Youcef Merahi [email protected] Voilà, les jeux sont faits. La campagne électorale a refermé ses portes, jusqu'à 2019, pour la présidentielle. Et pour les prochaines législatives. Ce matin, j'ai pris sur moi de faire le tour de ma ville natale, au lendemain d'une campagne qui n'a pas tenu ses promesses. Et alors ? Alors, j'ai vu surtout des affiches placardées un peu partout, pas toujours aux endroits réglementaires. A côté des estaminets. Sur les pylônes électriques. Sur les murs des établissements scolaires. Le choix de la mairie n'a pas été toujours respecté. J'ai vu le fronton de la mouhafadha de Tizi constellé par des affiches, collées n'importe comment. Du reste, ces affiches ont subi des outrages, des graffitis et des dégradations, qu'il faudra certainement prendre en compte, plus tard. Il faudra, me semble-t-il, discipliner tout ça ; car la pollution touche même les murs. D'autant qu'il ne faut pas oublier que ces candidats sont de futurs parlementaires qui seront amenés à discuter, d'abord, d'écologie, axe mis au rebut par les services publics. Maintenant, il faut attendre que le temps fasse son travail de nettoyage ; l'alternance pluie/soleil estompera ces affiches, pour ensuite les faire disparaître ; sauf que la trace, elle, restera sur les murs un bout de temps ; à moins que la voirie municipale ne fasse le boulot. Il n'y a qu'à voir cette diarrhée d'affiches sur les murs de l'ancienne poste de Tizi ; ça relève de l'agression visuelle ! Comme enseignement, je retiens que les partis en lice, toute option politique confondue, ont un mot d'ordre commun : l'appel à la participation en masse. Pour les partis du pouvoir, une forte abstention signifierait un désaveu ; du reste, ils ont une peur bleue d'une telle éventualité. Il n'y a qu'à voir le FLN, le RND, le MPA convoquer un argumentaire, pas possible, pour convaincre le citoyen de se rendre, le 4 mai, aux urnes. Pour les partis de l'opposition, notamment le PT, s'abstenir ce jour-là conforterait la thèse du patron du FLN, selon laquelle son parti est l'Etat. Que sans lui, l'Algérie irait devant de graves problèmes. Oui, rien que ça ! Donc, pour la patronne du PT, il faut remplir les bureaux de vote, pour casser le monopole d'une alliance FLN/RND/partis islamistes (certainement), sans oublier naturellement l'UGTA, qui – sous couvert du suffrage universel – remet aux calendes algériennes l'alternance au pouvoir ; le chapelet des mandats présidentiels en est une preuve patente. Faut-il donc aller voter, le 4 mai prochain ? Pour les programmes à mettre en place, je n'ai personnellement rien entendu de concret. Pour le FLN et le RND, il n'y a qu'un seul programme : celui de notre Président. Eux s'en lavent les mains ! Le Président programme, eux défendent ce programme. Eux n'ont pas d'avis. Eux exécutent. Eux veulent la majorité au Parlement. Eux veulent le plus grand nombre de ministres. Eux veulent, tout simplement, le pouvoir. Pour le pouvoir. Comme culte de la personnalité, il faut revenir au rideau de fer et au temps illusoire du maoïsme. Autant dire que c'est la continuité dans la continuité. Comme hier. Comme aujourd'hui. Comme demain. Puis, j'ai comme la nette impression que nous sommes en train de faire un saut en arrière, vers les années quatre-vingt, juste avant le PAP du Président défunt, Chadli Bendjedid. Au temps épique des Aswaks. De la Sonacome. Des Ritmo. Des Zastava. Des Honda. De la banane «cofélisée». Des CAPCS. Pour s'acheter une bagnole, il faut s'inscrire, attendre près de quatre ans et un jour, peut-être, votre tour viendra. Puis, c'étaient les Honda pour la nomenklatura. Le reste, pour le peuple ! Et le souk d'El-Harrach faisait le plein chaque week-end ! Ah, au fait, que devient le crédit à la consommation ? Ce n'est pas le sujet, voyons. Oui, le sujet, c'est le vote du 4 mai prochain. Oui, ce vote aura lieu ; il n'y a pas de raison qu'il soit reporté ; tout a été mis en branle pour convaincre les Algériens d'aller faire leur devoir de citoyen. Deux partis ont appelé au boycott ; ils ont été voués aux gémonies ; au point où certains politiques ont parlé de rendre obligatoire le vote ; et d'autres ont parlé de djihad. Tout se mêle dans ma tête. Il a été même question d'atteinte à la citoyenneté, à la souveraineté du peuple et autres balivernes. Je crois qu'il a été question de cela. Je le crois bien ! Mais, enfin, si l'Algérien est un citoyen, il est indispensable de ne pas lui foutre la pétoche. De lui laisser son libre arbitre. De respecter sa décision de s'abstenir. De voter blanc. De boycotter, voire. La campagne électorale est faite pour convaincre, non pour lancer des anathèmes à l'encontre de ceux qui refusent cette continuité dans la continuité. Et quand j'entends des orientations, venues d'en haut (selon la formule algéro-algérienne), demandant aux walis la neutralité de l'administration, je me mets à douter fortement. C'est l'évidence même. C'est enfoncer des portes ouvertes ; c'est susciter le malaise ; c'est accréditer l'hypothèse que l'administration risque de ne pas être impartiale. Je ne sais pas ce que je ferai le 4 mai prochain. Voter ? Je ne sais pas. Y croire ? Je n'y crois pas, vraiment. J'ai peur d'un remake des élections passées. Une alliance s'est d'ores et déjà esquissée, avec comme tête de lance, bien sûr, le FLN. Je n'ai pas été convaincu par les uns et les autres, durant cette campagne ; j'ai la faiblesse de l'avouer. Y a-t-il eu réellement campagne ? Ou est-ce un immense soliloque ? Personne ne me dit ce que seront les années de cette mandature. Si c'est juste pour être député, je n'en veux pas. Stop et fin !