Il y a trois jours, Ariel Sharon a �t� victime d�une attaque c�r�brale. Le monde entier a, dans les heures qui ont suivi sa br�ve perte de connaissance, �t� inform� dans le menu d�tail de la nature et de la prise en charge de son malaise, des conditions dans lesquelles il s�est produit, du traitement qui lui a �t� administr� et du lieu o� il se trouvait. On a, surtout et sans complexe aucun, imm�diatement �voqu� ses capacit�s � pr�sider aux affaires isra�liennes et de l��ventualit� d�un int�rim au cas o� les choses n�iraient plus tr�s bien pour lui. Depuis, les bulletins m�dicaux se sont succ�d� tenant ses partisans mais aussi ses opposants au courant de son �tat et de la gestion de l�insignifiante vacance que traversait le pays. Ne parlons pas de Sharon lui-m�me qui, d�s le lendemain, d�clarait qu�il continuerait � gouverner et n�avait pas l�intention de d�missionner. Voil� qui a l�avantage d��tre clair ! Autant dire qu�un comportement similaire aurait �t� plus que bienvenu chez nous. Mais cela rel�ve encore d�un autre mode de gouvernance, voire d�une autre mentalit� ! A d�faut de s�en prendre aux responsables alg�riens qui ont �t� au-dessous de tout en mati�re de communication, on s�est empress�, � en friser le ridicule, de pointer un doigt accusateur en direction des m�dias �trangers qui auraient, pour ne pas changer, quelques comptes � r�gler avec l�Alg�rie. Ne pas avoir le courage de regarder en face les d�faillances de son propre syst�me est une sp�cialit� alg�rienne qui rel�ve du r�flexe conditionn�. Au moindre �v�nement, une fi�vre injustifi�e et donc pas tr�s cr�dible s�empare entre autres de gens du m�tier, plus prompts � orienter leurs frustrations de professionnels mal inform�s vers l�ext�rieur, d�pla�ant, syst�matiquement, vers les autres les maladresses de leurs propres dirigeants. Au moindre fr�missement du syst�me, une incompr�hensible parano�a s�empare des inconditionnels de l�autorit�. Faudrait-il y voir l� un souci de ne pas s��carter du cocon institutionnel ? Pour damer le pion aux �esprits malveillants�, c�est, d�abord, � cheb Mami qu�aura �t� confi�e la mission de rompre le silence assourdissant. Le pr�sident est �en pleine forme�, nous a-t-il ainsi appris. C�est dire le m�pris dans lequel sont tenus et la presse et les hauts responsables, gard�s � distance par un pr�sident plus que m�fiant � l��gard de tout ce qui gravite autour du pouvoir dans un pays o� les dirigeants sont suspect�s de comploter de jour comme de nuit . Faudrait-il croire qu�en haut lieu, on aurait �t� occup� � lui envisager une succession au point d�en n�gliger de publier un bulletin de sant� ? En �tait-on, r�ellement, comme cela se disait dans les rues d�Alger, � discuter d�un �ventuel rempla�ant ? L�information vraie ou fausse n�en �tait pas moins une qui venait, � point nomm�, occuper l�espace local laiss� � volontairement ou non � sans nouvelles du premier magistrat du pays. Et puis, en quoi est-il ind�cent de chercher � en savoir un peu plus sur ce que l�on s�ing�nie � cacher ? Les sp�culations, quoi que l�on en pense, dans le proche entourage de Bouteflika ou encore dans les milieux pr�ts � avaler n�importe quelle couleuvre, n�en sont pas moins le reflet fid�le des humeurs instables du syst�me en place. Les citoyens, pour leur part, ont carr�ment �t� �pat�s par un cheb Mami osant secouer la lourde administration du Val-de- Gr�ce dont il aurait forc� les portes pour s�assurer en personne de la bonne sant� de son ami. Pour l�opinion publique, les nouvelles rapport�es par Mami venaient de supplanter celles du professeur Zitouni dont tout le monde avait attendu en vain les bulletins de sant� sans que ceuxl� n�aient forc�ment � ressembler � �une revue scientifique�. Aujourd�hui, ce dernier se fait fort de dissiper le malaise, affirmant qu�il n'y avait plus d�inqui�tude � avoir puisque que le pr�sident, �qui a �t� tr�s bien pris en charge�, �tait totalement gu�ri �gr�ce � l'intervention chirurgicale qui a �t�, en r�alit�, assez b�nigne puisqu�elle n'a pas dur� plus d'une heure�. Que le ciel soit donc lou� ! Et pourtant ! �Voyeurs� que nous sommes, nous aurions envie de demander au d�sormais c�l�bre m�decin qui affirme que �le geste lui-m�me a simplement consist� � arr�ter l'h�morragie et que rien d'autre n'a �t� fait�, pourquoi dans ce cas le geste en question n�a-t-il pas �t� pratiqu� ici par nos propres sp�cialistes, histoire de ne pas faire courir davantage de risques au chef de l�Etat ? En quoi les explications d�une sommit� comme le professeur Bernard Debr�, affirmant que �le traitement