La RN6 reliant B�char � Adrar est ferm�e � la circulation depuis cinq jours. Les usagers de la route voulant rallier Adrar sont dans l�obligation de faire un d�tour par les wilayas de Na�ma, El-Bayadh, Laghouat et Gharda�a, soit un trajet de 1800 km au lieu des 600 pr�vus. Finalement la bonne nouvelle tant attendue parvient aux oreilles de quelques �aventuriers� qui saisissent cette opportunit� et s�engagent. Au niveau du passage de l�oued Foum Lekhneg, la voie est colmat�e et le courant trop fort emp�che et g�ne consid�rablement les travaux. Mais l�enjeu est grand. Il faut r�tablir la circulation : ceci dure depuis cinq jours. Le cinqui�me jour, aux environs de 16h, l�obstacle est lev� et le trafic reprend progressivement et finit par s�arr�ter au bout de quelques heures soit � 22h. La digue a c�d� entra�nant des d�g�ts importants. Des bus bond�s arrivent aux alentours de 22h30. Dehors, il commence � faire froid et les rares personnes qui se sont aventur�es � l�ext�rieur ont vite fait de remonter dans le bus. Des familles enti�res, des b�b�s, des personnes �g�es sont bloqu�es et ne peuvent rien faire sinon attendre. Une attente qui risque d��tre longue. Certains voyageurs viennent d�Oran. Ils ont d�j� parcouru plus de 1000 km et esp�raient rentrer chez eux et dormir dans leurs lits. D��us, ils se contenteront du si�ge du bus, les jambes pli�es et en compote. Dehors, seul le grondement des eaux en furie se fait entendre. Pensant que la route ouverte le cinqui�me jour �tait en bon �tat, nous d�cidons de rallier Adrar le jour suivant. Afin d��viter de rouler en d�but d�apr�s-midi, nous d�marrons un peu t�t. A 6h, les �toiles scintillent et semblent annoncer une bonne journ�e. Nous nous lan�ons jusqu�� Kerzaz, soit 350 km, point d�encombres. L�, on nous apprend que la route est encore interdite � la circulation et que dans deux heures, le trafic allait �tre r�tabli. Nous continuons et arrivons, 70 km plus loin, � Foum Lekhneg, � la fronti�re entre B�char et Adrar. Une fois sur place, nous nous dirigeons vers la jet�e et constatons que ces eaux en furie ont occasionn� des d�g�ts consid�rables. Deux �normes br�ches b�antes emp�chent tout trafic. Un travail colossal. M. Daoud, directeur des travaux publics d�Adrar, casquette viss�e sur le cr�ne, est l�, arpentant sans cesse cette jet�e et r�fl�chissant comment venir � bout de ce gouffre que l�offensive des eaux ne veut pas abandonner. Chargeurs, gros camions, niveleuse, hommes d��quipe, tous sont mobilis�s. Les travaux ont d�but� au petit jour et remplir cet �norme foss� de blocs de pierre n�est pas t�che ais�e. La pierre, il faut la chercher � 20 km plus loin. Arrivent les gros camions charg�s de roches de plusieurs tonnes et les d�versent dans la zone b�ante qui finit par les engloutir. Il faut sans cesse r�p�ter l�op�ration. Les camions sont oblig�s d�effectuer le passage de la jet�e en marche arri�re, impossible de tourner : ce qui rend le travail et l�intervention plus difficiles et plus risqu�s. Le ballet de ces engins ne s�arr�te pas et M. Daoud est toujours l�. Finalement un petit passage destin� aux pi�tons est gagn� et on fait signe aux voyageurs des bus gar�s de chaque c�t� d�effectuer la travers�e. Lourdement lest�s, tra�nant des enfants en bas �ge, les voyageurs entament le p�riple aid�s par les gendarmes de la brigade gendarmerie de Charouine, des �l�ments de la Protection civile et des agents de la DTP qu�il faut f�liciter au passage. Puis, de nouveau, le trafic est arr�t� pour laisser place au chargeur de d�placer ces lourds blocs de pierre. Des deux c�t�s de la berge, les gens s�impatientent, certains sont l� depuis la veille, d�autres viennent de d�couvrir ce qui se passe. Le voyage ne d�passant gu�re les 4 heures de trajet, ils n�ont pas pr�vu de provisions. Il est un peu plus de 14h, le pain et l�eau viennent � manquer et il n�est pas rare de voir quelques passants les qu�mander. Pourtant, les APC de Kerzag, Charouine, Ouled Khode�r ne sont pas tr�s loin et personne n�a lev� le petit doigt ou pens� � venir � la rescousse de ces voyageurs. D�j�, deux jours auparavant, certains automobilistes ont carr�ment rebrouss� chemin et fait la boucle en passant par Gharda�a, soit 2000 km. L�apr�s-midi, il fait chaud et le soleil tape fort. Une solidarit� exemplaire anime les voyageurs et un sac de dattes fut distribu�, de quoi calmer un peu la faim ! Le m�me sc�nario se reproduit � chaque fois que les pluies s�abattent sur la r�gion de B�char. Elles entra�nent irr�m�diablement des l�chers d�eau au niveau du barrage de Djorf Torba � Abadla mais �galement celui de l�oued Guir situ� au Maroc. Cette offensive des eaux creuse la berge et �tend � chaque fois le lit de l�oued Foum Lekhneg, ce point de passage de la RN6. Il est urgent de saisir le taureau par les cornes et de pr�coniser la solution appropri�e qui permettrait aux usagers de la route de ne point redouter le ciel gris. La voie fut ouverte � 19 h.