Apr�s avoir connu un rayonnement et une activit� florissante dans les ann�es 1960 et 1970, les salles de cin�ma d�Alger sont tomb�es en d�cr�pitude, au grand dam des cin�philes. Fini les projections en 35 mm, termin� les avant-premi�res suivies de d�bats enrichissants. La projection de films vid�o et de DVD dont les principaux sujets sont la violence, le sexe et le sang a pris le relais, n�attirant plus que des personnes oisives cherchant � tuer le temps. Le r�gne de la vid�o Cin�ma El-Hayet (ex-Midi- Minuit), dans une transversale de la rue Ben-M�hidi. Nous sollicitons l�employ� au guichet qui nous rabroue dare-dare d�cid� � ne piper mot avec essahafa. Nous n�insisterons pas. Cap sur le cin�ma El-Hilal, non loin de la salle El-Mouggar. Le patron est absent, nous dit-on. Un employ� l�chera toutefois quelques maigres informations, mais opposera un niet cat�gorique lorsqu�on lui sugg�rera de nous faire le tour du propri�taire. �Nous programmons trois s�ances quotidiennes dont deux l'apr�s-midi et une en soir�e�, lance-t-il. �Au menu des DVD de films d�action. Ce cin�ma comporte 300 places. Nous vendons 80 tickets par jour environ.� Il est pr�s de 16h. C�est la fin de la premi�re s�ance, quelques couples quittent la salle obscure, en clignant des yeux � cause de la lumi�re du jour� Que pensent-ils du film qu�ils viennent juste de visionner ? R�ponses �vasives� Le film se jouait ailleurs� D�cadence Direction le cin�ma Mitidja (ex- Le Paris), dans une ruelle parall�le � la rue Ben-M�hidi, rue Tancr�de, mitoyenne � l�ascenseur m�canique Grand Hall lugubre. Une petite couverture d�un film vid�o Water�s Esdge en l�occurrence est placard�e � l�entr�e. Nous sommes � une dizaine de minutes de la fin de la projection. Le guichetier prend une pause en attendant la s�ance prochaine pr�vue � 19h. Prix du ticket : 50 DA pour l�orchestre, 60 DA le balcon. Assis sur une chaise, � l�entr�e de la salle de projection, Hassan le g�rant (60 ans) a bien voulu �clairer notre lanterne. �Comme dans toutes les salles g�r�es par les priv�s, nous nous sommes sp�cialis�s dans les films vid�o. La tendance est aux films d�action et de violence, le genre dont le public est friand.� Continuant sur sa lanc�e, il poursuit : �Cela fait 42 ans que je suis dans ce m�tier. Dans les ann�es 1960, les salles de cin� �taient archi-combles.� �On faisait le plein avec de grands films programm�s simultan�ment dans les cin�mas parisiens. Les salles obscures abritaient les avant-premi�res et attiraient les grands noms du septi�me art. L�arriv�e de la parabole dans les foyers a sonn� le glas du cin�ma�, commente-t-il avec une pointe d�amertume. Pendant que nous devisons, les premiers �vid�ophiles � quittent le cin�ma. Certains �mergent c�t� orchestre. D�autres d�valent les escaliers du balcon. Il n�y a que des hommes. Des jeunes et des retrait�s. Le m�me genre, la m�me mise. Mal habill�s, mal ras�s, les cheveux hirsutes, la mine d�confite� l��chine courb�e� comme s�ils portaient toute la mis�re du monde sur leurs �paules. Abord�, l�un d�entre eux, la trentaine, nous dira : �Je viens ici de temps en temps lorsque j�arrive � me d�brouiller les 50 DA du ticket d�entr�e. Je suis au ch�mage et sans aucune qualification. Voir un film me permet de m��vader de mon sombre quotidien��Dans quel �tat se trouve l�ex-Le Paris ? A-t-il conserv� son lustre d�antan ? Nous sommes dubitatifs. Le g�rant d�abord r�ticent � nous laisser y jeter un �il finit par c�der devant notre insistance. A l�int�rieur, un large orchestre, un grand �cran, un �clairage blafard, des fauteuils couleur bordeaux compl�tement �ventr�s, les dalles de sol arrach�es, un plafond l�preux, des emballages de paquets de cigarettes et de chewin-gum par terre� et une affreuse odeur de renferm�. Devant nos grimaces, le g�rant tente d�arrondir les angles : �La peinture est refaite annuellement. Le public se fait rare. C�est pas tout, mais il faut bien payer le loyer !� Inutile de justifier l'injustifiable, ce cin�ma jadis mythique est compl�tement sinistr�. Il n�est pas le seul d�ailleurs. Ces hauts lieux de culture ont �t� transform�s en pizzerias, salles des f�tes, espaces de jeux, fast-food et autres commerces lucratifs. Les g�rants des salles priv�es ne font plus que des projections vid�o. Fini les films en 35 mm. Mort le vrai cin�ma sur grand �cran. Devant ce laisser-aller, les pouvoirs publics ont r�agi. Salles en r�novation Certains cin�mas donn�s en g�rance � des priv�s ont �t� r�cup�r�s par les communes notamment celles d'Alger-Centre et de Sidi- M�hamed. Le cin�ma Afrique, le Casino et El-Kheyam (ex-Debussy) sont actuellement en cours de r�novation. Le Sierra Maestra (Messonnier) a fait peau neuve mais n�a pas encore rouvert. Le cin�ma Ouarsenis (ex-Le Fran�ais), rue Khelifa-Boukhalfa, tomb� en d�cr�pitude est actuellement ferm�, ainsi que la salle Ibn-Khaldoun toujours en r�fection. D�autres cin�mas ont carr�ment �t� ras�s tel Le Camera, rue Belouizdad. Quant � la Cin�math�que d'Alger, rue Ben- M�hidi, elle est close pour des travaux de r�habilitation depuis le 10 mai dernier. Le hic c�est que plus de 5 mois apr�s sa fermeture, les travaux n�ont pas encore d�marr�. Autres salles obscures : l�Alg�ria et l�ABC ont �t� lift�es retrouvant ainsi une seconde jeunesse. �Elles ont �t� r�nov�es par l�APC d'Alger-centre�, nous r�v�le Mohamed Lamarti, directeur de l�Office de promotion culturelle et artistique (OPCA). �Depuis leur r�ception en 2002, l�affluence du public est all�e crescendo. Nous privil�gions les productions nationales qui attirent de nombreuses familles et programmons des films r�cents qui passent souvent sur nos �crans en m�me temps que leur sortie en Europe ou aux Etats-Unis�. Le septi�me art, un domaine qui ne demande qu�� rena�tre de ses cendres � condition de solliciter les bonnes volont�s.