L'enquête sur le crash de l'avion d'Air Algérie au Mali, qui a fait 118 morts dont 54 Français, s'annonce longue et difficile, ont prévenu lundi les autorités françaises, soulignant que l'exploitation des boîtes noires pourrait prendre des semaines et que le recueil des restes des victimes s'avérait très délicat. Les deux boîtes noires, qui ont enregistré les paramètres de vol et les conversations dans le cockpit, sont arrivées lundi en France et doivent fournir des éléments au Bureau d'enquêtes et analyses (BEA) français sur les circonstances du drame, survenu dans une zone de savane et de sable très difficile d'accès. Les enquêteurs français travaillent "à l'ouverture de ces boîtes, ils travaillent à l'extraction des données (...). Le travail qui est le leur prendra du temps. Si les données sont exploitables, leur analyse, leur lecture, demandera peut-être plusieurs semaines", a déclaré le secrétaire d'Etat français aux Transports, Frédéric Cuvillier, lors d'une conférence de presse. Une des deux boîtes noires serait extérieurement très endommagée, selon une source proche de l'enquête. La France a mis ses drapeaux en berne lundi pour trois jours en signe de deuil, une décision rarement prise par les autorités. Aucune des 118 personnes à bord n'a survécu. L'équipage espagnol de l'avion d'Air Algérie avait demandé à "rebrousser chemin" avant que le contact ne soit perdu et alors que la météo était "mauvaise", a précisé au cours de cette même conférence de presse le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. "Toutes les hypothèses seront examinées dans le cadre de l'enquête. Ce que nous savons d'une façon certaine, c'est que la météo était mauvaise cette nuit-là, que l'équipage de l'avion avait demandé à se dérouter, puis à rebrousser chemin, avant que le contact ne soit perdu", a déclaré le ministre. 'Restes pulvérisés' Le chef de la diplomatie française a insisté sur la difficulté à récupérer les dépouilles des victimes, comme le président François Hollande s'y est engagé. "Le recueil des dépouilles des victimes est engagé. Il se fait dans des conditions extrêmement difficiles (...). Les restes sont pulvérisés, la chaleur accablante", a-t-il expliqué. Quelque 200 militaires français sont déployés sur le site pour le sécuriser, accompagnés par des forces maliennes et de l'ONU. Des experts maliens, espagnols, algériens participeront à l'enquête, ainsi que des américains, nationalité du fabricant de l'avion. A bord de l'avion, un McDonnell Douglas MD-83 loué par Air Algérie auprès de la société espagnole SwiftAir, se trouvaient aussi 23 Burkinabè, huit Libanais, six Algériens, des ressortissants de plusieurs autres pays et les six membres, espagnols, de l'équipage. "Un coordinateur sera nommé dans les prochaines heures pour assurer le contact avec les familles des victimes", a aussi annoncé Laurent Fabius. Pour la quatrième fois en cinq jours, le président français a réuni lundi matin plusieurs membres du gouvernement - le Premier ministre, Manuel Valls, et les ministres concernés - pour évoquer le crash du vol AH5017, qui reliait Ouagadougou à Alger et s'est écrasé moins d'une heure après le décollage, dans la nuit de mercredi à jeudi. La première boîte noire avait été récupérée vendredi par l'armée française venue sécuriser le site du crash dans la zone de Gossi, à environ 100 km de Gao, la plus grande ville du nord malien. La seconde l'avait été samedi par des experts de la mission de l'ONU au Mali (Minusma). En France, le parquet de Paris a ouvert jeudi une enquête préliminaire pour "homicides involontaires". Un juge d'instruction doit être désigné mardi. Dimanche, le gouvernement malien a indiqué avoir fait de même après l'annonce de la découverte des débris de l'avion. Samedi, le Burkina Faso avait également annoncé l'ouverture par le procureur de Ouagadougou d'une enquête judiciaire pour rechercher les causes de la catastrophe. "La coopération internationale est à l'œuvre pour que nous sachions ce qui est advenu de l'appareil (...) Ce qui doit être fait le sera en partenariat entre nos différents pays: l'Algérie, la France, le Burkina Faso et le Mali", a assuré le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta.