Une journée après l'annonce par Rachid Benyellès de sa candidature à la prochaine élection présidentielle, Chérif Belkacem est lui aussi monté au créneau, en prenant carrément le contre-pied de son compagnon. Dans un appel rendu public, hier, l'ex- membre du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA) s'est exprimé pour “le report de ces élections alibi d'une démocratie inexistante”, s'alignant ainsi sur la position de Hocine Aït Ahmed. “Aller à des élections dans la confusion actuelle, sans opérer préalablement la rupture, c'est reconduire la gangrène qui ronge le pays”, a-t-il averti. Pour l'éminence grise du défunt Houari Boumediene, il s'agit d'“imprimer au pays un changement salutaire et non pas de porter untel ou untel à la magistrature suprême”. Car, estime-t-il, “jusqu'à présent, le remplacement d'un président par un autre n'a fait que reconduire le système dans lequel se complaît le pouvoir actuel”. Aussi, Chérif Belkacem a déploré une certaine focalisation des regards sur la prochaine présidentielle, viciant ainsi “le vrai débat”. “Nous sommes dans la pire continuité criminelle”, s'est-il élevé. Il considère qu'“à l'intérieur comme à l'extérieur, le pouvoir n'a aucune crédibilité” et que “la médiocrité s'est installée dans les centres de décision”. Décochant une pique à l'adresse de Bouteflika — une de ses exigences est d'écourter le mandat de ce dernier —, il fera remarquer que “les concordes civile et nationale se sont avérées des leurres”. Plus grave encore, la division a atteint aussi bien des partis, des associations que “des pans entiers de la société”. C'est pourquoi il a attiré l'attention sur “le risque réel d'éclatement que court le pays” et invite les Algériens à “penser sérieusement les tenants et aboutissants d'un véritable changement”. C'est pourquoi aussi, le lancement de ce présent appel pour mettre en branle “la plus grande opération de sauvetage que connaîtrait l'Algérie, après celle de Novembre 1954”. À ses yeux, la solution est que, après le désengagement de l'armée du champ politique, la classe politique doit “s'engager pour une action globale de sortie de crise (…)”. Pour ce faire, il est nécessaire de se “ménager un moment de réflexion” pour effectuer “un audit complet du pays” et “un diagnostic sérieux reposant sur une vision globale”. Explicitant davantage sa pensée, il ajoutera : “Concrètement, il s'agit de désigner une instance à même de réunir, durant une période transitoire, les conditions qu'exigent ces objectifs.” Tout comme il formulera l'idée de l'“élaboration d'un projet de Constitution dans lequel sera consacré l'équilibre des pouvoirs avec des mécanismes empêchant toute instrumentalisation” qui “délimitera de manière précise les prérogatives du Président en éliminant radicalement les germes du pouvoir personnel et son corollaire, la cooptation”. C'est à ce prix qu'on peut enclencher “le vrai débat politique ancré dans les problèmes de fond” et déboucher sur “l'instauration d'un consensus, permettant aux citoyens de choisir librement et dans les meilleures conditions possibles leurs représentants”. Mais ce changement ne peut survenir de “la violence de la rue “mais” par et dans les institutions”. A. C.