Le bruit macabre des attentats de Londres du 7 juillet 2005 aurait d� tirer les autorit�s britanniques de l�hypnose dans laquelle les endormaient les islamistes du Londonistan ou, � tout le moins, d�sorganiser ces petits calculs tortueux en vertu desquels la tranquillit� accord�e aux jihadistes en vill�giature sur les bords de la Tamise les obligerait � la r�ciprocit� � l��gard de leurs h�tes. Cette conclusion, logique, p�remptoire, passant � l�as � la fois les subtilit�s des analystes et les m�andres des plans des chefs barbus, semblait s�imposer. Tant qu�ils se tenaient � carreau, ils pouvaient d�gorger leur haine en toute impunit�, ce dont ils ne se sont pas priv�s. �a paraissait immuable, et innocent ! Mais apr�s les attentats, l�embellie se referme comme une parenth�se! A peu de choses pr�s, les observateurs de diff�rents bords en sont arriv�s � cette m�me d�duction. D�autant que, apr�s les explosions qui ont endeuill� la capitale anglaise, on a entendu de vigoureux coups de b�ton sur la t�te d�islamistes de choc. Ces coups de b�ton bien sonores paraissaient traduire un nouveau cours, celui de la fermet�. Le cirque fait autour de l�incarc�ration d�Abou Hamza, l�imam � la nitroglyc�rine de la mosqu�e salafiste de Finsbury-Park, repaire de desperados de tous poils, pouvait passer pour une sorte de coups de sifflet de l�arbitre annon�ant la fin d�une pause dans le jeu qui se prenait pour le jeu lui-m�me. Que non, visiblement ! Tout cela, ce n�est pas pour de vrai. Il fallait juste faire semblant d�en donner pour leur argent � toutes celles et � tous ceux, � commencer par les Britanniques eux-m�mes, qui ne comprenaient pas qu�autant de complaisance � l��gard des marchands de haine finisse en ingrates et meurtri�res explosions dans les bus et le m�tro londoniens. De plus, et surtout, il ne fallait pas froisser le big brother am�ricain qui tient Abou Hamza, le capitaine Crochet des gal�res islamistes, pour un dangereux gus impliqu� dans la toile d�araign�e terroriste qui a pris le World Trade Center dans ses rets. Derri�re cet �cran de fum�e, la Grande-Bretagne poursuit martel en t�te les m�mes vieux objectifs : �dialoguer � avec les islamistes ! Elle ne s�en d�marque pas, comme on pourrait le croire, et comme on l�a beno�tement cru ! L�arrestation spectaculaire du tapageur Abou Hamza et de quelques petites frappes similaires est doubl�e par des entrelacs diplomatiques consistant � vouloir prendre langue avec les responsables de l�organisation islamiste que les services secrets de Sa Majest� tiennent pour �l�inspiration majeure de l�extr�misme musulman moderne�, � savoir El Ikhwane, les Fr�res musulmans. Cette vieille organisation, fond�e en 1928 en Egypte par Hassan El Banaa, entretenait d�j� dans les ann�es 1940 des rapports secrets avec l�ambassade britannique au Caire, pour regagner les faveurs du roi Farouk et de son ministre Noqrashi, corrompus, impopulaires et jouets entre les mains des Anglais. On comprendrait mieux pourquoi le gouvernement de Tony Blair a recycl� le pr�cheur genevois Tariq Ramadan, qui revendique l�h�ritage de son grand-p�re, Hassan el Banaa, tout en jurant ses grands dieux qu�il n�a rien � voir avec les Fr�res musulmans. Le fait de l�avoir r�cup�r�, apr�s que les Etats- Unis lui eurent refus� le visa, est coh�rent avec les n�gociations engag�es par les services de Sa Majest�. Dans un article sign� par Martin Bright et intitul� �Le dialogue avec les terroristes�, New Statesman, un hebdomadaire de r�f�rence londonien, fait �tat de �documents secrets�, dont il publie les fac-simil�s, montrant que le Foreign Office est �pr�t � faire face � la r�probation internationale � en �changeant avec les Fr�res musulmans �gyptiens. Tenaill� par un dilemme corn�lien, le gouvernement britannique tranche en assumant les in�vitables accusations �selon lesquelles il tente d�apaiser des islamo-fascistes � en nouant des liens avec les leaders FM plut�t que de devoir, en ne le faisant pas, �s�ali�ner une grande partie du monde musulman�. Le journal s�appuie sur une note adress�e au ministre en charge du Moyen-Orient, en date du 17 janvier, qui a fuit�, pour affirmer que le gouvernement se pr�pare � ouvrir une ligne de communication avec les Fr�res. La recommandation est d�augmenter la fr�quence des contacts avec les Fr�res parlementaires (�qui ne pr�nent pas la violence �, dit la note). Que les d�put�s islamistes (qui occupent 1/5 des si�ges), �lus � titre ind�pendants, appartiennent � une organisation hors-la-loi en Egypte, et qu�ils soutiennent �ouvertement la lutte violente du Hamas en Isra�l� a quelque chose de �contradictoire �, reconna�t la note. Mais pourquoi s�arr�ter � une petite contradiction de rien du tout ? Le Foreign Office supporte aussi, manifestement, de choquer le gouvernement de Hosni Moubarak, au moment m�me la n�gociation avec l�Egypte � propos du rapatriement de pr�sum�s terroristes d�tenus dans les prisons de Grande-Bretagne bute sur des conceptions divergentes de la place de l�islamisme. En Egypte, les Fr�res musulmans ont pour but la Charia et ils se consid�rent comme l�opposition principale au r�gime. Les soutenir, ne serait-ce que par la reconnaissance, c�est affaiblir le gouvernement en place. Le Foreign Office est conscient que cette politique comporte des risques majeurs pour la guerre contre le terrorisme, mais il les justifie par le vieux leurre qui consiste � croire que les gouvernements occidentaux seront plus aptes � influencer l�islamisme radical. �S�engager avec des mouvements tels que les Fr�res musulmans aidera � progresser dans notre compr�hension de l�islam politique en g�n�ral et dans le contexte �gyptien en particulier�. Pour influencer, faut-il encore voir venir ! C�est l�, le hic : voir venir ! A. M. P. S. de l�-bas : Je dois ce �rectificatif� � une lectrice, A.H. qui, suite � la chronique de la semaine derni�re, m��crit ceci: �Juste une note par rapport � votre article. Vous �crivez : " Pendant plus de quinze ans, la Grande- Bretagne a tol�r� sur son sol les islamistes les plus radicaux, les laissant profiter de sa libert� d�expression pour soutenir et m�me appeler au djihad, croyant que s�ils orientaient leur vindicte assassine sur les pays du monde musulman, o� souvent ils sont recherch�s pour des crimes de sang, ils ne commettraient pas d�attentat in situ. (...) Les Anglais se sont ressaisis, bien que tr�s tardivement." Sans vouloir vous d�primer, ce n'est malheureusement pas le cas : la Grande- Bretagne ne prend pas ses distances vis-�-vis des islamistes. � Merci � elle. Elle m�a fait parvenir les articles de New Statesman, qui m�ont �t� utiles.