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Francophonie, nationalit� et insularit� litt�raire (2e partie et fin) Par Abdellali Merdaci*
Publié dans Le Soir d'Algérie le 26 - 02 - 2009

De l�ind�pendance � nos jours, les relations de l��dition fran�aise � et singuli�rement parisienne � avec les auteurs alg�riens se fixent dans le registre d�suet d�un effarant spectacle de montreurs de singes savants : la litt�rature alg�rienne de langue fran�aise n�est tenue que de satisfaire l�imparable curiosit� du fameux notaire de Carpentras, une sorte d�arch�type de lecteur, n� dans les limbes de la classe moyenne fran�aise, �sudiste� par choix, un rien raciste, un rien revanchard � notamment sur le chapitre des anciennes colonies � et dont l�app�tence litt�raire ne s��veille qu�aux proph�tes du malheur alg�rien.
S�ils soul�vent � au mieux � une curiosit� compatissante, ces Alg�riens, qui parlent et �crivent le fran�ais, ne sont toujours pas, malgr� l�onction d�immortalit� de Mme Djebar, re�us dans les acad�mies litt�raires. Le parcours et l�aura des �crivains alg�riens ne sont pas, le plus souvent, mesur�s dans le champ litt�raire parisien � l�aune d�un travail authentique de cr�ation, mais aux �c�urantes gesticulations sur les affaires politiques internes de leur pays. Et Yasmina Khadra parle juste lorsqu�il d�signe � Si Kaddour M�hamsadji les limites d�une r�ception critique du fait litt�raire alg�rien et de ses acteurs par les op�rateurs institutionnels en France et en Europe : �Pour Paris, comme pour l�Europe, pour �tre �cout�, il faut s�inscrire dans la dissidence (�) Pour eux, il faut �tre dissident pour �tre per�u. Ils se fichent royalement de nos arts, de nos talents, de notre �rudition. Les seuls tremplins qu�ils nous proposent sont la prison, les tracasseries avec le pouvoir, si bien que certains de nos intellectuels privil�gient la provocation outranci�re pour choquer, d�clencher des r�actions extr�mes et susciter l�int�r�t� ( L�Expression, 12 novembre 2008). Position lucide, mais cela reste � v�rifier.
2. Une probl�matique double nationalit� litt�raire
Je ne comprends pas que Yasmina Khadra qui pr�sente une analyse pertinente du commerce �troit de l��dition fran�aise avec ses auteurs alg�riens puisse faire, pour son propre parcours d��crivain, de la surench�re. Il est en effet difficile, pour lui comme pour ses compatriotes, de reprocher aux Fran�ais de vivre selon leur volont� leur litt�rature et leurs institutions litt�raires. Mais alors pourquoi Yasmina Khadra, �crivain de nationalit� alg�rienne, de surcro�t ancien officier sup�rieur de l�arm�e alg�rienne et haut fonctionnaire de l��tat alg�rien, revendique-t-il plus d��gards des jurys des prix litt�raires parisiens ? Il y a certainement ici une erreur d�appr�ciation, un malentendu. Et aussi beaucoup de confusion. S�il est admis que l��crivain �crit pour se constituer un lectorat, pr�sent et � venir, il peut para�tre troublant qu�il s�occupe � revendiquer, toute honte bue, gloire et cons�cration de toutes sortes, quand bien m�me il est un champion des ventes en librairie. Il l�est encore plus en France, pour un �crivain �tranger, personnage officiel de l'�tat alg�rien, de faire un mauvais proc�s aux institutions de l'�tat fran�ais qui lui ont tout donn�, du titre de chevalier de la L�gion d'honneur � celui d'officier des Arts et lettres, en sus d'une dizaine de distinctions. Or, aujourd�hui, avec la semblable et implacable f�rocit� jamais assouvie dont t�moigne Yasmina Khadra, les �crivains alg�riens demandent et exigent beaucoup de la France qui ne doit se pr�occuper dans ce domaine de la litt�rature � comme dans beaucoup d�autres � que de ses propres enfants. Ces Alg�riens dont les parents ont hier chass� la France d�Alg�rie, avec les armes et le bulletin de vote, en