Il n'a absolument rien perdu de sa verve politique et son argumentaire toujours inspiré d'une actualité qui fait débat sur la place publique et qui est difficile à contredire. Ahmed Ouyahia, c'est de lui qu'il s'agit, est incontestablement ce tribun hors pair dont la mue politique a fait de lui un analyste qui a des réponses, plus ou moins convaincantes, à toutes les questions que se posent les Algériens en cette conjoncture cruciale, précédant de peu la présidentielle du 17 avril, un rendez-vous déterminant pour l'avenir de la nation. Après 14 mois de silence, de retrait de la vie publique, Ouyahia qui vient tout juste d'être nommé directeur du cabinet de la présidence de la République, vient de nous démontrer de la plus belle des manières que l'exercice de la politique est d'abord et avant tout une affaire de principes qu'il faut sauvegarder telle une lame inusable. Invité de l'émission «Controverse» qu'anime notre confrère Khaled Drareni sur la chaîne Dzaïr TV, l'ex-Premier ministre est parvenu, une fois de plus, à convaincre son auditoire qu'il appartient à cette catégorie d'hommes politiques dotés d'un franc-parler exemplaire, qui s'exprime sans faux fuyants et dont les propos ne souffrent d'aucun équivoque. Partisan d'un 4e mandat du président Bouteflika, Ouyahia a tenu à démonter qu'une telle option est dictée par «la stabilité de l'Algérie qu'il faudra consolider et d'un parcours de développement devant être parachevé», a-t-il dit. En termes de stabilité, l'ex-patron du RND n'ira pas par quatre chemins pour rappeler les efforts entérinés par Abdelaziz Bouteflika pour instaurer la paix et en finir avec la période d'effusion de sang ayant tant endeuillé le peuple algérien pendant tout une décennie de terrorisme. La réconciliation nationale Ouyahia évoquera ainsi la loi sur la concorde civile et la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, deux initiatives phares du président Bouteflika qui, selon lui, se sont traduites par des résultats probants en matière de lutte politique engagée contre le terrorisme. «Une fois la paix rétablie et la réconciliation faite, le chantier des réformes politiques a été aussitôt ouvert», enchaîne Ahmed Ouyahia, rappelant, entre autres, la révision de la Constitution entreprise dans le cadre de cette dynamique de réforme. Ahmed Ouyahia qui a qualifié le bilan des trois mandats successifs de Bouteflika de «réussi» ne manquera pas de rappeler qu'à l'arrivée de Bouteflika au pouvoir, en 1999, l'Algérie croulait sous le poids d'une dette extérieure de 35,5 milliards de dollars. Il rappellera ainsi que l'une des priorités des actions menées par le Président, dès son premier mandat à la tête du pays, «c'est de permettre à l'Algérie de retrouver au plus vite sa souveraineté financière». Ouyahia mettra ainsi l'accent sur la décision, selon lui, «historique» prise par Bouteflika et portant sur le remboursement de la dette extérieure. «Aujourd'hui, notre dette extérieure est réduite à 3 milliards de dollars», dira-t-il. Un bilan très positif L'invité de Dzaïr TV poursuit sa défense du bilan des trois mandats du président Bouteflika en indiquant que le pays dispose actuellement de 194 milliards de dollars de réserves de change et 7000 milliards de dinars enregistrés dans le Fonds de régulations des recettes. Avec une telle aisance financière, on peut être rassurés. En cas de crise, les salaires des travailleurs et la poursuite des programmes de développement «seront garantis par l'Etat», a argué Ouyahia. En évoquant les efforts consacrés sous la présidence de Bouteflika en vue d'une meilleure relance économique, l'ancien Premier ministre a tenu à signaler que les entreprises publiques ont bénéficié depuis 1999 d'une cagnotte de 1000 milliards de dinars attribuée dans le cadre des marchés de gré à gré. Bouteflika est capable d'assumer ses responsabilités Sur un autre volet, Ahmed Ouyahia a indiqué qu'en dépit du fait que Bouteflika est quelque peu affaibli