Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a exhorté mardi à Varsovie les dirigeants européens à ne pas laisser la polémique concernant les accusations d'espionnage américain entraver les discussions commerciales entre l'UE et les Etats-Unis pour créer une zone de libre-échange. Cette négociation "est vraiment une question distincte", a-t-il souligné. "Elle concerne l'emploi, l'économie, la compétition dans une économie mondiale avec parfois des règles de concurrence très discutables et fragiles". "Ceci ne devrait pas être confondu avec toutes les questions légitimes qui peuvent se poser concernant la NSA et d'autres activités", a-t-il ajouté devant la presse. M. Kerry, qui est arrivé lundi soir en Pologne, a souligné que les négociations avec l'Union Européenne pour un Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) devraient aboutir à la création "d'une des forces économiques les plus puissantes de la planète". Le second cycle des négociations doit reprendre le 11 novembre à Bruxelles après avoir été suspendu lors du "shutdown" américain et la paralysie de l'Etat fédéral le mois dernier. Mais ces négociations ont également été affectées par la tempête diplomatique déclenchée par les révélations sur les opérations d'espionnage menées à l'étranger par l'agence américaine NSA. "Nous devons comprendre que, en tant que partenaires, nous sommes tous dans le même bateau. Nous nous efforçons tous de fournir une protection à nos citoyens", a déclaré M. Kerry lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue polonais Radoslaw Sikorski. Il faut "trouver le juste équilibre entre la protection de nos concitoyens et, évidemment, la vie privée de tous nos citoyens", a-t-il ajouté. Confrontée à la colère des Européens, la Maison Blanche a promis d'essayer de contenir les activités d'espionnage des services de renseignement américains. M. Kerry a admis jeudi dernier pour la première fois que son pays était parfois allé "trop loin" en matière d'espionnage. "Si nous nous y prenons bien, nous pouvons non seulement apaiser les préoccupations mais nous pouvons également renforcer nos relations dans le domaine du renseignement", a-t-il estimé mardi. M. Sikorski a souligné de son côté que la Pologne soutenait fermement la conclusion d'un accord commercial entre l'Union Européenne et les Etats-Unis. "La Commission Européenne nous représente dans ces discussions et elle seule est compétente dans ce domaine", a-t-il ajouté. "Toutefois, l'Union européenne n'a aucune compétence dans le domaine de la coopération des services secrets", a fait en même temps observer le ministre polonais. Le secrétaire d'Etat américain s'est également entretenu à Varsovie avec le Premier ministre polonais Donald Tusk avant de rencontrer plus tard le ministre de la Défense Tomasz Siemoniak à la base aérienne de Lask (centre) où des pilotes polonais et américains s'entraînent ensemble depuis novembre 2012. La Pologne a annoncé cette année son intention de dépenser 33,6 milliards d'euros pour moderniser son armée. "La Pologne montre ainsi son engagement ferme pour la paix et la stabilité et envoie un message important à tous les membres de l'OTAN", a estimé M. Kerry. Désignant les avions de combat américains F-16 sur le tarmac, il a assuré que les Etats-Unis étaient prêts à en vendre d'autres à la Pologne qui en avait acheté 48 en 2003 pour remplacer ses vieux Mig soviétiques. La visite de M. Kerry en Pologne survient alors que les grandes manœuvres de l'OTAN air-terre-mer dénommées "Steadfast Jazz" ont commencé samedi en Pologne et dans les pays baltes. L'exercice réunit jusqu'au 9 novembre quelque 6.000 soldats de plus 20 pays membres ou partenaires de l'Otan, dont l'Ukraine et la Finlande. M. Kerry a quitté la Pologne mardi après-midi pour Tel Aviv où il doit poursuivre sa tournée régionale.