Le bateau du cinquième mandat prend eau de toutes parts. C'est le moins que l'on puisse dire, vue la vitesse à laquelle vont les évènements. La contestation, qui reste cantonnée jusque-là dans les milieux populaires et estudiantins, s'est étalée aux différents corps de la magistrature, qui constituent une des épines essentielles du pouvoir qu'est le pouvoir judiciaire. Ce matin en effet, les juges et les greffiers relevant de différentes structures du secteur de la justice de la wilaya de Béjaïa, ont observé des sit-in dans l'enceinte même des tribunaux. En compagnie de nombreux avocats affiliés au bâtonnat, juges et greffiers, ainsi que tous les fonctionnaires travaillant dans les tribunaux, ont manifesté leur solidarité avec le peuple, non sans exiger l'indépendance de la justice. «L'indépendance de la justice est une revendication populaire, il faut la concrétiser en urgence», lit-on sur une des multiples banderoles déployées par les juges au niveau de la cour de Béjaïa. Les avocats, pour leur part, ont tenu à montrer toute leur solidarité aux juges et aux greffiers, qu'ils considèrent de la même famille. «Les juges, les greffiers et les avocats appartiennent à la même famille», ont scandé en chœur les protestataires. Le sit-in, qui s'est déroulé dans le calme, a toutefois été émaillé par un incident lorsque Merzoug Touati, le jeune blogueur qui vient d'être libéré après avoir purgé une peine de deux ans de prison, a fait son apparition devant les juges. Ayant reconnu le magistrat qui avait prononcé contre lui une lourde peine de prison en mai 2018, le désormais célèbre blogueur s'en est pris à lui, en le dénonçant publiquement devant ses pairs et les nombreux citoyens présents sur les lieux. «Voici le juge qui m'a condamné. C'est le juge qui obéit aux injonctions, je le reconnais, c'est lui», criait Merzoug Touati, avant d'être ramené à la raison par les avocats.