La terre a tremblé dans la nuit mais le lendemain il a fait très beau. Enfin, très beau, si on ignore le côté sécheresse du soleil. A-t-on le droit de bouder notre bonheur en pensant aux barrages ? Normalement oui. Mais notre bonheur est bien pris en charge et il fait beau, même dans un ciel depuis longtemps orphelin de sérénité. La terre a tremblé. Et alors ? Tout le monde tremble, même en Ukraine. Mais c'est à Alger qu'il y a le printemps en hiver. Hier, c'était dimanche, on était censé travailler mais on va se promener. Enfin, se promener est une façon de parler. Juste ne pas travailler parce que personne ne nous le demande. On va errer parce que c'est interdit de marcher. En attendant le soir pour connaître les résultats de la Tripartite dont on… connaît déjà les résultats. Personne ne nous demande d'attendre, on nous demande seulement de rester debout. C'est un peu difficile sous le soleil mais on ne peut pas tout avoir dans la vie, il ne faut pas «exagérer» ! Hier il a fait beau et si le ciel n'y trouve pas d'inconvénient, ça va continuer. Ça continue toujours. Et puis que voulez-vous qu'on fasse de la pluie ? Il y a du blé en Amérique du Nord et des vaches en Amérique du Sud. Le reste est une affaire de sous-sol. Nous avons le pétrole. Nous avons même du soleil même si les deux sont inutiles, puisque ça ne donne que de mauvaises idées. Que voulez-vous qu'on fasse du soleil à part nous brûler le crâne en restant debout ? On ne fait rien du soleil, sinon prier qu'il s'efface quand il en fait trop. On ne fait rien de la pluie en dehors des inondations. On fait semblant d'avoir une agriculture et un élevage menacés par la sécheresse. Alors, on prie. De préférence après avoir consulté la météo. On ne va tout de même pas prier sans garantie de résultat, c'est connu. Et quand la pluie se met à tomber, on (re) prie pour qu'elle cesse. C'est ça le changement dans la continuité, n'est-ce pas ? Mais que voulez-vous qu'on fasse du changement ? Il faut continuer, il fait beau. On ne va pas travailler, on ne va pas se promener mais c'est toujours «ça». Errer parce qu'on ne peut pas marcher. Ni sous la pluie ni sous le parapluie. Ni au soleil ni la tête dans les nuages. Que demande le peuple ? Rien, le peuple est un cauchemar qui disparaît avant le réveil. On dort trop mais pas assez pour souhaiter se réveiller. Les matins sont une invention de l'esprit. Les après-midi une somnolence chronique et les soirs une création du diable. Nous respectons les saisons parce qu'il n'y pas de saisons. Plusieurs dans une journée. Un été indien de temps en temps, un hiver rigoureux quand Dieu est en colère et un printemps avorté tous les demi-siècles. On fait quoi maintenant ? On n'en sait rien, personne n'a lu «En attendant Godot». On fait semblant. D'attendre ? Non, de tout. D'être malheureux, d'être heureux, de vivre, de mourir et parfois de rire. De nous-mêmes, des autres et du rire. On est déjà lundi, on fait semblant de se réveiller, il fait toujours beau. On a déjà oublié que la terre a tremblé, puisque l'Algérie aussi a tremblé. Il va certainement pleuvoir dans les prochains jours mais ce n'est pas important. On ne sait rien faire de la pluie, on ne sait rien faire du soleil. Le temps peut changer, on continue. [email protected]