Depuis l'ind�pendance, � toutes les �tapes d�cisives et graves qu'a connues le pays, l'usage s'est install� pour penser l'Alg�rie en tant que pr�sidence et de reporter ou d'�viter carr�ment de la penser en termes d'Etat. La r�flexion sur la pr�sidence, ellem�me, est davantage centr�e sur la personne du pr�sident plut�t que sur l'institution pr�sidentielle. A toutes les �tapes, nous choisissions un pr�sident, ou pour �tre plus pr�cis, on nous pr�sente un pr�sident, en la personne de qui nous pla�ons tous nos espoirs, � qui l'on confie tous nos probl�mes, en qui l'on d�couvre des qualit�s qui justifient la confiance port�e en lui, en ses capacit�s et sa sagesse. Des voix s'�l�vent alors, par conviction ou conformisme, pour appeler � son �lection ou � sa r��lection. Mais le mandat du pr�sident, ainsi investi de notre confiance, s'ach�ve en r�gle g�n�rale dans un flot d'accusations et de critiques. Des voix s'�l�vent alors, par conviction ou par conformisme, pour lui faire assumer, seul, la responsabilit� de l'impuissance, des erreurs, du marasme, des d�viations et des d�passements qui ont eu lieu dans le pays au cours de sa magistrature. Telles sont les caract�ristiques, � de rares exceptions pr�s, qui ont marqu� le parcours et le destin de la plupart de ceux qui ont assum� la responsabilit� de la premi�re charge du pays. Certains de ces hommes sont partis dans un silence relatif, d'autres ont laiss� leur vie en guise de fin de mandat. Durant toutes ces �tapes d�cisives et graves, les voix des opportunistes sont celles qui s'�l�vent le plus haut, qu'il s'agisse des campagnes de glorification ou de celles de d�nigrement. Dans toutes ces �tapes, l'on constate syst�matiquement l'absence de tout d�bat s�rieux sur l'�valuation du syst�me de pouvoir �tabli depuis l'ind�pendance, de ses institutions, des programmes et des politiques suivies durant l'�tape pr�c�dente dans la gestion du pays. Ou, plus justement, ce d�bat est d�lib�r�ment �lud�. Si nous avions men� ces d�bats, nous aurions pu identifier les causes r�elles de l'impuissance, des erreurs, du marasme, des d�viations et des d�passements subis par notre pays. Si ces d�bats avaient pu �tre men�s, l'on se serait rendu compte que la part n�gative qui revient aux hommes qui se sont succ�d� � la pr�sidence est peut-�tre moins importante � que leur apport positif aurait pu �tre plus grand � si le syst�me de pouvoir � la t�te duquel ils ont �t� plac�s reposait sur des structures saines et si ses institutions exprimaient r�ellement la volont� du peuple. Autrement dit, si ces structures et institutions �taient d�mocratiques, et effectivement repr�sentatives et efficientes. De nombreuses voix commencent � s'�lever aujourd'hui, par conviction ou par conformisme, avec les m�mes m�thodes et les m�mes approches politiques ant�rieures, pour appeler le pr�sident de la R�publique, le fr�re Abdelaziz Bouteflika, � se porter candidat pour un troisi�me mandat. Comme si l'Alg�rie n'avait besoin aujourd'hui de rien d'autre que de perp�tuer la situation actuelle que tout un chacun conna�t et sur laquelle je n'�prouve pas la n�cessit� de m'�tendre. La majorit� des Alg�riens s'en plaignent ou subissent am�rement. Ma conviction est que la prolongation du mandat du pr�sident, sans changement radical du syst�me de pouvoir, conduit le pays, au minimum, � une impuissance plus marqu�e � r�soudre ses probl�mes et � faire face aux grands d�fis qui l'attendent � l'int�rieur et � l'ext�rieur. De m�me que l'intronisation d'un nouveau pr�sident, quelles que soient ses qualit�s, sans changement radical du syst�me, conduira aux m�mes r�sultats. Cette probl�matique est fondamentalement celle qui a dict� l'appel que j'ai sign� avec les fr�res Hocine A�t Ahmed et Mouloud Hamrouche, au mois de septembre dernier et que certains ont qualifi� d'initiative. En r�alit�, il s'agissait, en plus, d'une invitation � l'initiative adress�e aux responsables et aux citoyens, individus et organisations et � tous ceux qui croient en l'imp�rieuse n�cessit� d'un changement d�mocratique et en la n�cessit� d'appeler � ce changement et d'agir pour le r�aliser. Le probl�me central qui se pose aujourd'hui n'est pas, simplement, le choix d'un homme, capable de r�soudre les probl�mes du pays, mais l'�dification d'un syst�me de gouvernement qui donne � tous les Alg�riens la possibilit� d'apporter leur contribution � la solution de ces probl�mes.