�Des augmentations de salaires et de r�gimes indemnitaires sont intervenues, particuli�rement dans le secteur public, la derni�re hausse du SNMG ayant eu lieu en janvier 2004. Ces augmentations ont alourdi les charges de l'Etat, et des entreprises publiques dont certaines ont, dans le m�me temps, �t� contraintes de proc�der � des compressions d'effectifs. Il faut reconna�tre que nombre d'entreprises publiques ont consomm� de la croissance plus qu'elles n'y ont contribu�.� L'assistance retient son souffle. Silence religieux dans la salle Un silence religieux y r�gne. Tout le monde est suspendu aux l�vres du pr�sident de la R�publique. La suite qui sera donn�e � cette importante d�claration est d�cisive. Le secr�taire g�n�ral de l'UGTA, qui se trouve � la tribune officielle � quelques m�tres de l'intervenant, a les yeux braqu�s sur le pr�sident de la R�publique. Ce dernier marque un temps d'arr�t et l�che : �Il faut bien se convaincre qu'une augmentation g�n�rale des salaires, sans contrepartie d'une am�lioration du niveau r�el de productivit�, menacerait la stabilit� macro�conomique r�tablie au prix de longues ann�es d'efforts et de souffrances ainsi que la viabilit� de nombreuses entreprises, avec tous les effets que l'on peut imaginer sur le niveau de l'emploi.� Malaise chez les repr�sentants des travailleurs. La question est tranch�e. Abdelaziz Bouteflika n'annoncera point d'augmentation de salaires, encore moins de soutien � travers son discours la revendication tant exprim�e par le monde du travail. C'est une v�ritable douche �cossaise que viennent de subir les syndicalistes de l'UGTA. Ces derniers, tr�s nombreux, ont �t� invit�s � �couter le discours du pr�sident de la R�publique � l'occasion de la c�l�bration du 50e anniversaire de la cr�ation de la Centrale syndicale. La c�r�monie a eu lieu jeudi dernier dans la matin�e, dans la grande salle de conf�rences du Palais des nations � Clubdes- Pins. Ouyahia confort�, malaise chez Belkhadem et Soltani Cette d�claration faite par le pr�sident de la R�publique n'�tait gu�re attendue par les syndicalistes, d'autant qu'elle est intervenue presque � la fin de son discours. Certains, pr�textant des obligations personnelles, ont carr�ment quitt� la salle. �Il faisait tr�s chaud dans la salle. Je suis sorti pour prendre un bol d'air�, commente un syndicaliste du secteur des hydrocarbures, refusant au passage de lier sa sortie de la salle aux propos tenus par le pr�sident de la R�publique au sujet de la question des salaires. Du c�t� des officiels, l'ambiance est tout autre. Le chef du gouvernement, qui se trouvait en face du pr�sident de la R�publique, affiche s�r�nit�. Il vient d'�tre confort� par le pr�sident de la R�publique. Ce dernier a m�me cit� son nom, lorsqu'il rappelle la d�cision importante prise par Ouyahia en 1996, lorsque les caisses de l'Etat �taient vides. Allusion faite � la question des ponctions sur salaire prise � l'�poque pour faire face aux payements des salaires. Les autres partenaires de la coalition gouvernementale, en l'occurrence le SG du FLN et le pr�sident du MSP affichent un calme total, m�me si les observateurs pr�sents � cette rencontre n'ont pas h�sit� � reconna�tre que les propos tenus par le premier magistrat du pays les ont quelque peu �branl�s. Et pourtant, � quelques jours de cette rencontre tant Abdelaziz Belkhadem que Bouguerra Soltani ont soutenu la revendication salariale. Abdelmadjid Sidi Sa�d, quant � lui, est rest� scl�ros�. Son regard est rest� braqu� sur le pr�sident de la R�publique. Du c�t� du carr� occup� par les membres du secr�tariat national, point de mouvement. Chacun des responsables essaye d'interpr�ter � sa mani�re la sortie du pr�sident, certains jetant m�me des regards furtifs vers les autres syndicalistes et d�autres baissant carr�ment la t�te pour �viter de croiser d'autres regards. L'improvisation de Bouteflika Il est 11h pass�es de vingt minutes. Le pr�sident de la R�publique jette un �il scrutateur dans la salle. Il conclut vite que le malaise y s'est install� et que son auditoire est plong� dans un questionnement profond. Il improvise et d�clare : �Je crois que j�ai dit des choses qui ont fait mal. J'aurais pu tenir un autre discours qui pourrait plaire � tout le monde. Je pouvais dire voil� nous avons 50 milliards de dollars et on entame leur distribution au peuple alg�rien. Mais la r�alit� est tout autre. Je n'ai dit que la v�rit�, je ne dois vous dire que la v�rit�. Mais qu'on discute entre nous si on veut satisfaire le peuple alg�rien. Nous avons la chance de disposer d'un cadre tripartite qui a fait ses preuves au fil des ann�es. J'encourage ses partenaires � en faire le meilleure usage.