parsa maladie, il n'en demeure pas moins que dans le cas où il serait élu au terme de la prochaine présidentielle, «il sera tout à fait capable» d'assumer sa mission de chef d'Etat pour les cinq années à venir». «Bouteflika est d'une parfaite lucidité et d'une capacité de raisonnement et de gouvernance exemplaires», appuie Ouyahia. Il argue ses propos en affirmant que le président de la République a accordé depuis quelque temps plusieurs audiences à des responsables étrangers ayant séjourné à Alger. Ceci pour dire que «si sa maladie constituait réellement un obstacle l'empêchant d'accomplir ses missions de chef d'Etat, cela aurait été souligné par la presse internationale», notamment les journalistes faisant partie des délégations ayant accompagné les responsables étrangers qui se sont rendus tout récemment en Algérie. «Dans le cas où Bouteflika serait élu pour un 4e mandat, ce dernier pourra même assister à des sommets internationaux d'envergure et l'Etat algérien dispose de tous les moyens pour garantir sa présence à ce genre de rendez-vous importants», a encore assuré Ouyahia, battant ainsi en brèche toutes sortes d'arguments sur la santé de Bouteflika qui pourraient empêcher ce dernier de rempiler pour un 4e mandat. A ce propos, l'ex-Premier ministre a affirmé que «n'étaient les enjeux qui pèsent actuellement sur le pays ainsi que le devoir de servir la nation, Bouteflika n'aurait jamais postulé pour un 4e mandat». «L'Armée ne désigne pas les présidents» A une question sur un supposé conflit entre la présidence de la République et l'institution militaire, Ahmed Ouyahia a tenu d'abord à mettre en exergue l'harmonie caractérisant le fonctionnement des institutions de la République, l'ANP y compris. Il enchaîne aussitôt en affirmant que «contrairement à ce que pense la rue, l'armée n'a jamais eu un pouvoir de décision». «Ce n'est pas l'ANP qui nomme les chefs d'Etat», a-t-il dit, en assurant que l'urne est le seul moyen d'assurer l'alternance au pouvoir. «Supposer que c'est l'armée qui forme les présidents de la République, c'est une insulte à la volonté du peuple de choisir son dirigeant», a encore ajouté Ouyahia. Ce dernier estime par ailleurs que ce n'est point une anomalie de voir des chefs militaires accéder au poste de président de la République, citant entre autres le cas du général de Gaulle qui a eu à présider aux destinées de la France. «Barakat», le dérapage ! D'autre part, l'actuel chef de cabinet de la présidence de la République a qualifié de «dérapage» les actions menées par le mouvement Barakat qui s'oppose à un 4e mandat du président Bouteflika. «S'opposer à la candidature de Bouteflika est un comportement antidémocratique», a argué Ouyahia qui s'interroge sur les acquis du mouvement Barakat en termes de consolidation de la stabilité du pays et du renforcement de son économie. Ahmed Ouyahia rappellera par ailleurs que les manifestations publiques sont toujours interdites à Alger. «La rue n'est pas un choix. Tout le monde sait que les manifestations publiques sont interdites à Alger», a-t-il dit, en faisant allusion aux manifestations publiques engagées jusque-là par les partisans du boycott. A ces derniers, Ouyahia dit reconnaître pleinement leur droit d'exprimer leur point de vue, mais dans un cadre conforme aux lois de la République. «Il y a manipulation à Ghardaïa» A l'évocation de la situation qui prévaut à Ghardaïa, marquée par une reprise des affrontements intercommunautaires depuis la fin de la semaine écoulée, Ahmed Ouyahia dénonce la manipulation. «Des gens tentent d'embraser Ghardaïa en cette période électorale», dira-t-il, sans plus. Il se dit par ailleurs «inquiet» quant aux derniers rebondissements survenus dans cette localité du sud algérien. Une localité qui s'est toujours caractérisée par le civisme dont ont toujours fait preuve ses habitants. «Ghardaïa s'est toujours distinguée par son civisme et son organisation depuis des siècles», a indiqué Ouyahia.