Le journaliste marocain Ali Anouzla, directeur du journal électronique Lakome, arrêté le 17 septembre dernier à la suite de la diffusion par son site d'une vidéo attribuée à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a été auditionné mardi par le juge d'instruction chargé des affaires de terrorisme près l'annexe de la Cour d'appel à Salé (ville jumelle de Rabat), a-t-on indiqué de sources judiciaires. Au cours de l'audition, le juge d'instruction lui a notifié les chefs d'accusation pesant sur lui alors que la défense a requis la liberté provisoire pour le journaliste, a-t-on précisé de mêmes sources, ajoutant que le procès a été reporté au mercredi 30 octobre. La justice marocaine poursuit Ali Anouzla pour trois chefs d'inculpation principaux, à savoir "l'assistance à des criminels ayant commis des actes de terrorisme", "la fourniture de moyens pour la commission d'actes terroristes" et "l'apologie de crimes terroristes". Ali Anouzla est actuellement défendu par un seul avocat, Me Hassan Semlali après le retrait lundi soit la veille du procès, du collectif de ses avocats respectivement Maitres Abderrahim Jamai, Abderrahmane Benameur, Khalid Sefiani et Naima Guellaf. Ces derniers avaient publié un communiqué soulignant notamment qu'"en raison des derniers développements dans l'affaire Ali Anouzla relayés par les médias, et afin de sauvegarder la cohérence de la défense et après qu'un avocat ait rejoint l'affaire en dehors des règles et usages de la profession d'avocat, nous avons décidé de (nous) retirer de l'affaire". Avant ce retrait du collectif d'avocats, Ali Anouzla avait annoncé, le 14 octobre dernier, la suspension provisoire du journal électronique "Lakome" en raison de l'"impossibilité pour lui d'assumer la responsabilité morale et juridique de ce qui est publié sur le site". Outre le Comité national de solidarité avec Ali Anouzla composé de militants des droits de l'Homme, des journalistes, d'avocats et de membres de la société civile exigeant sa libération, l'arrestation du directeur de Lakome a suscité plusieurs réactions en dehors de Maroc notamment des ONG internationales. Reporters Sans Frontières (RSF) a réclamé la libération "immédiate" considérant que la diffusion de la vidéo avait un "but purement informatif", tandis que Human Rights Watch (HRW) avait appelé les autorités marocaines à libérer le journaliste soulignant qu'à l'instar des journalistes du monde entier, "c'est son travail de rapporter ce qu'Al-Qaïda et ses affiliés déclarent et font". De son côté, Amnesty International a appelé dans un communiqué à sa libération, estimant qu'il s'agissait d'un "prisonnier d'opinion détenu uniquement pour avoir exercé son métier de journaliste". La vidéo attribuée à Aqmi est intitulée "Maroc : le royaume de la corruption et du despotisme", selon Lakome. Cette vidéo, qui appelle au jihad et fustige la monarchie marocaine, a depuis été supprimée par Youtube pour non-respect des règles en matière de "violence". Lakome est un site indépendant qui est publié en versions arabe et française. Il fonctionne avec une équipe réduite se concentrant sur l'actualité politique marocaine.