N�ayons pas peur des mots. Ce que les milliers de personnes qui s��taient entass�es sur les tribunes et trav�es du stade du 5-Juillet ont offert comme spectacle, jeudi, a de quoi faire p�lir de jalousie m�me les ma�tres en la mati�re, les Cariocas habitu�s du sulfureux derby �Flu-Fla� du Maracana entre les Vert et Rouge de Fluminense et les Rouge et Noir de Flamengo, ou encore ces belles fresques que s�ing�nient � offrir depuis pr�s d�un si�cle les deux rivaux qui se partagent San Siro pour le derby milanais, voire ces Anglais et Ecossais de Liverpool ou de Glasgow qui, l�espace d�une heure trente, transforment leurs stades en cath�drales o� les chants ne cessent que lorsque l�arbitre renvoie d�finitivement les joueurs aux vestiaires. A tous ceux-l�, qui incarnent ce qui se fait de mieux dans les d�cors si particuliers aux derbies, les milliers de gars venus de Bab-El-Oued, de Soustara et d�ailleurs, parfois de bien plus loin que les quartiers de la capitale, ont montr� qu�ils savent, eux aussi, s�y prendre pour faire trembler un monstre de b�ton comme le vieux 5-Juillet. Ils n�ont pas failli dans le r�le de ce qu�on appelle commun�ment �le 12e homme�, m�me s�il faut reconna�tre qu�� certains moments de la partie, ils donnaient l�impression d��tre assomm�s par le �je te tiens, tu me tiens par la barbichette� dans lequel ont sombr� les d�bats, surtout en premi�re mi-temps. Mais, globalement, et contrairement � ce qui pouvait se passer sur le terrain, dans ce match �galement tr�s attendu qu�ils allaient se livrer tout autour du rectangle vert, il ne faisait pas de doute que le peuple en vert et rouge allait prendre le dessus. Il sautait, en effet, aux yeux que du point de vue nombre, la bande � Fabbro avait de quoi se sentir mieux port�e. Et cela s�est v�rifi� pendant le match lorsque d�un coup, cinq minutes apr�s la reprise, le stade est sorti de cette l�thargie dans laquelle l�a plong� le petit spectacle de la premi�re mi-temps. La 14 et les autres tribunes attenantes profitent d�un petit num�ro de son idole, Ammour, pour se r�veiller elles aussi, mais les d�cibels sont plus assourdissants du c�t� des partisans du Doyen. On aurait dit que les joueurs des deux camps n�attendaient que cela pour se montrer digne de l��v�nement dont tout joueur r�ve d�y prendre part un jour dans sa carri�re. �a rugit de partout � l�heure de jeu, et tout juste avant que soient entam�es les derni�res quinze minutes, lorsque Hadjadj trouve la cible de la m�me mani�re qu�il le fit une fois sous le maillot du FC Nantes, c�est en le Maracana de ses plus belles heures que se transforme le 5-Juillet. Des couleurs dans un d�cor n�ayant rien � voir avec un stade d�un pays ��du tiersmonde du football��. Curieusement, le fumig�ne, cet objet de tous les interdits, dont tout le monde parle pour �maudire� ceux qui en usent, et pour lequel les policiers ont �t� particuli�rement brief�s pour en faire une de leurs priorit�s de la chasse aux objets interdits, fait son apparition partout sur les trav�es. Et l�, tous ceux qui n�aimaient pas cet outil devenu indispensable de l�attirail du parfait supporter, s�oublient pour appr�cier comme il se doit le spectacle, il est vrai d�une grande beaut�. Le stade a explos� et la plus grande partie du stade pouvait alors donner libre cours � son bonheur. Avec son coup de semonce, Fodil Hadjadj venait de donner le coup d�envoi d�un autre carnaval comme les Chnaouas les aiment.