Celui qui a su faire aimer la chanson cha�bie dans toute sa dimension a tir� sa r�v�rence dans la dignit� la plus totale quand bien m�me s�il s�en est all� brusquement � la suite d�une attaque cardiaque. Terrass� par la maladie, il nourrissait tout de m�me l�espoir de revenir un jour sur la sc�ne pour interpr�ter, � ceux qui le pr�f�raient � d�autres, ses meilleures chansons. Pour les besoins de la bonne cause, il avait pris attache, il y a six mois de cela, avec le grand m�lomane Abdelkader Zouaoui, dans le but de lui faire parvenir la qacida L�qit anaya khoudet du po�te Mostefa Benbrahim. Mais, l�inexorable destin�e en a voulu autrement. El Hadj El Hachemi Guerrouabi ou celui qu�on plaisait appeler l�enfant terrible de Belcourt est d�c�d� � l��ge de 68 ans, laissant derri�re lui un long parcours artistique tout aussi riche que merveilleux. N� � El Mouradia � Alger le 6 janvier 1938, il fit son entr�e dans le monde musical tr�s jeune parce qu�influenc� par les grands ma�tres qui l�ont pr�c�d�. Ces chanteurs, � l��vidence, avaient pour noms : El Anka, Hadj M'rizek, Khelifa Belkacem, Abdelghani Bouchiba, Mohamed Zerbout, H�ssissen et d�autres. En s�effor�ant de suivre leur carri�re car tellement fascin� par ce genre musical tr�s en vogue dans l�Alg�rois, Guerrouabi ne pouvait �tre autrement. Le cha�bi avait envahi son corps et son esprit. Et c�est la voix de Hadj M�rizek 1912-1955) qui d�cidera sur lui jusqu�� suivre fid�lement ses bris�es. Sans qu�il le connaisse directement, Hadj M�rizek �clairera sa voie celle-l� m�me qui va subjuguer, alors qu�il n�avait que 17 ans d��ge, le public lorsqu�il se produira en 1953 � l�Op�ra, salle Mahieddine Bachtarzi aujourd�hui. Il chantera � l�occasion une qacida du po�te Mohamed Bendhebbah intitul�e Kif Yensa Qelbi megrounet el houadjeb. Un foudroyant succ�s qui le propulsera audevant de la sc�ne puisqu�il enregistrera en mars 1955 son premier disque avec comme titre g�n�rique Belqak yesseguem sa�di, une chanson que lui avait �crit le grand violoniste Abdelghani Belka�d. Cet exploit, faut-il le dire, n�est que le fruit de Mahieddine Bachtarzi (1897- 1986) qui l�avait, incidemment, d�couvert apr�s qu�il l�eut entendu fredonner � l�op�ra une chanson tr�s rythm�e A yemna kh�da�tini fi lamane du po�te marocain Hocine Slaoui. Sa proportion pour les chansons all�gres et l�g�res, le destinera � choisir un r�pertoire qui le diff�renciera de celui des puristes du cha�bi. Ceci lui vaudra, d�ailleurs, d�acerbes critiques de la part de quelques r�fractaires au changement. Mais d�termin�, Guerrouabi va r�volutionner le cha�bi en l�all�geant de certaines lourdeurs qui le caract�risaient. A la faveur de sa bonne diction, il le rendra accessible � tous. Cependant, � l�ind�pendance il s�essayera dans le moderne avec des chansons que lui composeront successivement Rahab Tahar et Ma�ti Bachir. Elles ont pour titres respectifs Yal �dra et Ouech eddani lem�hani. Cette exp�rience qui n�aura aucunement le succ�s escompt�, le fera revenir � la source, celle du cha�bi au texte ardu. Ceci, il faut le dire, ne sera pas un secret pour lui notamment pour la compr�hension des paroles d�autant que l�enseignement que lui avait prodigu� son ma�tre Si Mohamed El Bessekri � l��cole coranique lui sera d�un grand apport.En 1970, Guerrouabi enregistrera un 33 tours d�anthologie du fait que son choix sera port� sur le hawzi. Ainsi, Youm el khemis ouech eddani et Leryam djaouni el barahdu po�te tlemc�nien Boumedi�ne Bensahla lui vaudront une importante place au sein des m�lomanes. Ce disque le distinguera, d�s lors, des autres chanteurs cha�bi. Il est consacr� grand interpr�te du hawzi, sa renomm�e grandissante int�ressera Mahboub Safar Bati qui le fera venir dans son studio � la rue Hoche pour lui �crire et composer des chansonnettes. El Barah, S�bayet Zoudj, Allo allo, Echems el barda, Nefsi ouana Moulaha, Djet Echta ou Djaou leriah, Nesseblek y a �mri seront des tubes tr�s aim�s par tous. Toutefois pour marquer sa potentialit� quant � l�interpr�tation des pos�sies des grands bardes maghr�bins, il s�attaquera sans coup f�rir aux chefs-d��uvre compos�s dans les structures appel�es Maksour djnah et Soussi mezloug, nous dira Mohamed Touzout, un fin connaisseur de la po�sie melhoun. Tout le monde va l�appr�cier dans El �rfaouia de cheikh Ennedjar ou Talet Eb�ssidi de Kaddour El Alami. Celui qui �tait passionn� par le grand acteur italien Marcello Mastroianni et a travaill� dans le th��tre avec Alloula, Ouniche, Fadhila Dzirya, Sissani, Allel El Mohib, a aujourd�hui apr�s cinquante ann�es de carri�re, laiss� une �cole loyalement suivie par des �mules qui veulent s�identifier � lui tant son charisme et sa distinction sont rest�s embl�matiques. L�effet produit sur cette frange de jeunes chanteurs que sont Abderrezak Guenif, Sid Ali Leqam, Nour Eddine Alane, Mourad Dja�fri, Karim Kacemi et Hamid La�daoui pour ne citer que ceux-l�, est �loquent. M�me s�ils n�ont pas �t� ses �l�ves directs, ils reconnaissent du moins sa valeur comme ma�tre qui leur a inculqu� une ligne � suivre afin que le cha�bi ne disparaisse point. Guerrouabi est et restera le grand ma�tre qui a marqu� son temps.