L��tat des deux sites arch�ologiques de Sigus dans la wilaya d�Oum-El-Bouaghi, une localit� distante de 36 km de Constantine sur la RN10, � savoir la cit� romaine et la n�cropole m�galithique illustre, � bien des �gards, la n�gligence et le laisser-aller des pouvoirs publics en ce qui concerne la pr�servation du patrimoine historique de l�Alg�rie. L��dification, ces jours-ci, d�ouvrages en dur sur des vestiges du site abritant la cit� romaine qui s��tend sur une superficie de 2,4 hectares et qui n�est m�me pas class� patrimoine arch�ologique national, constitue en fait une grave violation de la m�moire universelle. Aucune d�marche n�a �t� entreprise � l�effet de prot�ger ce site ou encore de le classer sous pr�texte du manque de financement et de bureaux d��tude sp�cialis�s. Ces monuments qui t�moignent de la profondeur historique de l�Alg�rie continuent de souffrir des s�vices des �rosions de la nature et de l�intrusion de l��l�ment humain. Les 50 dolmens qui restent encore �ligibles � la r�habilitation sur les 1200 s�pultures qui existaient bien avant la colonisation romaine, risquent de dispara�tre. Des travaux de r�alisation d�un jardin �pigraphique sur la n�cropole situ�e au pi�mont de la cit� romaine � l�est de Sigus, sont � pied d��uvre depuis pr�s un mois. Il s�agit en principe de mettre en valeur et de nettoyer le site arch�ologique de cette ville. Les autorit�s locales visent par le biais de cette op�ration de prot�ger le site ou du moins ce qui en reste. Il est pr�vu l�ach�vement de la cl�ture, l��dification d�un kiosque arch�ologique, des sanitaires et des all�es pi�tonnes. Le budget allou� � cette op�ration est de l�ordre de 5 millions de dinars. Selon le directeur de la culture de cette wilaya, M.Bougandoura, c�est en 2002 qu�il avait �t� pris en charge par le minist�re de la Culture pour la premi�re fois et un budget de 5 millions de dinars avait �t� mobilis� pour sa revalorisation sous l�appellation de �Maq�m Sigus�. Il s�agissait d��riger une cl�ture pour mettre � l�abri les pierres taill�es d�terr�es sur lesquelles sont calligraphi�es des inscriptions latines. L�entreprise engag�e dans cette op�ration, l�ETP Assas Hammana, avait interrompu les travaux en janvier 2003, apr�s la consommation de la totalit� du budget allou� par la tutelle. Cette entreprise a poursuivi en justice la Direction de la culture d�Oum-El-Bouaghi r�clamant la r�gularisation de ses dus relatifs � la r�alisation de travaux compl�mentaires. D�apr�s M. Bougandoura, �le litige a �t� r�gl� en faveur de son administration, sachant que l�entrepreneur, a-t-il ajout�, a approuv� le service fait�. Ainsi, la cl�ture r�alis�e ne r�pond pas, aux yeux des sp�cialistes en la mati�re, aux normes retenues pour l��dification d�un si�ge de site arch�ologique dans la mesure o� ce dernier reste invisible de l�ext�rieur du mur d�enceinte. Massacre � la n�cropole romaine Cependant, les barreaux utilis�s pour l�ach�vement de la cl�ture ne sont pas identiques � ceux ayant servi pour la premi�re fois bien que c�est le m�me bureau d��tude qui assure le suivi du projet et ce, depuis l�ann�e 2002. La construction du kiosque en dur sur la n�cropole situ�e au pied de la cit� romaine au moment o� cette derni�re n�est m�me pas class�e patrimoine arch�ologique est une atteinte � la m�moire universelle. Les arch�ologues crient d�j� au scandale ! Ils estiment que cette d�marche de mise en valeur ne concerne que la n�cropole alors qu�il fallait prendre en charge la totalit� du site inhum� sous le mamelon �d�El-Azeri� � l�est du village. Le directeur de la culture a indiqu� que son administration n�a pas entam� les d�marches pour le classement de ce site car le dossier ne dispose pas d�une �tude exhaustive et fiable. �Un travail qui doit �tre accompli par des sp�cialistes et n�cessite la mobilisation de cr�dits importants, mais malheureusement, d�plore le m�me responsable, le manque de financement et de bureaux d��tude sp�cialis�s � l�Est alg�rien ont emp�ch� la d�marche�. Il est � noter que les autorit�s locales de la da�ra de Sigus ont enregistr�, en mai 2006, la d�couverte d�ossements � proximit� de ce chantier inachev� bien avant le lancement de la deuxi�me tranche du projet. Des d�s�uvr�s, dit-on, creusaient � proximit� du site en qu�te de pi�ces de monnaie antiques, pris�es par des acqu�reurs �trangers � la r�gion. Des arch�ologues de la Direction de la culture ont �t� d�p�ch�s sur les lieux et les ossements ont �t� soumis � expertise. Rappelons que la premi�re d�couverte d�ossements remonte � 1990, date du d�but des travaux de d�capage entam�s par les b�n�ficiaires de terrains destin�s � la construction. En fait, 31 lots ont �t� distribu�s � des membres de �la famille r�volutionnaire�. Et comble de l�ironie, ces riverains ont arr�t� les travaux pensant qu�il s�agissait d�une fosse commune datant de l��poque coloniale, ce qui avait suscit� une vive pol�mique. Les recherches de M.Soltan Sabri, qui �tait journaliste � l��poque et occupe