Dans son rapport de fin juillet 2016 sur l'économie algérienne, la Banque mondiale a annoncé que le déficit budgétaire de l'Algérie s'est creusé de 1,4% du PIB en 2013, à 15,7% du PIB en 2016. Younès Djama - Alger (Le Soir) - Le rapport rappelle que l'Algérie est «massivement» dépendante des hydrocarbures pour ses exportations et ses recettes publiques, à hauteur de 95% et de 75% respectivement, que sur une production totale d'environ 1,1 million de barils/jour, elle exporte 540 000 barils/jour, la production de pétrole brut et de gaz naturel ayant régulièrement diminué ces dernières années, en raison principalement des retards répétés des projets, des difficultés pour attirer des partenaires d'investissement, de l'insuffisance des infrastructures et des problèmes techniques. Ce rapport «pessimiste» ne doit pas être pris à la légère par le gouvernement, avertit Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités et expert international. Selon lui, l'Algérie sera appelée à vivre «le vrai choc financier et économique en 2018, avec des réserves de changes qui se situeront à 60 milliards de dollars». «Le dinar étant corrélé à plus de 70% aux réserves de change, il s'ensuit que la détérioration des termes de l'échange de l'Algérie a entraîné une dépréciation nominale de 20% du dinar depuis la mi-2014 et que l'inflation (incluant les produits subventionnés) a augmenté à 4,8% en 2015», analyse Mebtoul dans sa toute dernière analyse. Avec la diminution des réserves de change, la Banque d'Algérie sera «contrainte de continuer à dévaluer le dinar pour couvrir artificiellement le déficit budgétaire», prévient cet expert. S'adressant au gouvernement, Abderrahmane Mebtoul appelle à éviter les «fausses solutions». Il précise néanmoins que la situation actuelle est différente de la crise de 1986 avec le niveau relativement élevé des réserves officielles de change, bien qu'en baisse et le niveau historiquement bas de la dette extérieure peut permettre au pays de surmonter les «chocs» externes, sous réserve d'une réorientation urgente de toute la politique socio-économique actuelle. A en croire M. Mebtoul, l'Algérie qui recèle d'énormes potentialités, peut relever les nombreux défis et éviter d'aller au FMI à horizon 2019-2020, ce qui serait un drame à la fois économique et politique pour le pays. Revoir le modèle de croissance En visite à Alger en juillet dernier, Jean-François Dauphin, le chef de division du département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds monétaire international (FMI), a souligné que l'Algérie pourrait saisir la conjoncture actuelle, marquée par une chute des prix du pétrole, comme une «fenêtre d'opportunité» pour revoir son modèle de croissance et diversifier son économie. «Nous préconisons (à l'Algérie) de saisir cette conjoncture comme une fenêtre d'opportunité pour revoir le modèle de croissance, réduire la dépendance aux hydrocarbures, diversifier l'économie et faire du secteur privé, un mode plus durable de croissance et de richesse», a ajouté Jean-François Dauphin. Selon lui, un assainissement des finances publiques et des mesures structurelles pour libérer le potentiel de croissance du secteur privé, considéré comme un acteur important dans le processus de diversification de l'économie, sont les deux grands axes nécessaires pour faire face à cette conjoncture. Il a préconisé une rationalisation des dépenses afin de les ramener au niveau du budget disponible.