Alors que le Mouvement de la société pour la paix (MSP) poursuit les préparatifs de son congrès extraordinaire, prévu entre le 10 et le 12 mai prochains, son ancien président, Aboudjerra Soltani, opère une sortie surprenante, tentant d'imposer le débat sur la ligne politique du parti après le congrès. Dans une déclaration publiée hier sur sa page Facebook, Soltani a critiqué le bilan de sa formation, depuis notamment l'arrivée de Abderrazak Makri à sa tête et sa position dans l'opposition radicale. Nostalgique des années de participation au gouvernement dans le cadre de l'alliance présidentielle, l'ancien président du MSP veut faire revenir le parti dans le giron du pouvoir. «Depuis notre sortie administrative du club des grands en 2011, on a été déclassés à l'échelle politique, en passant de la division supérieure des professionnels au bas du classement, ce qui nous a obligés à jouer avec de petits amateurs qui portent leurs partis dans des sacs à main», a écrit M. Soltani. En 2011, en effet, à la veille des élections législatives de 2012, sous la conduite du même Soltani, dans le sillage de ce qui est appelé le printemps arabe, le MSP s'est retiré de l'alliance présidentielle. Dans les pays touchés par ce printemps, les partis islamistes avaient remporté les élections. Ce qui avait ouvert l'appétit du MSP qui, en quittant l'alliance présidentielle, s'est investi dans une autre alliance avec deux autres partis de la même mouvance. Soltani n'a pas évoqué la mésaventure de l'alliance en 2012, préférant mettre les projecteurs sur la future alliance contractée par le parti à l'ère de Makri avec les membres de la CLTD et de l'ICSO, dont certains n'avaient et n'ont toujours aucune assise populaire. Mais Soltani qui semble avoir regretté le choix fait en 2011 se bat depuis quelques années pour le recadrage de la position du MSP. Si jusqu'à présent toutes ses tentatives sont vouées à l'échec, réussira-t-il à revenir par la grande porte à l'occasion du prochain congrès ? En tout cas, il tente d'orienter les congressistes : «Je sais que beaucoup de fils du mouvement ne sont pas satisfaits du bilan présent et ont peur de l'avenir à cause de l'écart creusé entre ce qu'ils espèrent et ce qu'ils font. Cela leur a fait perdre leur habituelle volonté et tué en eux l'esprit militant. Ils ont beaucoup hésité devant le discours au niveau élevé et les résultats maigres obtenus à chaque consultation», souligne-t-il dans sa déclaration. Et de s'interroger : «quelle est la différence entre le bilan du parti dans l'opposition et son bilan lors de sa participation au gouvernement ? Quel est le prix payé lors des deux étapes ? Quelle est la voie la plus indiquée pour atteindre l'objectif et quelle est la voie la plus coûteuse ?» Pour lui, il faut avoir les réponses à ces questions avant l'organisation du congrès extraordinaire du parti afin de fixer clairement sa ligne politique, choisir les hommes qui vont l'exécuter, son discours et ses instruments. «J'appelle à trancher profondément la question avant d'entrer dans la course aux élections présidentielles prévues au 2e trimestre de l'année prochaine, car après cette date, la route nationale sera à voie unique. Ce sont les alliances demandées aujourd'hui qui détermineront les positions officielles de demain», a-t-il lancé dans une sorte de déclaration de candidature au poste de président du parti. «Dans la politique comme dans la guerre, celui qui sera le premier à occuper le terrain dictera ses conditions à ceux qui viendront après», a-t-il ajouté. Aboudjerra Soltani appelle à tirer les expériences passées du parti en rappelant ses positions lors des quatre dernières élections présidentielles : l'adhésion en 1999, présentation d'un candidat en 2004, soutien du 3e mandat en 2009 et boycott en 2014. Contacté pour avoir sa réaction à la sortie de M. Soltani, le président du MSP, Abderrazak Makri, a préféré calmer le jeu. «Je vous assure que tout va bien au sein du parti. Il n' y a aucun problème», a-t-il répondu. A souligner que le congrès extraordinaire du MSP est convoqué dans l'objectif de parachever la fusion avec le Front du changement (FC) de Abdelmadjid Menasra et soigner une fracture qui avait atteint le parti. Le FC était né en 2009 d'une déchirure profonde au sein du MSP du temps où régnait justement Aboudjerra Soltani.