En janvier 2008, le forum �conomique mondial de Davos a class� l�ins�curit� alimentaire comme 2e risque mondial apr�s la menace financi�re et la r�cession am�ricaine. D�ici 2050, la population mondiale � nourrir sera de 9,2 milliards d�habitants contre 6,5 milliards actuellement. Les pays d�velopp�s repr�senteront 13%. En Afrique, la population aura augment� de 117%. Elle aura baiss� de 10% en Europe. Pour prendre en charge correctement cette demande, il faudrait multiplier la production agricole mondiale par 2 si l�on en croit le professeur Marcel Mazoyer de l�institut Agro Paris Tech. � La hausse de la facture alimentaire Entre sept 2005 et sept 2007, les prix des principaux produits agroalimentaires sur le march� mondial ont �volu� comme suit (en dollars la tonne)
Sept. 2005 Sept. 2007 Riz 280 325 Bl� 160 340 Ma�s 100 150 Et un document de l�OCDE et la FAO, rendu public en juillet 2007 annonce qu�au cours des dix prochaines ann�es, les prix de beaucoup de produits agricoles resteront �lev�s. Et bien �videmment, ce sont les m�nages des pays pauvres qui supporteront le plus lourdement ces hausses de prix. Les d�penses alimentaires des m�nages des pays pauvres repr�sentent en effet, 60 � 90% du budget contre 10 � 20% dans les pays du Nord. On comprend ais�ment ainsi qu�une augmentation de 20% du prix des c�r�ales aura imm�diatement des cons�quences dramatiques sur les m�nages pauvres. L�ensemble des sp�cialistes des questions agroalimentaires sont d�accord pour souligner que les probl�mes de s�curit� alimentaire vont marquer s�rieusement le contexte �conomique, politique et social mondial dans les dix ann�es � venir, p�riode au cours de laquelle le monde risque de passer d�une situation de surproduction agroalimentaire � une situation de p�nurie. Cinq raisons ont �t� invoqu�es, qui expliquent la hausse des cours des produits agroalimentaires. Parmi elles, certaines sont structurelles. 1) Les al�as climatiques ont pes� de tout leur poids sur la production mondiale : s�cheresse en Australie et en Ukraine entre autres mais aussi pluies en Union europ�enne. Les cours des produits agricoles ont bien �videmment subi ces pr�visions � la baisse de la production. 2) La demande mondiale de c�r�ales �va croissant depuis plusieurs ann�es� du fait de deux ph�nom�nes : a - l�augmentation de la population mondiale b - l��volution des modes de consommation dans les pays �mergents comme la Chine et l�Inde (cf. Le Monde �dossier et doc� n� 372, f�vrier 2008) 3) Le d�calage entre la production et la consommation qui se traduit par la baisse des stocks. En 2007/2008, la population suffirait � peine � couvrir la demande mais pas � remonter le niveau des stocks. Pour le bl� par exemple, les stocks sont au plus bas depuis 32 ans. 4) Les biocarburants, en plein essor � travers le monde, commencent � concurrencer la production agroalimentaire. A titre d�exemple, les USA �conservent leur ma�s pour le transformer en bio�thanol et ne l��coulent donc plus sur le march� mondial.� 5) Le monde s�attendait � une hausse des cours des c�r�ales pour des raisons structurelles mais personne ne pr�voyait des hausses aussi importantes. Les connaisseurs des march�s boursiers des c�r�ales imputent ces trop fortes hausses en partie aux sp�culateurs qui font feu de tout bois. A Chicago, le prix du bl� a plus que doubl� depuis le d�but de l�ann�e (cf. Le Monde, �dossier et documents �, n� 372, f�vrier 2008). Cette situation de risque s�rieux de crise alimentaire mondiale donne lieu actuellement � trois grands d�bats pol�miques : 1) Pour rattraper la demande alimentaire mondiale qui progresse � un rythme rapide, faudrait-il avoir recours aux OGM (Organismes g�n�tiquement modifi�s) ? Les partisans des OGM pr�sentent ceux-ci comme la solution qui prot�ge l�environnement et lutte contre la faim. Leurs d�tracteurs les d�noncent comme nocifs et cr�ant une d�pendance des paysans envers les firmes productrices de semences. 2) Faudra-t-il poursuivre le d�veloppement des agrocarburants ? Leurs partisans les pr�sentent comme une aubaine pour la plan�te et pour le revenu des agriculteurs. Leurs d�tracteurs les accusent de concurrencer les cultures alimentaires. 3) Faudra-t-il limiter l��levage du b�tail ? Oui, car cet �levage et grand utilisateur d�eau et de c�r�ales. Non, car la consommation de viande rouge est indispensable � un bon �quilibre alimentaire. Le sp�cialiste Michel Griffon du centre de coop�ration internationale en recherche agronomique pour le d�veloppement, avertit : �Nous allons vers une agriculture au co�t �nerg�tique �lev� disposant de peu d�engrais et devant �conomiser l�eau�. Et le professeur Dufumier ajoute : �Si on laisse le march� mondial ouvert, la concurrence des produits des pays du Nord fortement subventionn�s imposera des prix trop bas qui emp�cheront les paysans pauvres de survivre�. Crise agroalimentaire mondiale annonc�e ; approfondissement de la fracture alimentaire nord-sud, co�ts des importations agroalimentaires de plus en plus �lev�s. C�est l� un tableau qui exacerbe notre d�pendance alimentaire, nous qui importons l�essentiel de nos aliments de base : bl�, huile, sucre, lait. Nous n�osons pas �voquer les cons�quences de notre d�ficit vivrier lorsque nous n�aurons plus suffisamment d�hydrocarbures � mettre dans nos... assiettes !