En cette veille de week-end printanière, un millier de sans- papiers ont occupé l'esplanade de la Bourse, à Bruxelles, non loin de la Grand-Place, lieu réputé de la capitale de l'Europe.Des sans-papiers fortement soutenus dans leurs revendications par une «coalition» composée des principaux syndicats, d'universitaires, d'ONG, d'associations et de très nombreux jeunes autochtones très remontés. En effet, en raison de l'absence d'une circulaire de régularisation, dont l'élaboration avait été annoncée dans l'accord gouvernemental du 18 mars 2008 et qui tarde à venir, les organisateurs ont décidé de mettre la pression sur le gouvernement. Cet accord devait permettre d'élaborer une circulaire de régularisation avec des critères objectifs. Le Premier ministre, Van Rompuy, à l'écoute En fin de matinée, la rue de La loi, siège de nombreux ministères et institutions, a été le théâtre d'échauffourées lorsque les manifestants ont bloqué cette artère importante du centre-ville. Dans le même temps, une délégation de soutien à la cause des sans-papiers a été reçue par Van Rompuy, le Premier ministre belge. Ce dernier aurait fait la promesse d'étudier sérieusement la question et ce avant les élections de juin. Une pétition regroupant plus de 32 000 signatures a également été remise au Premier ministre belge. De nombreux intervenants, dont des sans-papiers, ont pris la parole pour rappeler la situation souvent dramatique mais toujours hypothétique de centaines de personnes résidant pour certaines d'entre elles depuis plusieurs années en Belgique. Des familles qui sont parfaitement intégrées et qui travaillent et gagnent leur vie même si c'est souvent au prix d'une exploitation éhontée. Il faut dire que la problématique des sans-papiers et des migrants d'une manière plus générale pose problème en Belgique depuis de nombreuses années. Des procédures qui traînent en longueur En effet, les procédures de régularisation traînent en longueur, souvent à cause d'une volonté politique avérée pour des raisons électoralistes. Dans le nord du pays, particulièrement en Flandres, certains partis d'extrême droite, voire simplement libéraux, ne voient pas d'un bon œil des régularisations massives. La journée de mercredi a été aussi marquée par diverses animations culturelles sur le thème des sans-papiers. Des films documentaires devaient être projetés en soirée de 19h30 à 21h en plein air sur la place et à partir de 21h jusqu'à minuit un spectacle sous forme de concerts était programmé par divers artistes. Dans le reste du pays aussi Notons que des actions similaires ont été menées notamment à Liège, Anvers et Gand. A Liège, au cœur de la cité ardente, la place du Marché et celle de l'Hôtel de Ville ont été occupées par quelque 200 manifestants qui y sont venus soutenir la cause des sans-papiers. Le vaste mouvement de protestation vise surtout la ministre de la Politique d'asile et de migration, la ministre libérale flamande Annemie Turtelboom, qui «a expliqué récemment qu'elle disposait de toute la législature, soit quatre ans pour mettre en œuvre le programme du gouvernement et qu'elle n'agirait pas sous la pression». Annemie Turtelboom semble en effet traîner les pieds et s'attire, de plus en plus, les foudres de nombreuses associations et ONG en charge de la problématique migratoire. Il est vrai que nombreux sont les responsables belges qui jouent sur cette fibre sensible pour de vils calculs politiques et électoralistes. Pourtant, pas moins de cinq partis de la majorité avaient annoncé il y a une année une nouvelle politique en matière de séjour des étrangers avec «un système de points tenant compte notamment de la notion d'ancrage local durable pour procéder à des régularisations». Le ras-le-bol se généralise Aujourd'hui, un ras-le-bol semble s'emparer de nombreux acteurs sociaux notamment et, en montant au créneau, ils espèrent bien forcer les décideurs, sinon à répondre à leurs revendications et à celles des sans-papiers, du moins assumer leurs responsabilités en tant qu'élus politiques. Probablement, l'échéance de juin avec les élections à venir fera-t-elle réfléchir plus d'un. Mais sachant que le système politique belge reste très particulier, aucun pronostic ne peut d'ores et déjà être retenu. En attendant, Annemie Turtelboom prend le temps de voir. C'est vrai aussi que «la Belgique - c'est devenu une expression consacrée - ne peut supporter toute la misère du monde». Mais il est tout aussi vrai que la Belgique, bien malgré elle, s'est enrichie au contact de cette multiculturalité qui la colore avantageusement aujourd'hui. Le «Grand Jacques» aussi s'est exilé ! Cela ne convient pas à tout le monde mais, c'est une réalité et une richesse dont ne peut plus se passer ce plat pays si cher à Jacques Brel. Un énorme artiste qui n'a pas pu être prophète dans son pays et qui a dû, lui aussi, s'exiler ! C'est ainsi en Belgique. Hier en tout cas, face aux marches de la Bourse où s'agglutinaient des centaines de sans-papiers et de Belges ralliés à leur cause, le figuier méditerranéen qui s'élevait du bac de terre entre le Quick et le MacDo présentait déjà ses premiers bourgeons, pleins de promesses…Et ce n'est sans doute pas la ministre Turtelboom qui est à l'origine de cette mutation naturelle. Elle se promène rarement dans le quartier et elle préfère, sans doute aussi, des plantes beaucoup moins exotiques… Comme les jonquilles ou le crocus !