d�un ulc�re ne justifiait pas un s�jour aussi prolong� � l�h�pital�, devraient-elles pr�ter � caution quand c�est dans l�urgence que l�on a transf�r� le chef de l�Etat et qu�aucun responsable n�a jug� important de prendre en charge cette information transparente � laquelle faisait r�f�rence, il y a quelque jours, le pr�sident ? Si Bouteflika affirme n�avoir rien � cacher, qu�il nous permette donc de douter des intentions de son entourage �imm�diat�. Soit, admettons que l�on ne mette pas en doute la bonne foi de tout ce beau monde. Mais alors, puisque, comme l�affirmait quelque peu agac�, le Pr Zitouni, tout le reste ne r�pondrait qu�� �des sp�culations qui n'ont ni base scientifique ni �thique�, insistant sur le fait que le pr�sident de la R�publique serait tout � fait remis de son affection, pourquoi celui-ci aurait-il en m�me temps besoin d�un �repos strict et rigoureux� � consommer � l��tranger ? Le �nous n�avons rien � cacher. Nous avons tout dit en totale clart� et en toute transparence� et le �on ne peut �tre responsable d�un peuple et d�une nation et vouloir cacher des choses��, confi�s par l�homme fortement �prouv� que nous avons vu appara�tre � la t�l�vision d�Etat, n�arr�teront pas, pour autant, les sp�culations qui, m�me plus discr�tes, continueront d�aller bon train sur, par exemple, les dispositions de Bouteflika � reprendre en main la gestion du pays et pour combien de temps encore ? Son homme de confiance Abdelaziz Belkhadem s��tait empress�, il y a quelques jours, d�annoncer, � propos de celui-ci, qu�il continuait �� g�rer les affaires de l�Etat�, et on �tait presque pr�ts � le croire surtout apr�s les d�clarations, de Mami, affirmant qu�il allait �vraiment tr�s bien�. Pourtant, ces propos prennent tout de suite un sens des plus fantaisistes d�s lors que le Pr Zitouni affirme qu��un repos tr�s strict et rigoureux a �t� prescrit au pr�sident avant la reprise de ses activit�s nationales et internationales�. Un professeur en m�decine qui, par ailleurs et malgr� les tr�s bons pronostics avanc�s par lui, ne nous dit pas quand le pr�sident va pouvoir se remettre au travail. A moins que Bouteflika ne soit en mesure, m�me en faisant peu, pour donner le change, d�en faire quand m�me, ce qui semble fort peu probable au vu du physique �puis� qui nous est apparu � l��cran. Conclusion : des informations qui se t�lescopent ne sont pas faites pour mettre fin aux multiples interrogations. Que le pr�sident rentre au pays pour signer la loi de finances, avant de s�en retourner terminer ailleurs sa convalescence, n�emp�chera pas, bien au contraire, les Alg�riens en premier lieu de sp�culer sur la dur�e de celle-ci � moins que ce dernier n�envisage de recouvrer ses forces en Alg�rie et pourquoi 0pas ? Mais cela, nous n�aurons pas beaucoup � patienter pour le savoir. La confiance, comme on le constate, r�gne effectivement puisque personne ne semble vouloir parler de la destination de repos du pr�sident. A moins que nul ne le sache � quelques exceptions pr�s comme l��quipe de m�decins qui veille sur sa sant� et sera la seule habilit�e � d�cider de la fin du repos �strict et rigoureux� prescrit par elle. Une �quipe dont ne ferait pas partie le Pr Zitouni auquel, n�anmoins, �choit le r�le d�interlocuteur officiel autoris� � r�pondre, dans les termes scientifiques qu�il ma�trise, aux questions relatives � la �convalescence demand�e par l��quipe m�dicale�. Un porte-parole qui met volontiers sa fiert� en sourdine quand il parle d�intervention qui a eu lieu �assez rapidement, en moins d�une heure et demie� parce que �banale�. Ainsi, tout aura �t� dit avec �pr�cision, clart� et transparence� par un pr�sident que l�on dit �m�dicalement totalement remis�. Tous ceux qui tenteraient d�explorer des domaines autres ou d�exploiter des points de vue qui s��carteraient de l�officiel ne seraient que sp�culateurs �sans bases scientifiques�, selon M. Zitouni ,lequel, loin de d�mentir quoi que ce soit, aurait d� se douter qu�il ne nous apprenait rien que nous ne sachions d�j�. L�exc�s de discr�tion �tant plus que nuisible quand il s�agit de la gestion d�un pays et de l��tat de sant� de ses dirigeants, autant pr�voir d�autres �pisodes � commenter. Maintenant que la rumeur sur la nature de son hospitalisation semble contenue, celles sur la dur�e de sa convalescence et son s�jour � l��tranger vont immanquablement prendre le relais. Pourquoi ne pas attendre plut�t que Bouteflika reprenne ses discours pour t�ter le pouls de la R�publique ? Pour l�instant, il est convalescent et donc pas totalement gu�ri.