actuellement les fonctions de directeur de la maison de la culture � Oum-El-Bouaghi, effectu�es dans les archives du mus�e des beaux arts � Alger, ont �tabli que ce site abrite tr�s probablement une cit� romaine, ce qui avait conduit � l�annulation des attributions des lots de terrains sur d�cision du wali de l��poque, M. Mohamed- Tahar Sekrane. Une commission a �t� d�p�ch�e par l�Agence nationale de l�arch�ologie et du patrimoine historique (Anaph) pour �tablir un �tat d�finitif de ce site, mais nous dit-on, rien n�a �t� entrepris depuis, pour la suite de la d�marche � entreprendre. En attendant, le site de Sigus continue de subir des d�gradations. La cit� romaine inhum�e sous le mamelon d�El-Azeri Selon les �crits de St�phane Gsell, une notori�t� de la soci�t� arch�ologique de Constantine sous la colonisation, qui fait r�f�rence � un �v�que cit� dans l�Atlas arch�ologique de l�Alg�rie (AAA), Sigus est �Castellum Repulica�, un municipe romain sous le Bas- Empire (235-476), qui contiendrait, entre autres, une assembl�e et une basilique datant de la civilisation romaine. Sigus est �galement rep�rable sur la carte illustrant le r�seau routier de l�Afrique romaine au mus�e de Cirta � Constantine, en tant que point de liaison entre l�antique Cirta et les diff�rentes cit�s romaines de l�Est, � savoir, Gadiovfala (Ksar-Sba�hi) Tigisi (A�n-El-Bordj), Tenebreste et Theveste (T�bessa) sur l�itin�raire d�Antonin en passant par Macomades (Oum-El-Bouaghi) et Marcemeni (A�n-El-Be�da) et Baga� en allant vers Mascula (Khenchela). Ces vestiges, laiss�s � l�abandon, continuent de se d�grader tant par le fait de la nature que par l�intrusion inopportune de l�homme. Il est � rappeler aussi que ce site, jadis travers� par le chemin de fer, a fait l�objet de la campagne de reboisement des terres br�l�es apr�s l�ind�pendance entre 1962 et 1967 de m�me qu�il a vu l�utilisation d�un bon nombre de ses pierres taill�es pour l��dification d�un grand mur de sout�nement par l�APC du FIS dissous en 1991. Par ailleurs, il convient de noter qu�� Sila, � 8 km au sud-ouest de Sigus, se trouvent des vestiges de la cit� romaine de Sila, un fort byzantin et 4 basiliques chr�tiennes. L�une d�elle est situ�e � 1000 m � l�ouest du fort et poss�de trois nefs. La nef centrale est prolong�e � l�est par une abside de forme arrondie, au sud par une sacristie et au nord par un baptist�re. L��difice mesure au total 21,30 m de longueur et 14,30 m de largeur (St. Gsell : AAA.F17.n�333). Disparition de la n�cropole m�galithique Sigus dispose �galement d�une vaste n�cropole m�galithique qui remonte � l��re protohistorique, phase interm�diaire entre la pr�histoire et l�histoire, marqu�e par l�av�nement des toutes premi�res manifestations architecturales, donc du passage de l��tat nomade � la s�dentarisation. Elle s��tend de la plaine de Fesguia au sud-ouest � Redjie, Safia au sudest du village, dont le versant rocheux situ� sur la rive sud de oued �El-Kleb�, au sud du village, a �t� gravement endommag� pendant la guerre d�Alg�rie. Une cit� de regroupement y avait �t� �tablie par l�arm�e fran�aise (voir Marc C�te / Paysage et patrimoine/Guide d�Alg�rie/ M�dia-plus Alg�rie). Ce site, class� patrimoine national en 1968, contient des s�pultures tr�s rares (Dolmens, Menhirs, Cromlechs). Le dolmen aux trois menhirs est unique au monde. Ces vestiges de monuments ant�rieurs � l�occupation romaine et d�nomm�s tant�t celtiques, tant�t m�galithiques par les explorateurs, sont au nombre de 1200. Nous pouvons lire dans la lettre de J.Chabassi�re � son pr�sident de la soci�t� arch�ologique de Constantine (voir Recueil des m�moires de la soci�t� arch�ologique de Constantine de 1886) qui inclut les r�sultats de ses fouilles sur les ruines et dolmens du Djebel-El-Fortas et de ses contreforts notamment � Ras-El-A�n et � Sigus, ceci : �Les s�pultures sont, ici, en nombre consid�rable. On peut, et sans crainte d�aucun d�menti, fixer � plus de 1200 dolmens, grands ou petits, le nombre de monuments parfaitement apparents sur le sol. Chacun de ces tombeaux renfermait, en moyenne, quatre cadavres. Il s�agit donc d�une population de pr�s de 5000 individus�. Aujourd�hui, il reste, selon des sp�cialistes qui �voquent un v�ritable �massacre�, � peu pr�s, 50 ou 60 monuments �ligibles � la r�habilitation. J.Chabassi�re a fait aussi allusion � des s�pultures � incin�ration dans lesquelles des os d�oiseaux et des dents d�animaux figurant souvent au fond de petits pots de 7 � 12 cm de diam�tre et sur autant de hauteur, dont le �Plat � bord creux�, d�pos� au mus�e de Constantine avec d�autres objets provenant des fouilles de Sigus, qui est, selon lui, au moins aussi int�ressant que celui trouv� dans la grotte de �Palmella�, en Espagne. Si les arch�ologues n�ont pas abouti � un consensus quant � l�origine de ces vestiges et � leur appartenance, soit aux gens du Nord, soit aux autochtones, leur r�habilitation offrira certainement � la r�gion un produit touristique de choix.