Renforcement du système antiterroriste africain : le Conseil de sécurité consacre le président de la République en sa qualité de Champion de l'UA    Muay thaï/Ligue One Championship: Victoire de l'Algérien Nabil Anane    Alger: Effondrement d'un ancien immeuble dans la commune de la Casbah sans aucune perte à déplorer    Hypertension artérielle: le contrôle régulier préventif recommandé    Oran: la pièce de théâtre "La Résilience" évoque des étapes de la Glorieuse guerre de libération    Enfants palestiniens de Ghaza: "une génération toute entière traumatisée"    Naâma: la dépouille du Moudjahid Radjaa Madjdoub inhumée    Algiers Slush'D: 3 startups algériennes récompensées pour leur innovation en E-santé    Sports mécaniques: une cinquantaine de participants au rallye touristique national à El Meniaa    Foot scolaire: qualification de la sélection algérienne masculine au championnat d'Afrique    Réunion sur la coopération entre la LA et le CS de l'ONU: l'initiative de l'Algérie saluée    Start-up: Lancement d'un appel d'offres national au profit des incubateurs d'entreprises en Algérie    Cisjordanie occupée: l'ONU dénonce l'usage "de méthodes de guerre" par l'entité sioniste    Exposition d'oeuvres de plasticiens algériens à Alger sur la Chine    Energie et Mines : Arkab examine avec l'ambassadeur d'Afrique du sud les moyens de renforcer la coopération bilatérale    M. Ballalou préside l'ouverture d'une journée d'étude algéro-italienne sur la valorisation du patrimoine culturel    APN: la commission de l'éducation écoute les préoccupations de représentants d'associations de parents d'élèves    CNDH : l'Algérie a placé le secteur de l'éducation en tête de ses priorités    Mise en service d'un tronçon de 14 km de la pénétrante autoroutière Djen Djen-El Eulma    Le Président Tebboune salue l'opération de libération du ressortissant espagnol    Quatre candidats en lice pour la présidence de la FASS    JSK : L'Allemand Josef Zinnbauer, nouvel entraîneur    La JSK sauve sa place de leader face au CRB    Le président de la République reçoit le Commandant d'Africom    Le nouvel appareil de jardinage d'intérieur de LG dévoile un désigne raffiné    Appel à une paix durable dans la région    Deux personnes échappent de justesse à la mort    Le wali gèle les activités de l'APC de Béni-Dergoune    Préparation de la saison estivale : le littoral dans le collimateur du wali    Le rôle du Président Tebboune salué    S'agit-il d'un véritable cessez-le-feu ou d'une escroquerie ?    Lancement d'un concours pour le recrutement de 476 employés    Une délégation parlementaire inspecte des sites à Timimoun    Plus de 25 heures de témoignages vivants collectées à Tlemcen    ''Le Pays de Peter Pan'' de J.M. Barrie et ''La Terre du Milieu'' de J.R.R. Tolkien    Le président Tebboune salue l'opération de libération du ressortissant espagnol        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



ICI MIEUX QUE L�-BAS
L��tranger Par Arezki Metref [email protected]
Publié dans Le Soir d'Algérie le 17 - 07 - 2005