� La salle bouge. Bouteflika saisit le message et poursuit : �J'ordonne au gouvernement d'entamer dans les plus brefs d�lais les travaux de la tripartite�, en pointant du doigt son chef du gouvernement tout en ajoutant que �si on peut augmenter les salaires des travailleurs et am�liorer ainsi les conditions des Alg�riens pourquoi pas�. Tonnerre d'applaudissements dans la salle. Comme un seul homme, les syndicalistes de l'UGTA se l�vent et scandent le nom du pr�sident de la R�publique. La joie est retrouv�e. On se serre la main. Mieux, certains se congratulent et s'embrassent. Et Bouteflika de poursuivre : �S'ils sont francs et sinc�res, le dialogue et la concertation permettront aux travailleurs de r�colter les fruits de leurs attentes en mati�re d'am�lioration de l'environnement et de la l�gislation du travail, de m�me qu'en mati�re d'�volution des salaires, en tenant compte de la croissance, de la productivit� et de l'inflation. J'invite donc l'UGTA, les associations patronales et le gouvernement � poursuivre leur concertation tripartite en leur rappelant aussi que nous attendons d'eux la finalisation du pacte national �conomique et social qui constituera une nouvelle avanc�e pour notre pays en lui offrant un cadre de r�f�rence pour l'avenir du d�veloppement national.� La tension baisse d'un cran. Les syndicalistes de l'UGTA retrouvent s�r�nit� et un semblant de confiance, m�me si une heure auparavant, le pr�sident de la R�publique a d�clar� explicitement que la priorit� n'est pas pour les augmentations des salaires. Abder Bettache � � Sidi Sa�d sur sa faim En �vitant de faire la moindre d�claration sur le discours prononc� par le pr�sident de la R�publique, le secr�taire g�n�ral de l'UGTA voudrait sans aucun doute disposer de suffisamment de temps pour d�coder les messages lanc�s en cette circonstance. Aux journalistes qu'ils l'ont abord� � sa sortie de la salle, lui demandant de faire un commentaire sur l'intervention de Bouteflika, le premier responsable de la Centrale syndicale s'est content� de dire "qu'il y aura une d�claration du secr�tariat national la semaine prochaine", tout en l�chant que "le discours du pr�sident est re�u cinq sur cinq et que je suis satisfait." En effet, m�me Abdelmadjid Sidi Sa�d ne s'attendait point � une �ventuelle d�cision que le pr�sident de la R�publique a d� prendre en la circonstance. Il a �t� quelque peu surpris par la "duret�" des propos tenus par le premier magistrat du pays sur la question de la revalorisation des salaires. Autrement dit, le S.G de l'UGTA aurait aim� entendre le premier magistrat plaider la cause du monde du travail, en reconnaissant la l�gitimit� de cette revendication. Mais h�las, les �v�nements ont pris une autre tournure. Abdelaziz Bouteflika a choisi le camp de la coalition laissant aux partenaires concern�s de d�battre de cette question dans le cadre de la tripartite. En effet, si Bouteflika avait appuy� la revendication salariale sans pour autant en prononcer le moindre engagement de sa part, le grand b�n�ficiaire ne sera autre que Sidi Sa�d et ce pour deux raisons. La premi�re est li�e � la tripartite. En prenant part � cette derni�re, le secr�taire g�n�ral de l'UGTA b�n�ficiera de quelques longueurs d'avance sur ses vis-�-vis du gouvernement et du patronat pour mieux n�gocier la question salariale. Quant � la seconde raison, elle est d'ordre syndical. Ainsi, le secr�taire g�n�ral sortant de l'UGTA, qui n'a pas encore confirm� son intention de briguer ou pas un second mandat � la t�te de l'organisation, aurait beaucoup � gagner sur un plan interne � l'organisation si Bouteflika avait plaid� la revalorisation des salaires. Il aura ainsi toute la latitude de se consacrer � la r�solution des probl�mes qui se posent au sein de son organisation et par voie de cons�quence, en prenant des d�cisions qui mettront de l'ordre au sein de la maison UGTA "loin de toutes formes de pression et de chantage." A. B.