Bien sûr, personne n'attend de Djamel Ould Abbès qu'il reproche à quelqu'un de proposer un cinquième mandat pour Abdelaziz Bouteflika. Et sur le fond, il... ne l'a reproché à personne. Si le truculent Baha Eddine Tliba, accessoirement député d'Annaba mais bien plus que ça dans la vraie vie, est un habitué du spectacle «interne», il est tout de même assez roublard et trop près de «son affaire» pour s'aventurer dans une initiative qui pourrait compromettre sa carrière, dont il connaît par ailleurs la fragilité. C'est qu'au FLN et dans les prolongements du pouvoir, on ne s'embarrasse pas de sentiments à l'heure des grands enjeux. Si un mentor et inspirateur Saadani qui plus est, a occupé des postes de responsabilité politique à des niveaux d'un autre rang, a été laissé sur le carreau bien avant que ne soient entamées les grandes manœuvres, on ne va pas s'encombrer avec Tliba. En plus de traîner ses propres casseroles qui ne sont déjà pas négligeables, le député d'Annaba est lesté par l'héritage de son promoteur, momentanément en disgrâce. Roublard mais manquant tout de même de finesse – on allait dire de discipline – Tliba s'est donc lancé dans une «coordination nationale pour un cinquième mandat de Abdelaziz Bouteflika» où l'ombre de Saadani était trop visible pour ne pas déclencher l'alerte chez Ould Abbès à qui on ne la fait pas sur les choses sérieuses. Du coup, il est devenu difficile de savoir si la manœuvre d'Annaba relevait d'une tentative d'opérer un putsch contre Ould Abbès sous le voile d'une initiative anticipée sur 2019 ou le contraire. Mais dans les deux cas, Ould Abbès, qui veille au grain, a les coudées franches pour contrer l'attaque. Dans un cas, il a tout à fait la latitude d'enclencher le dispositif statutaire du parti pour neutraliser les manœuvriers. Dans l'autre, il peut toujours se donner le beau rôle, qui consiste à placer le président de la république au-dessus de ces contingences et n'envisager ce genre d'entreprise que si elle est l'émanation de sa libre décision personnelle. En l'occurrence, il n'a peut-être même pas besoin de préciser que le FLN se jettera corps et âme dans la bataille, tellement ça relève de l'évidence. Même si Ould Abbès, sans doute par crainte d'être débordé par d'autres initiatives du genre, sur lesquelles il n'aurait pas d'emprise organique, a pris les devants. A Abdelaziz Ziari qui déclarait que «personne n'a le droit de parler au nom du président de la répubique, il a répliqué rapidement et sèchement, alors que ni le lieu ni l'occasion ne s'y prêtait : «Le FLN est autorisé à parler au nom du président de la république, président du parti» ! Le message est clair : on attend mais on ne laisse personne nous dépasser.