales de l'environnement des affaires». Sidi Saïd en arbitre ? Intervenant sur un ton d'ultra-libéral, Ali Haddad a évoqué trois importants points. Il s'agit, selon lui, «d'engager des réformes radicales du système bancaire», de «régler le problème du foncier industriel» et «d'assainir la question de la gouvernance». En somme, le président du FCE a proposé un véritable plan Marshall pour «l'émergence de notre économie». «Les facteurs nécessaires à cette émergence sont aujourd'hui réunis tant au plan de l'environnement infrastructurel qu'institutionnel, mais surtout que l'Algérie possède l'ADN d'une grande nation». L'autre intervenant de marque lors de cette 19e tripartite est le secrétaire général de l'UGTA Abdelmadjid Sidi-Saïd. Intervenant juste après le Premier ministre, Sidi-Saïd dira notamment que la «confiance installée au sein de la tripartite constitue un moteur pour insuffler la même dynamique à ceux qui sont chargés de créer la croissance (employeur, cadre, travailleur, élus syndicaux. (...) C'est cette approche que l'UGTA favorise pour asseoir définitivement l'entreprise en tant qu'acteur privilégié du développement économique et social». Le secrétaire général de l'UGTA, qui se trouve selon des indiscrétions dans une position de désaccord avec le gouvernement et le patronat au sujet du dossier de retraite, a joué l'arbitre en déclarant notamment que «pour l'UGTA, la relation amicale et citoyenne avec les organisations patronales obéit à notre volonté politique sincère de construire un édifice économique patriotique comme socle de la confrontation de l'émergence sociale des travailleurs et de leurs familles».