Il n'y a que le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales qui, en bon élève en termes de communication, donnait le bilan des postulants ayant retiré les formulaires de souscription de signatures. Le peuple rejette l'élection présidentielle du 4 juillet. Les partis politiques aussi. Mais, contre vents et marrées, les tenants du pouvoir en place s'entêtent. Le maintien de cette échéance à la date fixée ressemble ainsi à un coup de force contre la volonté populaire qui s'exprime chaque jour, à plus forte raison tous les vendredis. Hier en fin de journée, à quelques heures de la clôture du délai de dépôt des déclarations candidatures auprès du Conseil constitutionnel, l'ambiance n'était pas à la concurrence électorale. La présidentielle voulue par le régime est un non-événement. Tant que le chef de l'Etat intérimaire, Abdelkader Bensalah et le gouvernement dirigé par Noureddine Bedoui, deux figures du régime de Bouteflika, sont en poste, l'intérêt est dans la poursuite du mouvement jusqu'au changement du système. Il n'y a que le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales qui, en bon élève en termes de communication, donnait le bilan des postulants ayant retiré les formulaires de souscription de signatures. Mais, lorsqu'il s'agit de l'identité des candidats à la candidature, l'on n'adopte pas le même sens de devoir communiquer. Et pour cause, la quantité y est, pas la qualité. Pour un poste aussi important que celui du président de la République, sur les 73 postulants, il n'y a aucun prétendant sérieux. Tous les chefs de partis de l'opposition ont rejeté cette échéance que le Hirak a discréditée. La rue est devenue le Parlement où le peuple répond aux initiatives du pouvoir. De peur d'être définitivement condamnés, les leaders politiques ne pouvaient que se soumettre au verdict prononcé. Même les partis du régime, le FLN, le RND n'ont pas présenté de candidat. Un précédent pour un pouvoir qui se trouve sans candidat. Le tableau de ce qui semble être une véritable mascarade ne peut être maquillé par les candidatures de Abdelaziz Belaid, président du Front «El Mostakbal», Belkacem Sahli, secrétaire général de l'Alliance nationale républicaine (ANR). L'un est tellement envahi par le désir d'être président qu'il se donne la posture, mais sans charisme ni assise populaire. L'autre s'est découvert depuis quelques semaines une autre mission : soutenir l'insoutenable régime contre tous. Il y aurait aussi Ali Ghediri, général à la retraite qui insiste sur la voie des présidentielles comme seule issue à la crise. Dire que politiquement, cette élection n'est pas sensée avoir lieu. Politiquement et techniquement impossible A cela s'ajoute l'aspect purement technique qui constitue un obstacle de taille. En effet, des magistrats ayant déclaré leur soutien au mouvement du 22 février ont clairement annoncé qu'ils ne superviseraient pas l'opération. Tandis que près d'un tiers des communes de l'Algérie, (plus de 400 maires sur 1541), ne vont pas organiser l'élection. Ainsi, la mission s'avère plus qu'impossible. Prendre le risque d'aller aux élections avec de telles conditions, c'est faire un saut vers l'inconnu. «Porteuse de graves dangers dans une situation régionale tendue, la situation de blocage à laquelle nous assistons par le maintien de la date du 04 juillet prochain ne pourra que retarder l'avènement inéluctable d'une nouvelle République», avaient estimé Ali Yahia Abdennour, Ahmed Taleb Ibrahimi et Rachid Benyelles, dans leur appel publié samedi. Devant cette impasse, le pouvoir en place osera-t-il le coup de force ou cherchera-t-il une sortie ? Il est évident que peu de solutions, sinon aucune, se présentent devant lui. Désormais, le Conseil constitutionnel a, officiellement, 10 jours pour statuer sur la validité des candidatures. Mais, d'ores et déjà, des rumeurs sur un scénario de les rejeter en totalité pour justifier un report de l'élection, circulent. Ce serait une bouée de sauvetage pour permettre l'amorce d'une nouvelle voie. Celle du dialogue peut-être, surtout que maintenant les appels à l'ouverture de canaux de pourparlers directs être l'institution militaires et les figures du Hirak, les partis et la société civile, se multiplient. En tout cas, cette semaine s'annonce décisive à ce sujet.