Dans un entretien à paraître aujourd'hui sur les colonnes du magazine français Le Point, le chef du contre-espionnage français, Bernard Squarcini, donne dans le détail sa méthode dans la traque des terroristes. Il explique d'emblée sa philosophie et celle de ses pairs : l'anticipation dont il dit être obsédé. Ceci afin, dit-il, de venir à bout des terroristes avant qu'ils n'agissent. Il n'est pas question, explique-t-il, d'attendre que les bombes explosent pour ensuite relever dessus les empreintes. Ce professionnel du renseignement français donne un exemple vivant de l'efficacité et l'efficience de la prévention. Il fait part dans cet entretien d'un projet d'attentat dans la région parisienne qui ne visait ni plus ni moins que l'immeuble de la DCRI. Une cible loin de relever d'un hasard puisque le bâtiment n'est autre que le siège du contre-espionnage français. Manière, selon M. Squarcini, de frapper les esprits. Le coup fomenté remonte à la fin de l'année dernière, le 16 décembre 2008 plus exactement, lorsque le préposé à l'attentat kamikaze, un jeune Français répondant au nom de Rany A., a été arrêté à son domicile de Presles-en-Brie (Seine-et-Marne). Cet ingénieur en électronique converti à l'Islam avait préparé minutieusement son coup : repérage des lieux, vol en vue de pas moins de 200 kg d'engrais chimiques dans une entreprise voisine et subtilisation d'un camion pour les besoins de l'attentat programmé. Mais comment les services français ont-ils pu reprendre le fil de cet attentat avorté ? M. Squarcini s'explique : le potentiel kamikaze s'échangeait bien des messages via une boîte e-mail codée avec Peter Cherif, un djihadiste français arrêté en Irak, membre d'une filière partie de Paris pour combattre les Américains et qui venait alors de s'évader de la prison d'Abou Ghraïb pour se rendre en Syrie où il a abandonné le djihad avant d'atterrir dans la prison de la Santé. Depuis, les policiers ont examiné à la loupe les efforts de Rany pour recruter des frères d'armes ; ils ont vu son comportement se radicaliser jusqu'à effrayer ses proches. Il s'est rendu en Syrie en 2007, puis deux fois chez nous en 2008. Ses visites sur un site internet lié à Al Qaïda et les offres de services qu'il y a formulées ont convaincu les policiers à intervenir. Le juge antiterroriste Marc Trévidic l'a mis en examen pour «association de malfaiteurs en vue de commettre des actes terroristes» et croupit actuellement en prison.