Le président de la République de Turquie, Recep Tayyip Erdogan, est arrivé hier soir à Alger, dans le cadre d'une visite officielle, à l'invitation de son homologue Abdelaziz Bouteflika. D'une haute valeur économique, cette visite intervient dans un contexte de crise économique en Algérie, en raison de la chute des prix du pétrole qui ont repris timidement ces derniers mois. Selon un communiqué de la présidence de la République, les entretiens qui se dérouleront entre les deux chefs d'Etat et les travaux entre les délégations des deux pays «permettront à l'Algérie et à la Turquie de partager leurs analyses de la situation régionale et internationale, notamment au Moyen-Orient, au Maghreb et au Sahel». Les discussions qui auront lieu entre les membres des deux délégations ainsi que le Forum d'Affaires qui se tiendra aujourd'hui et regroupera un grand nombre d'entreprises algériennes et turques, ne manqueront pas de donner un élan accru aux échanges et aux partenariats entre les économies algérienne et turque. Dans cette conjoncture économique difficile pour le pays, Recep Tayyip Erdogan a affiché la disponibilité de son pays à aider l'Algérie. «Nous sommes conscients de tous les défis économiques qu'affrontent l'Algérie en raison de la chute des prix de l'énergie. Nous sommes prêts à accorder tout le soutien qu'il faut pour dépasser ce problème», a-t-il déclaré dans une interview accordée, hier, au quotidien national Echorouk, affirmant que l'Algérie figure parmi les plus grands partenaires commerciaux de la Turquie en Afrique. «Presque 1 000 entreprises turques travaillent en Algérie. Elles sont parmi les plus grands investisseurs étrangers avec un volume de 3,5 milliards dollars. Les autorités algériennes elles-mêmes disent que ces entreprises assurent le plus grand nombre d'opportunités d'emploi. Et je pense que nos relations économiques, qui s'expriment déjà dans les secteurs du commerce, de l'investissement, de l'entrepreneuriat, du tourisme et du tourisme sanitaire, vont se développer davantage. En ce sens, nous devons préparer tous les accords qu'il faut», a-t-il dit, plaidant la nécessité de signer un accord sur la protection des investissements «qui est resté en négociation depuis longtemps», selon lui. Le Président turc est allé jusqu'à critiquer certaines dispositions relatives à l'investissement en Algérie. «Le dispositif des quotas et des licences d'importation en Algérie influe négativement sur nos relations commerciales. Ces mesures font que l'Algérie importe plus cher les produits dont elle a besoin de l'Union européenne au lieu de la Turquie (...) Nous sommes prêts à fournir ces marchandises en meilleure qualité, avec des prix plus bas. Aussi, la suppression rapide de ce dispositif (quotas d'importation) va contribuer grandement à augmenter le volume des échanges commerciaux entre nos deux pays», a-t-il affirmé, en appelant les autorités algériennes à assouplir les conditions d'obtention de visas par les citoyens et hommes d'affaires turcs. Près de 800 entreprises turques Les relations économiques entre l'Algérie et la Turquie enregistrent, depuis ces dernières années, une dynamique particulière à travers des partenariats industriels multisectoriels et un renforcement des échanges commerciaux. Les deux pays auront l'occasion, à la faveur de la visite officielle de Recep Tayyip Erdogan, d'identifier les voies et moyens permettant de développer davantage leur coopération économique en vue de la hisser au niveau de l'excellence de leurs relations politiques et d'amitié. Lors de l'audience qu'il avait accordée jeudi dernier à Ankara au ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, le président turc avait fait part de sa satisfaction quant à la qualité des relations qu'entretiennent l'Algérie et la Turquie, qui sont marquées par une «volonté commune, au plus haut niveau, de les renforcer davantage au bénéfice des deux pays». A la faveur de cette visite, une réunion de la Commission mixte bilatérale va se tenir pour concrétiser des actions de partenariat et de coopération et donner une impulsion nouvelle aux relations bilatérales, notamment dans les domaines du tourisme, de l'agriculture et des énergies renouvelables. Force est de constater que la coopération économique algéro-turque se diversifie de plus en plus en vertu d'accords de partenariat dans les secteurs industriel (textile, sidérurgie…), énergétique, de transport maritime et du bâtiment dont certains ont été réalisés. Actuellement, 796 entreprises turques activent en Algérie et emploient plus de 28 000 personnes. En matière d'investissements enregistrés en 2017 auprès de l'Agence nationale du développement de l'investissement (ANDI), la Turquie a occupé la première place des investissements mixtes en terme de nombre et de montant de projets avec plus de 20 projets d'investissements d'un montant global de plus de 200 milliards de DA devant générer près de 6 000 emplois. Textile : un secteur porteur Le secteur du textile est l'un des domaines les plus porteurs dans le partenariat algéro-turc. Actuellement, le marché algérien est inondé par les produits turcs importés, mais un projet de partenariat doit changer la donne. Une usine de filature de coton devra entrer en production dans les prochains mois à Relizane dans le cadre d'un partenariat entre les deux pays. D'une capacité de production de 9 000 tonnes/an, cette usine fait partie d'un projet de complexe composé de 8 usines de production intégrée appartenant à la joint-venture Tayal formée de deux filiales du Groupe public national de textile Getex, du holding Madar (ex-Snta) et de l'entreprise turque Intertay. Outre cette usine de filature, ce complexe sera composé d'usines de tissage, de traitement, de confection, de bonneterie, et d'ennoblissement de tissus, soit le finissage, le blanchiment et la teinture. Le projet comporte deux étapes: la première, qui se terminera d'ici à fin 2018, porte sur la réalisation de huit (8) usines totalement intégrées, d'un centre d'affaires et d'une école de formation en métiers de tissage et de confection avec une capacité d'accueil de 500 stagiaires par session. Toujours dans le secteur du textile, un protocole d'accord a été signé entre l'entreprise publique nationale Texalg et la société turque Boyner Sanayi A.S, pour la création d'une joint-venture de production de filés de laine et d'autres produits textiles à Meskiana (Oum-El Bouaghi). L'usine sera dotée d'une capacité de production de 1000 tonnes/an de filés laine et mélanges (laine, polyester, acrylique) dans une première phase puis 2000 t/an la deuxième année et 3000 t/an l'année suivante.