Présenté comme un projet «consensuel» par le ministre de la Santé, le projet de loi sanitaire n'a pas fait l'unanimité ni auprès des députés ni auprès de la corporation de la santé, et pour cause les détracteurs dénoncent «la fin de la gratuité de la médecine, l'approfondissement des inégalités d'accès aux soins» et la «transformation de la loi sur la santé en code pénal». En effet, le projet de loi sur la santé a été remodelé puisque 14 articles ont été amendés et 35 supprimés. Si le ministre de la Santé a tenté de rassurer les députés au sujet de la gratuité des soins en signalant que «la gratuité des soins est une ligne rouge infranchissable», il n'en demeure pas moins que des doutes subsistent à ce sujet. Pour le président du Snpsp, Lyes Merabet, le texte est confus : «Cela nous mène à nous poser maintes interrogations, sachant que la Constitution a bien déterminé le concept de la gratuité des soins et son champ d'applications.» Au moment où le mouvement des médecins résidents se radicalise, après plus de cinq mois de grève ouverte, la revendication principale des ces derniers, soit l'abrogation du service civil, est passée à la trappe. D'ailleurs, le ministre de la Santé a déclaré qu'«il est hors de question d'abroger le service civil qui reste, selon les lois de la République, une obligation qui garantit l'accès aux soins sur tout le territoire national, mais nous améliorerons encore les conditions d'affectation et d'installation des futurs spécialistes». Concernant la question du financement des soins, les nouvaux articles stipulent qu'ils seront à la charge des collectivités locales. Comment s'opérera ce financement ? D'où proviendront les fonds des collectivités pour financer les structures sanitaires ? Des questions qui restent en suspens pour le moment, car le texte de loi n'apporte aucun élément de réponse à ce sujet. Aussi, les débats au niveau de l'APN ont porté sur le partenariat entre le secteur public et privé. Pour certains députés, c'est, en réalité, le financement du secteur privé à travers les fonds de l'Etat et les deux secteurs sont placés sur un pied d'égalité, rendant les soins un luxe pour de nombreux algériens et détruisant ainsi la Caisse nationale des assurances sociales des travailleurs salariés (CNAS). Concernant l'épineuse question de l'interruption de grossesse, le nouveau projet de loi sanitaire a supprimé l'article 81, qui permet à la femme d'interrompre sa grossesse si l'embryon ou le fœtus sont atteints d'une maladie, ou d'une malformation grave ne permettant pas son développement viable. Un autre article (82) explique qu'il peut y avoir une interruption thérapeutique de la grossesse si l'équilibre physiologique ou psychologique et mental de la mère est gravement menacé. Estimant que les personnes âgées ont besoin d'une meilleure prise en charge, malgré l'article 91-92 qui porte sur leur protection, le président du Snpsp a encouragé la création d'une spécialité de gériatrie pour leur assurer des soins appropriés. Pour de nombreux élus «le texte est truffé de non-dits. Il doit être carrément retiré et reformulé de fond en comble, et ce, en concertation avec des professionnels de la santé». Enfin, le projet de loi sanitaire va être soumis au vote lundi prochain à l'APN.