L�ambiance qui r�gne au niveau des stations de bus urbaines et suburbaines illustre parfaitement l�anarchie que vit le secteur des transports en Alg�rie. Le comportement des chauffeurs et des receveurs, majoritairement des jeunes, est souvent � l�origine de graves accidents de la circulation dont le nombre ne cesse d�augmenter et avec lui celui des morts. Station de bus de Chevalley, � El Biar, sur les hauteurs d�Alger. Il est onze heures et l�endroit grouille de monde. Les bus occupent les deux bords de la route dont un espace a �t� am�nag� en guise de station d�arr�t. Des policiers essayent de r�guler le flux des v�hicules qui circulent � vive allure, afin d��viter qu�un pi�ton ne soit percut� par un �ventuel chauffard. Au milieu des cris de receveurs, une jeune femme arrive, son b�b� dans les bras. Elle veut aller � Kouba, mais le bus est d�j� bond�. Elle d�cide alors d�attendre le suivant. Pendant ce temps, les passagers du premier bus cherchent le chauffeur pour d�marrer. Ce dernier est absent. Il fallait patienter plus d�un quart d�heure pour le voir sortir d�un caf� voisin. Il d�marre directement, faisant semblant de ne rien entendre des r�clamations de ces voyageurs, press�s de fuir cette chaleur suffocante. La jeune femme attend toujours, tentant de calmer les pleurs de son enfant. Le deuxi�me bus arrive finalement et elle monte difficilement, bouscul�e par d�autres voyageurs. Derri�re eux, � proximit� d�un abribus, des chauffeurs discutent entre eux du championnat national de football. Ne supportant plus de trop attendre, la jeune femme descend et prend un taxi, visiblement �nerv�e par la r�ponse du receveur lui recommandant de s�acheter une voiture si elle veut �viter la mis�re du transport en commun. A la sortie de la station, un bus de l�Etusa s�arr�te pour laisser descendre quelques voyageurs. Son chauffeur profite de l�occasion pour se rendre dans un kiosque, s�acheter deux cigarettes, bloquant ainsi ses coll�gues � l�int�rieur de la station. Un autre bus s�arr�te carr�ment au milieu de la route pour glaner quelques dinars de plus, ignorant les klaxons des automobilistes qui sont arriv�s derri�re lui. Son ent�tement provoque un embouteillage, situation rapidement d�bloqu�e par le sifflet d�un policier qui lui ordonne de d�marrer. Sur l�autre c�t� de la station de Chevalley, le receveur d�un autocar, � destination de la Place des martyrs, abandonne sa caisse et le paquet de tickets � son coll�gue. �Je sais que tu es en cong�, mais remplace-moi seulement cette fois-ci�, le supplie-t-il. Le jeune receveur �tait accroch� en fait par une discussion �int�ressante � avec une jolie jeune fille, qu�il ne voulait pas laisser partir avant d�obtenir son num�ro de t�l�phone. A quelques pas de l�, Omar, le chef du quai des minibus desservant la localit� de Beni Messous, somme l�un des chauffeurs de prendre son d�part, jugeant qu�il a trop tard�. �Les chauffeurs ne respectent pas le temps qui leur est accord� au niveau de chacun des arr�ts, parce qu�ils ne pensent qu�� ramasser le maximum d�argent�, dira Omar qui affirme travailler comme chef de quai � son propre compte, � d�faut de trouver un autre emploi. �Nous sommes nombreux � exercer, dans l�ill�galit�, ce m�tier. Nous avons sollicit�, vainement et � maintes fois, le directeur de wilaya des transports pour r�gulariser notre situation�, ajoute-t-il, estimant que sa pr�sence �vite les conflits entre les chauffeurs qui se disputent � chaque fois sur les horaires de leurs d�parts. La m�me situation est v�cue au niveau des autres stations de la capitale o� les chauffeurs et les receveurs appliquent leurs propres lois, au vu et au su des autorit�s concern�es. Sur le tron�on de route reliant la station Tafourah � la gare routi�re Sogral d�El Kharrouba, � Hussein Dey, on assiste quotidiennement � des sc�nes de conduite dangereuse de la part des chauffeurs de minibus. Ces derniers, par ent�tement, n�h�sitent pas en fait � mettre la vie de leurs passagers en p�ril sur une route o� voitures touristiques et camions poids lourds sortant du port d�Alger se c�toient, dans l�irrespect du code de la route. On se rappelle tous, il y a pr�s de deux ans, de la course poursuite de deux autocars qui s�est achev�e par un drame. L�un des deux v�hicules avait mal n�goci� un virage au niveau de Bab El Oued et s��tait jet� en mer, d�une hauteur de trente m�tres, avec � son bord une vingtaine de voyageurs. Le drame avait jet� l��moi et suscit�, � l��poque, la col�re de nombreux responsables de la pr�vention routi�re qui ont d�nonc� le comportement irresponsable des conducteurs de minibus. Assez souvent, ces m�me individus exercent leur m�tier sans disposer de la moindre couverture sociale et op�rent avec une flotte des plus v�tuste. En attendant la professionnalisation du m�tier de chauffeur de bus et/ou de taxi, la mise en place d�une v�ritable politique des transports, le citoyen voyage la peur au ventre de ne pas arriver � destination, sain et sauf.