sont aujourd�hui � user de leur talent pour retourner dans la francit�. Et � en faire leur unique horizon. Lorsqu�ils n�arrivent pas � avoir la nationalit� fran�aise par le mariage ou par quelque compliqu�e op�ration de retour dans la nationalit� d�origine pour les plus �g�s, ils entretiennent volontairement l�ambigu�t� sur leur identit� nationale. Soit ils r�cusent leur nationalit� alg�rienne, soit ils se muent dans une improbable universalit� de l��criture, bradant effront�ment leurs ancrages historiques qui sont paradoxalement leur seule raison d��crire. Je ne suis pas de ceux qui mettent des fronti�res entre les litt�ratures, facteur de rapprochement des peuples et des cultures, mais un �crivain ouigour, croate, colombien, congolais ou alg�rien n�entre potentiellement dans l�universalit� que par sa singularit� locale. Est-ce une des nombreuses avanies des �tudes litt�raires postcoloniales ? Ces derniers mois, j�ai recens� dans les journaux alg�riens pas moins d�une douzaine de d�clarations d�auteurs alg�riens qui raclent jusqu'� l'os cette insolite resuc�e de l�universalit� de l��criture. Cela n�a-t-il pas �t� r�p�t� � l�envi lors d�un colloque estival � Riad El- Feth et plus encore dans les caf�s litt�raires du dernier Sila ? Souvent sentencieusement, dans une emphase toute caricaturale, pour appeler de saines r�parties. La question de la nationalit� des hommes et des femmes de culture originaires d�Alg�rie a �t� ainsi r�cemment pos�e en des termes forts par le romancier Salim Bachi, d�non�ant un �d�ni d�identit� ou de nationalit� aux artistes alg�riens expatri�s ( El Watan Arts & Lettres, 26 octobre 2008). S�il faut d�noncer sur cette question sensible la tentation de l�exclusion, il faut aussi pouvoir en parler, sans �tre diabolis�. C�est d�sormais un fait �tabli que des �crivains alg�riens, lorsqu�ils arrivent � poser un pied dans le Quartier latin, sont plus soucieux de tourner la page de leur pays. Ni l�int�grisme sanglant, ni l�irr�ductible dictature du groupe politique issu de la guerre d�ind�pendance, ni la m�diocrit� des institutions alg�riennes, ni la hogra, ne peuvent expliquer et justifier un abandon de la nationalit� alg�rienne, en dehors de la recherche d�un confort personnel �go�ste. N�y a-t-il pas plus d�honneur chez les footballeurs alg�riens qui s�expatrient pour rechercher une fortune sereine, sans en payer l�inexpiable ternissure du reniement, que chez des intellectuels infatu�s, honteux qu�teurs d'am�res provendes ? Il y a en v�rit� ici un inextricable probl�me d�appartenance � une litt�rature et � une culture nationales. La litt�rature fran�aise, qui constitue sans doute un ph�nom�ne majeur de la litt�rature mondiale, ne peut appartenir qu�� la France et aux seules personnes qui la choisissent sereinement comme leur pays. Il en va ainsi pour l�Alg�rie et pour sa litt�rature, quand bien m�me elle reste une litt�rature mineure. Il n�est pas indiff�rent de ce point de vue d�observer que beaucoup d��crivains des ann�es 1950-1960, Fran�ais par leur mariage, p�re d�enfants fran�ais, faisant une carri�re fran�aise, soient rest�s jusqu�au bout dans la nationalit� litt�raire alg�rienne. La nouvelle g�n�ration d��crivains n�a pas ces pr�venances : plusieurs �crivains, certains form�s dans le vivier de la d�funte Enal, n�h�sitent plus � d�cliner leur nationalit� fran�aise en quatri�me page de couverture de leurs ouvrages. Ils restent libres de leur choix et il est l�gitime que leur �uvre soit inscrite dans le patrimoine litt�raire de leur nouveau pays d�adoption. Mais il est tout � fait ind�cent qu�ils puissent jouer sur la double nationalit�. Il n�y a qu�une litt�rature fran�aise et qu�une litt�rature alg�rienne ; il ne saurait, dans les limites d�un juridisme excessif, exister de double nationalit� litt�raire.
