Quel est l�imp�nitent comploteur qui, dans une anticipative bouff�e anti-d�mocratique, a limit� le nombre de mandats pr�sidentiels � deux ? Savait-il que, ce faisant, il ourdissait l��exclusion � de l�actuel pr�sident d�une course dans laquelle tous les pronostics le donnent vainqueur avant m�me qu�il ne soit question de d�part ? Interrogations fantasques ! Dans une interview accord�e � Florence Beaug� du Monde(19 juin), Abdelaziz Belkhadem, Premier ministre et chef du FLN, dit : �Ce verrou de deux mandats nous para�t antid�mocratique. C'est au peuple de d�cider (en avril 2009) s'il veut redonner sa confiance au pr�sident pour un troisi�me mandat. Nous sommes favorables � une �lection pr�sidentielle sans exclusion. A l'heure actuelle, c'est le pr�sident qui souffre d'exclusion en raison de cette limitation � deux mandats. � Besoin de commentaires ? Le pr�sident souffre d�exclusion, que faut-il ajouter � �a ? Quand on ne conna�t pas l�Alg�rie, on pourrait croire un tantinet � �a. Mais quand on est flanqu� de l�Unique qui, tous les jours, nous raconte la grandeur du pr�sident, vie et �uvre, on se demande vraiment o� l�interview� du Monde va chercher des mots pareils. Exclusion ! Partout, il y a du pr�sident. Et nulle part, il n�y a ce qui pourrait ressembler au d�but de commencement de l�ombre non pas d�une opposition mais d�une simple position critique � son �gard ! Exclusion ! Que veut dire le Premier ministre ? La limitation des mandats � deux par la Constitution emp�che le pr�sident actuel de se pr�senter devant le peuple pour une �lection d�mocratique dans laquelle il a toutes ses chances. La Constitution interdirait au candidat naturel du peuple de venir lui demander de le l�gitimer par ses suffrages. Levez le verrou et vous verrez ! C�est le message subliminal ! Pas si subliminal que �a, en fait. La candidature de Bouteflika � sa propre succession ne tient plus qu�� sa volont� ou � ces strat�gies de communication qui prescrivent de ne pas se d�clarer trop t�t ni trop tard. Il y a un temps pour tout. Nous sommes dans celui du faux suspense. Abdelaziz Belkhadem nous rassure sur un point : il n�est pas question de pr�sidence � vie ! Cependant, il ne nous dit pas combien de mandats constituent une pr�sidence � vie ou plut�t une vie de pr�sident � vie. On pourrait alors le suivre jusqu�au seuil de sa porte : ok pour l�amendement de la Constitution, mais on limite le nombre de mandats � trois ! Personne n�enl�vera de l�esprit de notre Premier ministre que si le pr�sident �exclu� par le r�dacteur de l�article f�lon se pr�sentait, il l�emporterait haut la main. L�-dessus, devinant les ressorts retors des urnes, on ne peut pas ne pas �tre d�accord avec lui. Un r�f�rendum sur l�amendement de la Constitution ? Economisons l�argent de l�op�ration, le �oui� est programm� gagn� d�avance. Pas besoin de prospective, ni de marc de caf�. Un troisi�me mandat pour Bouteflika, seul comme en 1999 ou accompagn� comme en 2004, qu�estce qui s�y opposerait ? Vu l��tat de d�sertification de la vie politique achev�e, et avec tout le respect que l�on doit aux �lecteurs alg�riens chacun par son nom, il se pr�senterait au sacre de roi des Indes ou d�empereur de l�Empire du Milieu qu�il passerait au premier tour. Excessif ? A peine, � peine, h�las, trois fois h�las� ! En criant d�ores et d�j� victoire sans avoir l�air d�y toucher, Abdelaziz Belkhadem joue sur du velours. Celui des rideaux opaques qui bouchent la vue sur les priorit�s sociales et politiques d�une Alg�rie d�senchant�e, celle de millions de gens qui, du creux de leur mis�re, voient les minarets s��lever dans le ciel et les autoroutes leur filer sous le nez en essayant, par les �meutes ou par el-harga, de crier qu�ils en ont assez d��tre les dindons de la farce. L�avantage, pour la d�mocratie, de la limitation du nombre des mandats � deux est qu�on pouvait esp�rer, � d�faut de r�volutionner un syst�me us� jusqu�� la corde, une alternance des hommes dans ce m�me syst�me. Ce n�est pas terrible comme avanc�e, mais c�est toujours �a de pris � la perspective zaimale du contraire. Faire une priorit� d�un troisi�me mandat pour Abdelaziz Bouteflika, c�est �tre d�j� dans cette perspective. Cela �tant, il n�est pas hors sujet de penser, avec Sid-Ahmed Ghozali ( Le Monde21 juin), et d�autres, que �le probl�me n�est pas M. Bouteflika, mais le syst�me�. Ah ce sacr� syst�me ! Un deus ex machina ? Une hydre dont les membres enserrent d�une vigueur invisible le pays, l��touffant ? Une machinerie polici�re d�vou�e aux int�r�ts n�o-lib�raux d�une caste qui se goinfre � qui mieux mieux en transformant, par abus de pouvoir, le patrimoine public en propri�t� priv�e ? Une tour d�ivoire doubl�e d�une sorte de recycleuse qui ne laisse tomber aucun membre d�aucun clan ? Tout cela � la fois ? Probable ! Le fait est que les m�mes causes donnent les m�mes effets et, dans ces conditions, troquer le nom de Bouteflika contre un autre du m�me cru politique, la diff�rence observable ne serait qu�une diff�rence de style. Sid-Ahmed Ghozali n�est pas tendre dans son habit d�opposant : �Nos dirigeants conduisent le pays comme ils conduiraient une brouette�, dit-il dans le m�me article du Monde. Compare-t-il �nos� dirigeants � des conducteurs de brouette, invention r�volutionnaire en son temps, � cause des archa�smes politiques et �conomiques qui leur tiennent lieu de vision ? Est-ce plut�t le rythme plus que lent des changements qui lui inspire cette m�taphore ? N�y fait-il pas plut�t r�f�rence parce que, comme le syst�me, la brouette n�a besoin que d�une roue pour zigzaguer mais de trois pieds pour se reposer ? L�image est, en tout cas, bien trouv�e. Le verrou de Belkhadem et la brouette de Sid-Ahmed Ghozali nous renvoient � l��tal du quincaillier. C�est dans ce tr�sor qu�est cach�e la cl� pour comprendre comment un pays sur lequel sont pos�s toutes sortes de verrous et qui cahote comme une brouette sur une terre gorg�e de p�trole peut encore supporter qu�on lui parle de troisi�me mandat alors que les deux premiers l�ont harass�. A. M. P. S. d�ici et de l�-bas : Le 25 juin, j�aurai une pens�e pour Loun�s, Matoub Loun�s, le sacrifi�. Et une pens�e pour ces milliers de jeunes et de moins jeunes, en Kabylie et ailleurs, qui n�en ont pas fait le deuil.