Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) entamera demain les travaux de son congrès extraordinaire, sanctionnant le processus d'unification entre ce parti islamiste et le Front du changement (FC) d'Abdelmadjid Menasra. Ce dernier parti est issu d'une déchirure du MSP en 2009 et scelle avec le congrès de demain son retour définitif dans le giron de la formation mère. Après donc une présidence tournante de six mois entre le président du FC et celui du MSP, Abderrazak Makri, la place est cédée à la compétition pour le contrôle du plus important parti islamiste. Et M. Makri qui va solliciter un nouveau mandat auprès des congressistes ne risque pas d'avoir pour rival le patron du FC qui, lui, n'a affiché aucune ambition de présider le parti. Il a toutes les chances de se confronter plutôt à Bouguerra Soltani, ancien président du parti durant le règne de qui le FC était né et qui conteste ouvertement la ligne politique de sa formation sous Makri. Au sein de cette formation, on est en présence de deux courants qui se revendiquent chacun de l'héritage de Mahfoud Nahnah, père spirituel du MSP : ceux qui estiment que la place du parti est dans l'opposition, menée par l'actuel président, et ceux qui pensent qu'il doit revenir au giron du gouvernement, conduit par l'ancien patron du parti. Entre les deux courants, le courant passe certes du moment qu'il n'y a aucune scission ni mouvement de redressement, mais il passe mal. Jusqu'à présent, Makri et ses partisans ont réussi à imposer leur vision, non pas par la force mais lors de choix tranchés par les instances du parti, en maintenant le MSP dans l'opposition. A partir de ce congrès, si ses adversaires venaient à être sacrés par les congressistes, les choses vont changer et le parti offrira au plus vite ses services au pouvoir. Et ce ne serait pas une surprise que le MSP adopte des positions diamétralement opposées à celles d'aujourd'hui. En tout cas, Bouguerra Soltani, nostalgique des années de participation au gouvernement dans le cadre de l'alliance présidentielle, avance à visage découvert, ne cachant pas son intention de replacer le parti dans le giron du pouvoir. «Depuis notre sortie administrative du club des grands en 2011, on a été déclassés à l'échelle politique, en passant de la division supérieure des professionnels au bas du classement, ce qui nous a obligés à jouer avec de petits amateurs qui portent leurs partis dans des sacs à main», avait-il regretté récemment. La division supérieure dans laquelle Soltani veut faire jouer le MSP est, à ses yeux, celle où évoluent le FLN et le RND, tandis que celle des amateurs est celle où se trouve actuellement le parti, à côté du RCD, Talai El Houriyett, El Islah... En 2011, en effet, à la veille des élections législatives de 2012, sous la conduite du même Soltani, dans le sillage de ce qui est appelé le printemps arabe, le MSP s'était retiré de l'alliance présidentielle pour rejoindre une autre alliance des partis de l'opposition. M. Soltani n'est pas satisfait de ce passage d'un camp à un autre. «Je sais que beaucoup de fils du mouvement ne sont pas satisfaits du bilan présent et ont peur de l'avenir à cause de l'écart creusé entre ce qu'ils espèrent et ce qu'ils font. Cela leur a fait perdre leur habituelle volonté et tué en eux l'esprit militant. Ils ont beaucoup hésité devant le discours au niveau élevé et les résultats maigres obtenus à chaque consultation», s'est-il indigné. Et de s'interroger : «Quelle est la différence entre le bilan du parti dans l'opposition et son bilan lors de sa participation au gouvernement ? Quel est le prix payé lors des deux étapes ? Quelle est la voie la plus indiquée pour atteindre l'objectif et quelle est la voie la plus coûteuse ?»