La plage du Rouet, � Carry-Le Rouet, est en demi-lune. La crique est balafr�e par une jet�e qui cl�t un port minuscule o� des bateaux de plaisance ondulent sous le mistral. Un sexag�naire � la t�te de Piccoli et au bedon d'assidu de l'ap�ro entre dans l'eau glac�e en s'auto-stimulant : �Il ne manque que le pastis, tin !� (Imaginez l'accent marseillais). J'�carquille les yeux. La finesse m'�chappe, il s'en aper�oit. �On a d�j� le gla�on !�, dit-il dans un rire grand comme cette mer qui a tant de rives, parfois, � souvent � hostiles les unes aux autres, qu'elle fait � elle seule un monde qui vaut tous les mondes.
�Sur l'immense pass� de la M�diterran�e, le plus beau t�moignage est celui de la mer elle-m�me�, �crivait Fernand Braudel. Parle, mer, dis ! Dis ta m�moire �plus vieille que la plus vieille des histoires humaines qu'elle aura port�es� ! La colline tombe � pic dans la mer, h�riss�e de pins maritimes, en une falaise coup�e � la serpe. Bond�e, la plage reste paisible, ferm�e dans la perfection d'une anse qui ne laisse rien voir sur les flancs. Tout ce que tu peux voir d'ici, c'est la ligne de fuite de l'horizon. Tu devines, � la couleur qui mue, le partage des eaux. Par le miracle de l'imagination, tu gommes les constructions et la petite plage plonge alors dans les limbes de la m�moire pour rappeler ces criques d�sertes dans lesquelles Ulysse accostait dans les p�plums de l'enfance. Au cin�ma l'Eldorado, au bord de l'oued El-Harrach, la mer en technicolor, un bleu pastel, faisait oublier l'eau �paisse des excr�ments de toute la Mitidja que la rivi�re pestilentielle s'appr�te � balancer par-dessus bord. Ah ! Ulysse ! Celui-l� ! Il n'en finit pas de parcourir les mers et lorsque, frapp� par la limite d'�ge, condamn� par la p�remption, il se met sur cale, il reste, pour le sillage, autant d'Ulysses qu'il y a de gouttes d'eau dans l'oc�an. Un voyage qui ne finit jamais ! Un vertige ! Le Rouet, encore. Le vent murmure dans les m�ts des embarcations pench�es vers l'onde le chant d'Hom�re. Les p�r�grinations d'Ulysse s'�gr�nent �tape apr�s �tape et c'est la m�me rapsodie qui fulmine au ras du sable br�lant : la m�lancolie de la condition d'�tranger. Ulysse, l'�tranger ! Le Rouet, toujours. Un peu plus tard, alors que le soleil est vertical, qu'il tape dur sur la calotte cr�nienne � faillir bouillir la cervelle dans sa marmite, j'entends ces bribes de dialogue d'un Pagnol qui roulerait au m�lange, comme cette mobylette � laquelle les beurs des ann�es 1980 comparaient la France : �On devait aller se faire un sandwich � la Plaine mais on y a renonc�. Le mec avec qui je suis ne mange que hallal�, dit une jeune Asiatique � sa voisine, une jeune femme aux cheveux blonds cendr�s. Le Piccoli de circonstance sort de l'eau, congel�. Il s'�broue au soleil puis �tend une serviette � m�me le bitume. Je me dis, comme �a : c'est la faute au soleil, � ce sacr� soleil ! Quand il te tanne le cuir chevelu, tu ne sais plus o� donner de la t�te. C'est d'ailleurs ce qui s'est pass� pour Meursault, le personnage paum� de l'Etranger de Camus. Puisqu'on y est, je verrais bien le Rouet comme cette plage ferm�e sur laquelle, � cause du soleil, Meursault tire sur l'Arabe, �et c'�tait comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur�. M�moire de la mer. Cette plage ressemble tant � celles de chez nous, de l'autre c�t� de ce �trait archa�que de la g�ologie du globe� (Braudel, encore) qu'est la M�diterran�e, que des souvenirs se mettent � glisser un peu comme des �les. Camping au Chenoua, aux temps de l'espoir. La tente plant�e entre les arbres et la discutaille autour du feu, avec les menus bruits de la mer fermant les fen�tres pour rentrer chez elle pour la nuit. Autre s�quence : L�o Ferr� chantant, sur la sc�ne du th��tre de plein air de Sidi Fredj La m�moire et la mer. Pendant que les vagues s'�crasaient avec une fureur harmonique contre le mur dans son dos, il crie: �Rappelle-toi ce chien de mer que nous lib�rions sur parole/ Qui gueule dans le d�sert des go�mons de n�cropole�. Ivresse de la baignade � A�n-Taya, � Surcouf, � Decca-Plage. Plongeons � la plage du Lido. Brass�es initiatiques � la Verte-Rive. Emois adolescents au rythme du ressac � la crique d'Alger-Plage en �coutant Marie Jolie des Aphrodite's Child. Plus loin dans le temps, ce spectacle vesp�ral des chalutiers s'en allant du petit port de Cherchell avec, en guise du bruissement des vagues, le fatalisme de Bahr Ettoufane d'El Badji. Plus t�t, bien plus t�t, lorsque la t�l� commen�ait � peine � entrer dans nos chaumi�res, cet hymne � la mer, en interlude, d'Abderrahmane Aziz : El Bahr ! Et toujours, comme un trait permanent, ces fugues � Douaouda-Marine, ces pas sur la gr�ve et ces mains tendues vers le soleil comme vers une nouvelle divinit� de l'amour. L'ennui, c'est que le temps passe. L'ennui aussi, c'est de n'avoir pas assez de place dans ta m�moire pour 1200 km de c�te, sans compter les millions de kilom�tres de toutes les autres c�tes qui sont aussi les tiennes, et des mill�naires d'histoire. Le Rouet, suite et fin. La plage entame sa sieste digestive. Direction : Avignon. Ce n'est pas au bord de la mer, mais c'est tout comme. Cela fait 59 ans que le festival de th��tre tient bon. Au seul volet off, il y a quelque chose comme 700 pi�ces. Le vertige, l� encore. Mais dans ce maquis de la trag�die, le but est pr�cis. Au th��tre des �Corps saints�, Marc Gooris, un com�dien belge de la compagnie de la Grande Ourse, est seul sur sc�ne. Le d�cor est �l�mentaire : une table, une chaise, un lit et un seau d'eau. Dans la salle, le public retient son souffle. Il fait une chaleur d'�tuve l�-dedans. Le com�dien se l�ve et entonne le c�l�bre : �Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-�tre hier, je ne sais pas.� C'est la premi�re phrase de l'Etranger d'Albert Camus. Pendant une heure et demie, avec la force du d�sespoir, il raconte l'histoire absurde de Meursault, cet homme sur lequel tout glisse, qui plane � une telle hauteur d'insensibilit� qu'il n'est plus dans la communaut� des hommes. Il est � la hauteur des anges. Du bien, du mal ? �a d�pend o� tu es. Et voil�, justement, la sc�ne de la plage au cours de laquelle Meursault tue sans raison et sans mobile celui que Marc Gooris n'appelle pas l'Arabe. La chaleur dans la salle est la r�plique de l'air enflamm� de �toute cette plage vibrante de soleil (qui) se pressait derri�re moi�. La chaleur et le jet de mots froids : c'est la douche �cossaise. Tu sors de l� comme du bain � la plage du Rouet : tu grelottes de froid dans le soleil caniculaire. C'est qu'il y a comme un hiatus avec ta propre peau. C'est �a qui fait l'�tranger, c'est la peau. Quand elle devient un pays o� tu te sens mal, tu es alors �tranger partout.

Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.