Au lendemain de l'indépendance, la wilaya de Tizi Ouzou comptait plus d'une dizaine de salles de cinéma, dont il n'en subsiste que de lointains souvenirs. Dans son spectacle Le dernier chameau, l'humoriste Mohamed Fellag raconte à travers des yeux d'enfant étonné, son cinéma de quartier à Tizi Ouzou durant les années 1960. Il se rappelle avec nostalgie de l'ambiance des salles de cinéma qui projetaient des films français, américains, égyptiens, italiens, russes et indiens. Ce fut le grand rush vers le grand écran pour découvrir Ava Gardner, Rita Hayworth, Sylvia Koscina, Steve Reeves et autres stars des années d'or du 7e art. Il y en avait pour tous les goûts et les salles ne désemplissaient presque jamais. Au lendemain de l'indépendance, Tizi Ouzou comptait plus d'une dizaine de salles. Un parc cinématographique enviable à l'époque. Aujourd'hui, il n'en subsiste que la salle de la maison de la culture Mouloud Mammeri. C'est la seule infrastructure culturelle qui diffuse des films par intermittence. Mais là aussi, les cinéphiles doivent prendre leur mal en patience car il est rare qu'une projection soit à l'affiche. Le reste du programme est monopolisé par d'autres activités telles que des galas à longueur d'année et des meetings politiques. D'autres organismes étrangers au monde de la culture sollicitent régulièrement les responsables de l'établissement pour y tenir des rencontres. On y a vu même des conclaves des comités de soutien au président de la République lors de la dernière campagne électorale. « C'est vraiment dommage qu'une grande ville comme Tizi Ouzou ne dispose pas de salles de cinéma à l'instar des autres wilayas du pays », fait remarquer amèrement un animateur d'une association culturelle activant au chef-lieu de wilaya. Finies donc les projections en 35 mm, les avant-premières suivies de chauds débats. Les salles de cinéma le Mondial, le Djurdjura, l'Algéria et le Studio qui faisaient jadis la joie des férus du grand écran ont baissé rideau l'une derrière l'autre. Le théâtre Kateb Yacine qui a changé de statut pour devenir officiellement Théâtre régional est toujours en travaux. La salle Le Studio occupée pendant une quinzaine d'années par l'association culturelle Idlès n'est que ruines et désolation. Une ancienne délibération de l'APC avait affecté cette structure à la Protection civile de la wilaya de Tizi Ouzou pour y installer le SAMU. Le projet n'a jamais vu le jour et ce qui restait de la bâtisse se dégrade chaque jour un peu plus. Le Mondial et le Djurdjura sont logés à la même enseigne. Ces deux structures qui programmaient, jusqu'au début des années 1990, des projections régulières attendent une éventuelle réhabilitation après leur transfert vers la direction de la culture. La salle de cinéma le Djurdjura qui a été incendiée lors des émeutes qui ont suivi l'assassinat du chanteur Matoub Lounès en 1998, devait être transformée en musée. Onze ans après, la bâtisse, hermétiquement murée, est laissée à l'abandon. En somme, c'est l'écran noir à Tizi Ouzou au grand dam des nostalgiques des sorties au ciné, qui se rabattent sur la parabole, la vidéo et les DVD.