3.Une n�cessaire d�colonisation de la litt�rature alg�rienne
Cette course effr�n�e des �crivains alg�riens vers un ailleurs, la nationalit� fran�aise et cet impensable avatar de l�universalit�, ne cache-t-elle pas un malaise d��tre dans une position et un statut ind�cidables dans leur propre pays et dans leur identit� juridique ? Voil� donc une autre forme de harga, il est vrai moins pr�judiciable pour l�image du pays. Cette d�saffection d'�crivains � leur repli d�sesp�r� et leur fuite �perdue � reste-t- elle paradoxale si on la rapporte � ce qui a fondamentalement chang� cette derni�re d�cennie. Jamais en effet la langue fran�aise n�a �t� aussi massivement diffus�e, lue et parl�e en Alg�rie, favorisant un nombre important de nouveaux �crivains et aussi de respectables contingents de lecteurs. Ces remarquables acquis se trouvent, en partie, compromis par un retard structurel de l��dition et de la diffusion, au moment o� la critique et les instances acad�miques tardent � se mettre en place. L'Alg�rie devrait pourtant pouvoir assurer les conditions d'une v�ritable vie litt�raire pour tous ses �crivains et dans toutes ses langues. Peut-on r�ver d�un �crivain alg�rien de langue fran�aise qui imposerait son �uvre non plus � partir de Paris, mais d�Alg�rie ? N�est-il pas temps de plaider pour la d�colonisation de la litt�rature alg�rienne, en fondant son autonomie, en modelant ses institutions et en ouvrant la voie aux n�cessaires comp�titions et gratifications de carri�re en Alg�rie. L��tat, soutenu par les associations civiles, peut encourager les m�tiers de l��dition, de la diffusion et de la librairie, et surtout promouvoir la lecture � travers ses nombreux �tablissements scolaires. Des solutions existent pour donner � beaucoup de cr�ateurs actuels et � venir le d�sir de vivre intens�ment une carri�re d'�crivain dans leur pays, sans cette indicible souffrance et ce d�saveu humiliant de leur art qui les en �loigne. Le travail remarquable de d�couverte de jeunes talents de la Fondation Mohammed Dib, le Prix Apul�e et celui des libraires, cr�� lors du dernier Sila, inscrivent d�j� l�incontournable pr�sence de l�auteur et de l��criture dans notre soci�t�. Ils devraient asseoir une s�re tradition dans le champ litt�raire alg�rien. Je me souviens que Waciny Laredj avait sugg�r�, il y a quelques ann�es, la cr�ation d�un grand prix litt�raire alg�rien. Ce serait une premi�re approche, en attendant bien d'autres. Ce prix qui valorisera indistinctement toutes les expressions litt�raires alg�riennes, au-del� de leur v�hicule linguistique, ne relevant pas de l�initiative de l'�tat, est n�cessaire. Les �uvres d'authentiques �crivains alg�riens, qui n�auront pas � se cacher derri�re ce lamentable cache-sexe de l'universalit�, qu�elles portent l�estampille d�un �diteur alg�rien ou �tranger, ne recevraient alors leur toute premi�re cons�cration que de leurs lecteurs alg�riens. Et ensuite, s'ils en ont le talent, du reste du monde. Aucun �crivain alg�rien n�a le droit de dire qu�il �crit pour les Alg�riens, s�il n�a que le seul souci d�une carri�re parisienne, plus dans l'ambigu�t� � et souvent l�indignit� � que dans la clart�. Face au spleen parisien d�un Yasmina Khadra, il serait utile de dire qu�il y a plus de m�rite pour un �crivain de qualit� d��tre un Naguib Mahfouz, au Caire, qu�un produit d�acculturation dans une capitale �trang�re, fusse-t-elle celle de la francophonie.
A. M.
*�crivain-universitaire.
Dernier ouvrage paru : Alg�rie, une suite allemande, M�dersa, 2008.


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